[bghumain] Angueran Archibald.

Ici se trouvent les BGs des héros décédés, paix à leurs âmes.

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Ashern
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[bghumain] Angueran Archibald.

Message par Ashern » dim. 27 février 2011 à 13h35

Angueran Archibald est un homme de vingt deux ans, demeurant au Château Impérial d'Aden en tant que monarque du Royaume Adenois avec sa compagne, la Reine Laën Archibald, avec qui il est lié depuis maintenant quatre années. Ayant subis une éducation religieuse sous le signe d'Einhasad, son union et ses convictions l'ont fait se tourner de plus en plus vers Eva pour finalement le convertir — fort malheureusement, des évènements liés à l’Émissaire de Dion lui ont demandé d'oublier toute Foi en répudiant l'amour envers les Dieux. Possédant une notoriété publique conséquente de part ses titres, il fut connu et reconnu pour plusieurs de ses actions, que cela soit en tuant la Bête menaçant le Château de Dion que contre ses nombreuses batailles couronnées de succès l'opposant au Capitaine Maudit, Zaken ; l'Essence Divine, Noct ; la Fée de l'Hiver, Freya ; l’Émissaire de Dion, Sybille Hagstern ; et bien d'autres. Fin stratège, celui-ci organise la plupart des combats pour l'Alliance du Sud.

Suivant le Précis de l'Ordre de la Chevalerie comme conduite de vie, Angueran ne possède aucun apriori sur les différentes ethnies. Néanmoins, sa lutte semble acharnée contre le fanatisme ou quelconque acte mettant en péril la Liberté et l'Égalité. Galant et habitué aux bonnes manières, il demeure une présence agréable pour son interlocuteur tout en gardant une fougue et une audace digne de sa race, et de son jeune âge. Utopiste et parfois naïf, il demeure persuadé que le bien réside dans chaque personne, et qu'il est de son devoir de tenter que celui-ci triomphe avant d'user de son arme.

Redoutable combattant, celui-ci maîtrise la lance avec une expertise rarement égalée, ainsi que diverses autres armes telles que l'épée simple ou le bâton. Sa carrure et son entraînement lui permettent des mouvements fluides et puissants, au détriment de la précision ou la vitesse. Il n'a aucune connaissance en magie, même rudimentaire. Son arme principale, dont l'embout est une pierre orangée lumineuse ancrée par des racines de bois, repose dans son dos par une légère armature d'acier. Deux épées simples reposent autour de sa taille, de chaque côté, dans des fourreaux en cuir. Une dague à la lame ondulée repose au niveau de son mollet, accrochée à sa botte, par une lanière.

Physiquement, Angueran demeure un homme agréable à regarder. Brun aux prunelles grisâtres, beaucoup s'accordent pour affirmer qu'il paraît aux premiers abords ténébreux, voire mystérieux. Sa voix rauque n'aide aucunement ses aprioris à ne point naître. Dépassant le mètre quatre-vingt dix et le poids conséquent pour un guerrier, celui-ci possède une musculature équilibré mais néanmoins notable pour son jeune âge. Quelques tâches de rousseur très estompées parsèment son visage ; certains s'accorderont pour dire que cela provient du côté maternel, alors que d'autres affirmeront que c'est son épiderme qui fut attaqué durant des années par ses travaux dans les champs. De nombreuses cicatrices parsèment son corps, mais demeurent relativement soignées de par les soins rapidement offerts ainsi que la qualité de ceux-ci. Fort heureusement pour lui, aucune ne réside sur son visage — chose que bien du monde ne verra seulement de lui, tant son armure est imposante.

Il porte plusieurs ornements sur lui. Un collier tribal où réside plusieurs plumes d'aigle et de faucon attachées par des fines lanières de cuir, ainsi qu'un autre pendentif représentant quatre branches élémentaires, possédant la légende que qui la porterait aurait la possibilité de changer le cours du monde — ce dernier étant visiblement un cadeau, étant donné la modestie du Chevalier. A ses doigts résident plusieurs bagues, dont l'alliance offerte par Laën en argent, digne de l'art elfique ; ainsi que deux chevalières de la même matière mais semblable à l'artisanat nain, et enfin une bague-griffe reposant sur son index droit, en acier et visiblement très tranchante.


Titres :
  • — Monarque du Royaume Adenois.
    — Héros de la Bête de Dion.
    — Muse du Printemps.
    — Bretteur de l'Automne.
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Ashern
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Re: [bghumain] Angueran Archibald.

Message par Ashern » dim. 27 février 2011 à 13h35

( Petite précision : Ce background est une réécriture d'un écrit déjà existant et validé, mais qui ne me plaisait pas assez. Je mets donc ce nouvel écrit en validation pour voir s'il se trouve quelques fautes qui m'auraient échappé, ou des incohérences. Bien entendu, ce personnage existant déjà avec une histoire validée, je prendrai mon temps pour l'écrire. Bonne lecture ! )

I-I.
Des plantes bien étranges...
Jacques observait cette plante rampante qui serrait entre son corps sinueux ce pauvre arbre qu'il était en train de trancher, obnubilé par cette sève qui s'écoulait de lui comme le sang d'un torturé. Avec une lenteur sadique et une douleur latente, le végétal resserrait son étreinte contre l'écorce, l'obligeant à céder sous la force exercée dans un maigre craquement. Le bûcheron était certes fasciné par ce spectacle qui s'offrait à lui, mais cependant dérangé par une telle souffrance visible. La nature ne possédait point de conscience, disait-on, mais ce pauvre chêne semblant avoir vécu tellement d'années paraissait tellement agoniser sous le joug de cette spirée… Il devait faire quelque chose.
Avec une certaine réticence, il se saisit du manche de sa hache qui demeurait plantée dans un tronc à côté de lui pour la délivrer de sa prison et la porter vers son flanc. Un dernier regard vers cet arbre implorant la pitié par ses cris d'écorce brisée et ce sang écarlate qui en écoulait, puis il éleva son instrument en l'air pour donner le coup de grâce. Telle la Mort, il comptait délivrer l'innocent de la torture par la faux.

« Jacques ! »

Avant qu'il n'eut le temps d'abattre sa hache, ce hurlement l'arrêta en son mouvement, obligeant le gentilhomme à détourner le regard pour voir quelle en était la source. Qu'elle ne fut pas la surprise lorsqu'il vit Michelle, sa voisine, courir dans sa direction en maintenant entre ses doigts boudinés ses pans de robe pour ne point la tâcher, ni trébucher. Les jambes bien enrobées de cette mégère – qui semblaient à des rôtis fumés tant le ficelage de ses bas était grossier avec pareille matière – bravaient les hautes herbes avec toute la force de son vieil âge. Jacques aurait volontiers rit face à un tel spectacle en temps normal, mais le masque d'effroi que cette femme portait ne lui annonçait rien de bon. Il déposa le bout de sa hache au sol, prenant appui sur celle-ci avec ses bras en la regardant arriver proche de lui. Lorsque celle-ci lui sembla assez à proximité pour qu'il puisse se faire entendre sans hurler, il prit alors la parole de sa voix rauque ;

« Hé bien, Michelle, que se passe-t-il pour que tu me rejoignes dans les prés avec une telle course effrénée ? »

Le bûcheron n'aimait point cette femme qui passait la plupart de son temps à la fenêtre de sa laiterie pour observer les gens passer et ainsi être au courant de toutes les dernières rumeurs. Son commerce était d'ailleurs très vite devenu un véritable petit salon entre les femmes du quartier pour échanger les derniers ragots et potins sur des gens qui, la plupart du temps, elles ne connaissaient point. Mais il devait malgré tout la supporter, puisque celle-ci était sa voisine et surtout, une fréquentation de son épouse. Cela ne l'enchantait point, mais il avait apprit à garder son calme face à ses propos tendancieux et souvent erronés pour jouir du plaisir de la voir se ridiculiser devant lui. Néanmoins, le pauvre homme n'avait jamais connu un tel empressement de la part de cette mégère et sachant que son goût à l'effort était tout aussi prononcé que celui pour le travail, il redoutait qu'une telle course était source d'une nouvelle bien plus importante que la dernière rumeur qui agitait le quartier.
Finalement, Michelle rejoignit enfin ses côtés, relâchant sa robe pour la laisser glisser grossièrement sur ses jambes engraissées. Une fine particule de sueur reposait sur son visage, laissant quelques gouttes s'immiscer entre les rides pour mourir sur ses joues rougies par l'effort. Elle se plia en deux, mains sur les genoux et face contre terre, pour reprendre son souffle avec la douceur et délicatesse d'une jument. Puis, d'un mouvement qui se voulait charmeur, elle passa ses mains ornées de bijoux de mauvaise facture – mais dont l'ornement faisait plaisir à cette dame pour tenter de montrer signe de richesse – dans ses cheveux, tentant de les remettre en place. Jacques patientait, main sur la hanche, regardant la scène grotesque qu'elle offrait devant lui.

« Martine est… est en train d'accoucher. »

L'amusement disparut sur le visage du bûcheron pour ne laisser plus que la stupeur. Le jour tant attendu était enfin arrivé. Sans se faire prier, il se retira de son appui pour dépasser la laitière et s'élancer dans les prés en direction de sa maisonnée.

« Mais attendez-moi ! … »

Le cri de la femme résonna derrière lui, mais il en fit fi. Plus rien ne comptait à présent dans sa tête que de rejoindre le plus rapidement possible sa femme pour être là lorsque leur fille ou leur fils pointerait le bout de son nez. Ses bottes de cuir mal vieillies écrasaient l'herbe avec force sous ses pas lourds, manquant plusieurs fois de s'engouffrer dans les terriers de ses amis les taupes pour lui fouler la cheville. Mais cela ne le ralentissait point, le laissant continuer sa course sous ce soleil de plomb. Très vite, la voix de la voisine ne se fit plus entendre derrière lui au fur et à mesure que la ville apparaissait à l'horizon sous forme d'une silhouette ombragée. Il ne mit guère de temps à braver la distance le séparant de la petite maison qu'il détenait avec son épouse, observant avec un tout nouveau regard ce lieu qui allait bientôt devenir le berceau d'une nouvelle famille. Comment pouvait-il penser à autre chose que l'enfant qu'il allait bientôt naitre, fruit de l'amour de cette splendide femme qu'il avait épousé depuis bientôt vingt cycles lunaires ?
Prestement, il contourna la demeure pour se diriger vers leur petite étable. Les hommes n'étaient autorisés lors de l'accouchement, les obligeant à rester en dehors de leur demeure pour ne point gêner leur épouse. Cette coutume était très agaçante pour les pauvres pères qui ne devaient que rester en retrait pour entendre les cris sans savoir si ceux-ci étaient de douleur, de joie, ou de malheur. Jacques finit par pousser les deux battants de l'étable, laissant les quelques vaches qu'ils détenaient meugler en chœur. Il se dirigea rapidement vers elles pour délier les nœuds qui les maintenaient en place, les laissant se ruer de part et d'autre dans un bazar monstrueux. Un tel acte n'était que le fruit d'une superstition qui voulait que tout enlacement soit défait pour ne point que le cordon s'entoure autour du cou du nouveau né. Vérité ou mensonge, le bucheron ne voulait prendre aucun risque et exécutait les traditions avec rigueur et ordre. Il s'acharna alors sur un dernier nœud gordien avec rage de ses mains tremblantes, avant de sortir à grandes enjambées de l'étable pour refermer les portes et empêcher leur maigre bétail de s'enfuir. Il fallait bien les garder, sinon leur enfant ne pourrait point manger à sa faim ! Alors qu'il clôturait le lieu par un mouvement de clef, il entendit une fenêtre s'ouvrir où s'échappa un nouveau cri.

« L'haleine est bonne ! »

L'homme regarda la matrone à l'encadrement de la fenêtre qui venait d'annoncer la bonne nouvelle, avant de refermer celle-ci. La main en cache-soleil, il ne détacha point son regard des vites, un fin sourire aux lèvres. L'haleine de son épouse était bonne, et donc l'accouchement sera facile. Empli de cette nouvelle joie, il ne remarqua point que la vieille Michelle avait fini par le rejoindre, se posant à côté de lui essoufflée.

« Avez-vous des nouvelles de la parturiente ?
― L'haleine est bonne ! »

Il accompagna cette parole d'un enlacement contre le corps moite de la vieille dame, se moquant à présent de toute l'horreur qu'elle lui procurait à la moindre entente ou vision. Celle-ci, décontenancée par un tel acte, demeura figer, aussi rougie qu'une pivoine.

« Du calme, mon bon monsieur. Je me dois de rejoindre votre femme pour l'assister.
― Faites, faites ! »

Encore abasourdie par ce moment de tendresse de cet homme, elle tituba sur quelques pas avant de rejoindre la porte d'entrée et la refermer sans délicatesse derrière son postérieur digne d'une jumelle engrossée. Il n'eut le temps de calmer ses pensées que la fenêtre s'ouvrit à nouveau, dévoilant le visage de la matrone qui avait à présent un chignon totalement désordonné, laissant quelques mèches brunes tomber sur son visage.

« Où se trouve votre laurier ?!
― Dans la cuisine ! Le bocal vert au dessus du chaudron ! »

La fenêtre se referma aussitôt, sans un mot de plus. Jacques comprit alors que l'accouchement était en train d'avoir lieu. D'après ce que lui avait expliqué son épouse quelques jours auparavant, la matrone qui réalise l'accouchement doit s'enduire les mains d'huile de violette et de lauriers avant de pénétrer celles-ci dans le vagin de la parturiente. Mais son épouse, sûrement malmenée par les convulsions, n'avait pu leur indiquer l'emplacement de ces derniers. Légèrement décontenancé par tous ces événements, Jacques s'entreprit de s'asseoir dans le pré en tailleur tel un enfant, fixant la fenêtre où se déroulait certainement le plus beau jour de sa vie avec un sourire légèrement niais. Mais il se souciait bien peu de l'image qu'il donnait à ce moment précis, préférant penser à comment il nommerait cet enfant, de quelle couleur allait être ses cheveux, ou encore quelle brillante carrière il allait mener. Le temps passait, ne laissant que derrière le passage de l'astre solaire la douce chaleur d'un été qui se finissait. Malgré que la nuit commençait à tirer son voile sur les terres au-dessus des monts, le bûcheron ne cillait point, continuant de fixer sans tressaillir la fenêtre dans l'attente d'une quelconque nouvelle. Finalement, celle-ci vint quelques minutes plus tard dans un bruit sourd. La surprise fit sursauter le pauvre homme qui sentit son cœur battre la chamade tel un enfant surpris en train de faire une bêtise. Le regard tourné vers cette matrone aux cheveux totalement en pagaille, et à la joue tâchée de sang, il retenu son souffle ;

« C'est un petit garçon en parfaite santé ! »

Il ne prit le temps de répondre, restant quelques secondes abasourdi avant de prestement se relever pour se diriger vers la porte d'entrée. Il l'ouvrit sans ménagement, avant d'avaler les marches sous ses grandes enjambées pour rapidement atteindre l'étage. Dans sa course, il fit tomber un vase de fleurs qui vacilla avant de s'écrouler au sol dans un bruit sourd. L'homme s'arrêta alors devant la porte de la chambre, la fixant du haut de son air penaud. Il tendit l'oreille, écoutant les différents échanges entre les femmes présentes, tentant de comprendre leurs propos. Paralysé par une peur qu'il n'arrivait à définir, il ne parvenait à poser sa main sur la poignée pour ouvrir cette simple petite barricade de bois qui le séparait de son enfant. Allait-il être heureux et en bonne santé ? Lui offrirait-il tout ce dont il a besoin ? Est-il réellement capable d'apprendre les rouages de la vie à ce petit bambin ? Jacques était pris pour la première fois d'une chose qu'il redoutait : le doute. Mais celui-ci fut aussi vite dissipé que la vitesse dont la porte fut ouverte à sa grande surprise. Il releva la tête, un brin surpris, observant Yvelaine, la tante de Martine qui logeait chez eux depuis quelques jours pour assister sa nièce durant son accouchement. Elle haussa un sourcil, étonnée de trouver l'homme ici ;

« Hé bien, Jacques, que faites-vous là ? Entrez donc. »

Pris au dépourvu, il opina avant d'entrer par le chemin que venait de lui offrir la vieille dame. Il découvrit alors dans cette pièce ― où empestait une horrible odeur ― Michelle qui voletait autour du lit, observant la pièce bien plus que la parturiente pour trouver sûrement quelques ragots à raconter à ses amies dès le lendemain en ouvrant sa laiterie. La matrone qui l'avait tenu au courant de l'évolution de l'accouchement par l'encadrement de la fenêtre, quant à elle, rassemblait la secondine pour la mettre dans un bocal dans le but que les parents puissent l'enterrer pour ainsi protéger le nouveau né des démons – encore une autre superstition que Jacques allait très certainement suivre. Il découvrit alors derrière le passage de cette femme son épouse, le visage et les cheveux couverts de sueur, l'enfant dans ses bras. Elle tourna son regard lentement vers lui pour offrir un sourire fatigué mais comblé. L'homme ne tarda point de braver la distance entre elle et lui, ne se souciant plus de ce qui les entouraient, pour s'asseoir à côté de sa couche. Martine était en train de frotter le corps de leur enfant avec un mélange de rose pilée, du sel et du miel pour raffermir sa peau fragilisée par l'accouchement. Il la regarda faire tendrement, observant par la même occasion ce petit bonhomme qui logeait entre ses bras. Sa petite bouille d'ange laissait ses yeux vagabonder de part et d'autre, comme paniqué et fasciné par ce nouveau monde qu'il découvrait.

« Vous n'oublierez point d'enterrer la sec-…
― Oui, ma dame. Merci. »

Il la coupa, ne voulant point entendre ces diverses formalités pour pouvoir se consacrer pleinement à sa nouvelle petite famille. Jacques déposa alors un baiser sur le front humidifié de son épouse qui ferma les yeux quelques instants sous cette tendresse. Puis, les yeux larmoyants, il accorda un nouveau regard à son enfant amoureusement, contemplant ses petites jambes boudinées bouger dans tous les sens.

« Il sera aussi vivace que son père, dirait-on. »

Un léger rire se fit entendre entre le jeune couple qui, joue contre joue, regardait ce petit homme. Puis, Martine détourna la tête pour déposer un baiser à son époux, avant de chuchoter en le regardant dans les yeux.

« N'est-il pas magnifique ?
― Il est parfait, ma chérie.
― Que penses-tu de l'appeler Angueran ? »

Il écouta la proposition de sa femme, avant de détacher son regard de ses prunelles émeraudes pour fixer son enfant. Puis, un fin sourire aux lèvres, il s'approcha de lui et murmura doucement au creux de son oreille ;

« Bienvenue à toi, Angueran. Mon fils. »
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Re: [bghumain] Angueran Archibald.

Message par Ashern » dim. 27 février 2011 à 13h36

I-II.

Les flocons se mourraient au sol, rejoignant l'étendue blanchâtre dont ils avaient habillés le monde pour en cacher la pauvreté. Il faisait grandement froid ce jour là. Le vent, sadique et violent, s'immisçait dans toute la petite maisonnée en profitant de chaque petit trou dans les murs, ou contours des fenêtres et portes. Le combat contre le temps était infernal, aussi vivace qu'un serpent et fort qu'un bœuf. Le jeune couple tentait bien de le repousser du mieux qu'ils le pouvaient en s'emmitouflant sous de grosses couvertures ou remuant quelques braises dans le foyer de la cheminée en espérant raviver la flamme ; mais cette lutte semblait peine perdue.

« Foutu hiver... Ne finira-t-il donc jamais ? »

Jacques relâcha le rideau dans un soupire, cachant ce paysage immaculé qu'il ne supportait plus de voir. Bien pire qu'un mauvais temps simple et anodin, cette tempête de neige qui ne cessait de frapper nuisait à leurs récoltes. Le pauvre bûcheron savait que son maigre terrain de blé dont il prenait soin chaque jour avec sa femme ne survivrait point à un tel mordant ― et, bien qu'il se soit résigné à cette idée, il était impatient de pouvoir l'entretenir à nouveau en espérant pouvoir réussir à faire vivre sa petite famille durant le prochain mois. Le bétail était, quant à lui, protéger à l'intérieur de l'étable, mais il était certain que certains de ses bovins ne survivraient pas. Ses pensées bien noires ne parvenaient à disparaître de son esprit, même lorsqu'il était allongé sur sa couche, son épouse dans les bras.
Un nouveau soupire vint embrasser le précédent, alors qu'il se laissa tomber lourdement sur une chaise de la cuisine, le visage enfoui dans ses mains rugueuses. Sa respiration se fit forte dans cette cavité, résonnant dans la petite pièce comme pour souligner son désarroi. Le bruit des marches en bois de l'escalier se joignit néanmoins à la symphonie de ses râles, laissant son grincement si particulier retentir dans toute la demeure. Martine apparue alors dans l'encadrement de l'entrée, les épaules entourés de son châle en laine de mouton qu'elle maintenait contre elle en le reliant au niveau de sa poitrine par sa main droite. Lorsqu'elle vit son mari dans un tel état, elle ne put s'empêcher d'afficher une triste mine, comme désolée de ne pouvoir faire quelque chose pour lui. Nonchalamment, elle brava la distance les séparant de ses petites sandales en toile pour frotter son dos d'une manière énergique ― tout autant pour le rassurer que pour le réchauffer. Voir cet homme si fort courber l'échine ― autant au sens littéral que figuré ― éveillait en elle des démons passés qu'elle n'arrivait à chasser, lui rappelant avec parfois exagération que son époux était certainement pour elle son unique pilier. Ne voyant aucune réaction de son bien aimé quant à sa caresse, elle émit un bref soupire de désolation avant de se rendre vers la bassine lui permettant de faire la vaisselle, posant ses deux mains glacées sur le rebord, bras tendus. La tête pendante au milieu de ce perchoir qu'elle s'était elle même faite pour se donner la force, elle ne remarqua point que même elle, à son tour, elle courba l'échine. Un bref regard par la fenêtre lui fit comprendre que la neige continuait de tomber, et que cela allait certainement continuer toute la nuit durant.

« Comment se porte-t-il ?
― La fièvre n'a pas baissée. »

Jacques ôta son visage de ses mains, adressant un regard à fois surpris et dépité à sa femme qui lui tournait le dos. Brusquement, elle retira sa main du bord de la bassine pour saisir un chiffon qui traînait par là et le plonger à l'intérieur, le laissant s'imprégner d'eau. Son époux baissa les yeux au sol, accablé par cette nouvelle qu'il aurait espéré bien meilleur. Un léger reniflement lui fit comprendre que sa femme était en proie aux larmes, mais il ne sut quoi dire ni même quoi faire, se sentant tout aussi impuissant qu'elle. Martine torsada alors son bout de chiffon humide, le faisant égoutter dans la bassine, avant de se détourner sans un mot vers la porte de la cuisine. Le bûcheron réussit enfin à détacher son regard de ce sol boisé, levant ses yeux verdâtres vers sa femme qui se mouvait avec lenteur dans la pièce. Elle n'était point très belle, ni même attirante. Ses longs cheveux blonds avaient perdus de leur beauté, laissant la douceur de la soie être remplacée par la rigidité du blé après avoir essuyés les caprices du temps. Vulgairement attachés par un chignon visiblement fait à la va-vite, des mèches grossières tombaient de-ci de-là, telle une structure manquant de s'écrouler à n'importe quel moment. Sa peau, quant à elle, était d'une blancheur cadavérique, laissant apparaître sous sa poigne solide autour du chiffon des veines rosées et sinueuses tout le long de son avant bras. Oui, Martine n'était ni très belle, ni très attirante, mais elle était aimée. Pour une façon qu'il ignorait totalement ― et là était certainement la magie de leur couple ―, il la trouvait resplendissante, gracieuse, et incroyablement douce. Il aimait son petit pincement de lèvres qu'elle était en train de réaliser en passant la porte, signe d'un certain trouble qu'elle préférait taire mais que son corps désirait montrer, ou encore sa démarche parfois masculine et grotesque, comme lorsqu'elle plantait la pioche dans le sol avec sa robe nouée juste au-dessous de sa culotte. Son amour pour elle était un ensemble, une certaine alchimie entre des petits rien et des gros tout qui ne prenaient que tout leur sens lorsqu'ils étaient unis. Mais cette contemplation passagère périt bien vite lorsque sa femme disparue dans l'encadrement, ne laissant que comme unique souvenir de son passage le bruit de ses pas qui faisaient à nouveau craquer l'escalier.
Jacques demeura penaud sur sa chaise, fixant la chambranle où Martine était passée, avant de se faire violence pour sortir de son stoïcisme en se levant mollement. Il lui emboîta alors le pas, sortant de la cuisine d'une démarche lourde comme s'il venait seulement de se réveiller, pour atterrir dans le couloir traversant en son centre la maisonnée. Au fond de celui-ci se dressait le grand escalier, celui-là même que son épouse venait certainement de prendre pour se rendre au chevet de leur enfant. A pas lents, il traversa ce grand espace en attardant son regard sur des fleurs séchées posées sur une commode. Maussades. Elles étaient incommensurablement maussades. Il ne parvenait à en détacher son regard à la fois perdu et captivé. Au fond, elles étaient comme lui, cueillies dans leur jeunesse, le regard tourné vers le soleil, pour finalement subir le fils des saisons, les obligeant à courber l'échine et n'être plus que l'ombre d'elles-même. Fantôme(s) d'un passé lointain et oublié... Un soupire mit fin à ses pensées métaphoriques. Il reprit le fil de sa marche, frigorifié par ce froid que les modestes murs de la maisonnée n'avaient su retenir. La montée des escaliers fut telle une épreuve qu'il releva avec brio, encouragé par les gémissements de son fils qui se faisaient entendre. La maladie qui l'accablait depuis déjà bien des lunes ne semblait vouloir disparaître malgré tous les remèdes ancestraux utilisés par Martine, ou encore les légendes urbaines qui se disaient de-ci de-là.
Jacques, arrivé devant la porte, marqua un arrêt pour se donner la force, avant d'appuyer sur la poignée pour pénétrer dans la chambre.

« Papa... »

Le supplice de son fils prononcé à mi-voix lui parvenu tel un couteau en plein cœur. L'homme observa la chambre, dans un silence semblant figé dans le temps. Les rideaux étaient tirés, laissant une lumière opaque éclairer la pièce, la rendant lugubre et glaciale. Au centre de celle-ci se trouvait un lit aux draps immaculés qui ne parvenaient à retirer l'image d'une scène de linceul. Le visage humidifié de l'enfant apparaissait à peine, laissant juste entre-apercevoir ses cheveux blonds collés par la sueur sur l'oreiller ou son visage blême. La bouche entre-ouverte et la respiration saccadée, il semblait lutter de toutes ses forces pour garder le moindre petit air à sa disposition. Une de ses mains demeurait crispée autour de celle de sa mère qui était assise à ses côtés, lui passant ce chiffon humidifié qu'elle était allée chercher sur son front fiévreux. Immédiatement, comme saisissant enfin cette dangerosité qu'il ne voulait percevoir jusqu'alors, Jacques brava la distance le séparant du fruit de ses entrailles.

« Angueran... Ne t'en fais point, papa est là. Murmura-t-il en lui caressant du bout des doigts la joue, le regard emplit de peine.
― Jacques, je pense qu'il est atteint par le mal des ardents. »

Martine regarda son mari en prononçant cette fatalité aussi tranchante que la lame de la Faucheuse, décontenancée de voir son aimé pourtant si robuste de corps être aussi désemparé et fragile face à la situation de son enfant.

« Mais cela est impossible... Nous sommes dans la saison hivernale, et...
― Il est dans cet état après avoir mangé le blé qui demeurait dans la grange depuis déjà plusieurs lunes... Je ne vois d'autres explications. Conclue-t-elle timidement, comme pour se cacher elle-même ses propres propos.
― … Que devons-nous faire ?
― Prier. »

Ils se regardèrent un long instant en silence, avant de reprendre leur tendresse à l'adresse du jeune Angueran. Le mal qui les rongeait peu à peu ne parvenait à se dissiper, la vision de leur enfant leur rappelant à chaque seconde à quoi ils étaient confrontés. Tout paysan savait que cette maladie ― qui fut nommée « mal des ardents » à cause de sa douleur vive et des fièvres qu'elle provoquait ― était terrible, voire létale. Elle apparaissait à cause de champignons nocifs qui poussaient sur les produits céréaliers et qui, une fois ingurgités, provoquaient des maux terribles. Cela pouvait passer de la simple fièvre à des convulsions, des vomissements aux hallucinations, de la gangrène à la mort dans le pire des cas. Avec la pauvreté paysanne et les soins de piètre qualité qui étaient assurés par quelques magiciens crapuleux, il était bien rare que les malades parviennent à survivre à celle-ci, alors des enfants...
Martine, dans un soupire, retira le chiffon emplit de sueur de son fils pour le jeter dans la bassine pleine d'eau, lasse. Elle retenait ses larmes tant bien que mal, préférant ne point offrir cette vision à celui-ci en se couchant à ses côtés pour le serrer dans ses bras, la tête enfouie dans son cou frêle. Le père, à la fois attendri et anéanti par cette vision, ne put que remonter la couverture au niveau du cou d'Angueran presque machinalement, avant de lui déposer un baiser sur le front. Sur le ton de la confidence, il approcha ses lèvres perdues dans cette forêt ardue de poils blonds pour murmurer à son oreille ;

« Il va falloir être fort, Angueran. Cette maladie n'est qu'une épreuve que tu dois surmonter, même si les maux sont nombreux et douloureux.
― J'ai si mal, papa... Lâcha l'enfant dans un soupire, comme si ces quelques mots lui prirent une grande énergie.
― Je sais, mon fils, je sais... Mais la vie est dure, et ce qu'il se passe là n'est qu'un obstacle que tu dois franchir avec bravoure et courage. C'est ainsi qu'un homme se forge ; dans la dureté des épreuves qu'il rencontre. Tu devras faire face à des situations tout aussi difficiles toute ta vie. Mais rien ne sera plus fort que ça. Dit-il en posant la main sur le poitrail de l'enfant au niveau du cœur pour lui désigner, avant de reprendre. Tant que tu crois à tes rêves et à tes ambitions, rien ni personne ne pourra quelque chose contre toi. »

L'enfant regarda son père dans les yeux tel un pantin sans vie pendant de longues secondes sans un mot, ne laissant que sa respiration difficile se faire entendre. Puis, il opina mollement, avant d'entre-ouvrir ses lèvres violacées pour murmurer ;

« Alors vous serez fier de moi. »

Sous cet optimiste aussi étonnant qu'inopiné, Jacques ne put retenir un sourire, les yeux embués de larmes. Il se coucha alors de l'autre côté de son enfant, passant son bras au-dessus des corps de son aimée et de son fils pour les protéger dans un enlacement tendre.
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Re: [bghumain] Angueran Archibald.

Message par Ashern » dim. 27 février 2011 à 13h36

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Re: [bghumain] Angueran Archibald.

Message par Ashern » dim. 27 février 2011 à 13h37

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Re: [bghumain] Angueran Archibald.

Message par Ashern » mar. 1 mars 2011 à 19h36

II-I.
Le pauvre pion se déplaçait sur un échiquier qu'il ne connaissait pas, s'aventurant dans un jeu dont les règles demeuraient un mystère. Après tout, peut-être allait-il être un élément indispensable pour réaliser une manœuvre couronnée de succès, ou encore une simple chair à canon pour épargner les membres plus importants. Quoi qu'il en soit, le Roi l'avait prit sous son aile afin de l'attirer dans son camp, susurrant des paroles rassurantes à ses oreilles afin de l'apaiser. Après tout, il ne fallait pas réfléchir ; il avait une entière confiance en lui. La Reine, quant à elle, assurait parfaitement son rôle dans cette confiance tissée de mains expertes. Une grâce et une douceur à en faire pâlir les sirènes, et des mots toujours parfaitement choisis pour le faire se sentir différent. Dans son cœur, il ne savait que ce n'était le cas — mais qui aurait pu résister à de tels mots, dans cet encéphale d'ignorance ? Et les Tours... Ces Tours qui demeuraient fières et infaillibles, tels de héros des temps antiques se dressant victorieux au-dessus d'un mont ensoleillé. Leurs armures étincelantes illuminaient ses prunelles grisâtres, comme ravivant une lueur d'espoir qu'il avait perdu dans cette jeune vie tumultueuse. Leurs armes, fièrement dégainées, pointaient à l'horizon comme pour lui assurer un avenir meilleur. Mais peut-être que face à cette somptueuse scène, le pion oubliait qu'elles n'étaient au final que des statues de pierre ; construites de toutes pièces dans le but de protéger jusqu'à la mort.

Au final, ce pauvre pion était entré dans un jeu qu'il ne connaissait point, mais dont sa confiance aveugle lui avait murmurer dans ses rêves que cela lui permettrait de devenir un être exceptionnel. Mais dans la mort, tout est exceptionnel.

Le jeune homme demeurait seul dans cette grande pièce richement ornée, un grand verre de lait ainsi qu'une assiette contenant une part de brioche déposés devant lui. Les mains coincées entre ses jambes et les épaules rentrées, il contemplait avec timidité tout autour de lui, comme fasciné. Rarement il fut habitué à telle richesse, et ce simple fait le rendait terriblement mal à l'aise. Telle la mauvaise herbe au milieu d'un champ de roses, son cœur était serré par cette impression de salir ce somptueux tableau. Cela lui avait même coupé l'appétit.

Soudainement, une lueur attira son attention. Il leva rapidement les yeux, presque instinctivement, mais cela fut trop tard ; l'étrange projectile doré vint s'écraser mollement contre son front. La douleur parcourut son crâne tel un éclair, laissant tous les muscles se contracter. Alors qu'il apposait sa main sur la zone meurtrie, son regard se posa au sol afin d'observer la pièce d'or faire quelques tours d'elle-même avant de se mourir statique sur le plancher.

« Vous n'êtes pas un combattant, vous. »

Angueran leva alors son regard, surpris, afin d'apercevoir cette plantureuse sombre dans l'encadrement de la porte, une autre pièce bougeant avec dextérité entre ses doigts. Il ne sut dans les premiers instants si c'était la beauté de cette femme ou la surprise de sa présence qui faisait battre son cœur avec une telle intensité. Ce qui demeurait sûr, c'est que ses yeux vairons le glaçaient sur place.

« Hmff... Non, ma Dame. Le Chevalier Iann de Rune doit m'apprendre justement le combat. Répondit-il en se redressant, gêné.
— Pourquoi avoir quitté votre précédente voie ? »

Il demeura quelques instants en silence, fixant la sombre remettre la pièce dans sa bourse avant de s'adosser à la bibliothèque, avec un charme et une sensualité dignes de sa race. Il ne put s'empêcher de contempler sa peau ébène semblable à un velours de qualité, et ses formes dignes des statues de l'ancien temps. Comme un pauvre mortel faisant face à une déesse, son regard se détourna pour ne point lui porter préjudice.

« Parce que je désire faire de ma vie... quelque chose. Défendre celle-ci avec des valeurs pures... Vous savez, mes parents ont tout perdus lors de l'attaque d'Aden, alors j'ai osé demander à mon chevalier s'il pouvait m'inculquer ces valeurs en échange de mon aide en tant qu'écuyer. »

La voix instable du jeune homme à chevelure désorganisée se voulait être sûre et forte. Était-ce pour demeurer fier devant cette femme, ou pour se convaincre lui-même ? Lui-même ne connaissait la réponse, son esprit bien trop perturbé par sa timidité maladive qu'il ressentait dès qu'une personne notable s'adressait à lui. Il tenta néanmoins de relever son regard vers elle, comme pour appuyer ses dires et ses convictions. Mais un simple regard de la sombre lui fit comprendre que cela était peine perdue.

« Dans cette nature, chaque chose à sa place. C'est une sorte de grande échelle ; pour pouvoir s'y déplacer, il faut avoir de la volonté. Pensez-vous en avoir ?
— Oui. »

Une réponse immédiate prononcée d'une voix sûre. Il avait de la volonté, c'était une chose indéniable. Mais bien que ce trait de caractère était inscrit en lui au fer rouge, il fallait du courage et de la force pour la répandre. Et c'est de ces choses-là que le jeune paysan doutaient le plus.

Il posa à nouveau ses mains sur ses genoux, tel un élève discipliné. Fort heureux d'être assis pour cacher les haillons qu'il portait comme seuls habits, il demeurait droit et silencieux. Une mauvaise impression pouvait lui porter préjudice quant à cette chance que son tuteur lui offrait ; et il ne pouvait se permettre cela. Après une brève hésitation et une inspiration silencieuse, Angueran posa ses yeux grisâtres dans ceux de la femme qui lui décocha un sourire.

« J'espère pour vous. Car plus on grimpe, plus la chute est douloureuse si l'on se rate. »

Il accusait le coup, serrant son pantalon en tissus de ses mains moites sous la table. Iann de Rune lui avait dit de ne point douter de sa personne, qu'importe les risques qui pouvaient être pris. Mais malgré ce rappel pour lui donner la force de ne point vaciller, il se souvint très rapidement que les valeurs morales étaient bien plus faciles à énoncer qu'à respecter.

« Je me nomme Naga. Maître d'armes et marchande à mes heures perdues.
— Je m'appelle Angueran Archibald, ma Dame. C'est un honneur de vous rencontrer.
— Vous êtes bien le premier. »

Ils se regardèrent quelques instants dans les yeux, avant que le jeune homme repose son attention sur le verre de lait. Il plongea son regard dans la surface immaculée de celui-ci, tentant de rassembler ses idées afin de retrouver son calme. Face à une Tour, le Pion ne peut que s'incliner.

« Quelles sont vos valeurs, jeune Angueran ? » Reprit-elle avec amusement de sa voix suave.

Était-ce un simple échange emplit de bienséances, ou un test qu'elle réalisait pour tester ses aptitudes ? La réponse demeurait inconnu pour lui, mais la peur de l'erreur demeurait bien dans les deux cas. Il scuta les rainures du bois de la table, comme pour espérer trouver en celles-ci la réponse qui pourrait convenir à une telle guerrière. Ses doigts plissaient avec nervosité son pantalon, coinçant le tissus entre ses pouces et ses index. Plusieurs pensées martelaient son esprit, comme cherchant la bonne réponse dans ce tumulte. Puis, finalement, il ouvrit la bouche pour laisser échapper quelques mots, presque instinctivement :

« Le courage, la bravoure, le respect, et la justice.
— Des paroles bien agréables à entendre, mais la réalité risque de vous décevoir. »

Cette réponse eut l'effet d'un château de sable fièrement construit emporté par une vague. Etait-il véritablement dans l'erreur, ou s'amusait-elle à l'effrayer afin de le tester ? Il ne devait faillir. Il ne pouvait faillir.

Il accusa une nouvelle fois le coup, relevant son regard vers elle.

« La déception n'est là que pour rendre l'âme plus forte et valeureuse. Si aucune déception n'existait, rien ne serait à apprendre. »

Elle esquissa un sourire, avant de se retirer de la bibliothèque contre laquelle elle était appuyée jusqu'alors. Tel une danse parfaitement orchestrée, elle se mouvait avec grâce et fluidité, frôlant le bord de la table pour laisser ses doigts glisser sur sa surface. Oui, Angueran comprit alors. La partie d'échec venait de commencer, et il allait être nécessaire afin de faire un roque.

« A quoi sert une arme, jeune Angueran ?
— A blesser ou à répudier, ma Dame. » Dit-il d'une traite en l'observant déambuler, comme pour démontrer qu'aucun doute ne résidait dans son esprit.

Elle s'arrêta dans sa démarche pour se tourner vers lui, posant ses deux mains gantées sur la table. Il réussit à apercevoir un léger rictus d'amusement parcourir ses lèvres pulpeuses alors que ses yeux vairons transperçaient ses pupilles pour observer au plus profond de son âme.

« Non. »

La réponse tomba tel le couperet d'une guillotine. Le léger gloussement qu'il poussa lui fit d'ailleurs penser aux derniers sauts d'une tête roulant sur les pavés. Bien qu'il avait réussit jusqu'alors à demeurer dans des réponses justes ; le fait de se tromper lui brisa immédiatement toute défense. Et visiblement, apercevoir le jeune homme aussi déstabilisé fit douter Naga qui remettait en question la volonté dont il parlait précédemment. Néanmoins, elle ne sembla lui en porter vigueur, se contentant de le fixer avant d'offrir un sourire de bienséance.
Après tout, ce n'était qu'un Pion.

« Une arme sert à tuer. Ces objets ont été conçus pour cela. Et moi, Iann, vous... - enfin, je l'espère pour vous – allez devenir un artisan de la mort, même si cela vous paraît idiot. A partir du moment ou on décide de prendre une arme dans ses mains, on fait le vœu d'œuvrer pour plusieurs buts ; se défendre, protéger les innocents, éliminer des créatures... tous ces objectifs gravites autour d'un concept : la mort. Vous comprenez ? »

La tournure de la conversation commençait à l'effrayer de plus en plus. Cette simple notion terrible prononcée avec telle légèreté eut l'effet d'une claque pour le réveiller du monde acidulé dans lequel il reposait. Oui, il s'était engagé pour défendre le Bien et des valeurs pures. Mais oui, le sang allait couler, et la Mort allait faire parti de son quotidien. Il avait pendant bien longtemps voulu fermer ses yeux sur cette éventualité que ses parents lui avaient pourtant sous-entendus, mais maintenant, l'heure était au réveil. Et celui-ci était ô combien douloureux.

Il opina de la tête, ne sachant quoi répondre à cela. Mais visiblement, son teint livide se mêlant aux gouttes de sueur qu'il sentait glisser sur son visage devaient en dire bien assez long.

« La mort fait partie de l'ordre naturelle des choses. Il vous faudra la dompter pour ne pas en avoir peur, car la souffrance qui précède la mort fait peur aux gens. Je ne dis pas qu'il faut vous jeter dans un ravin pour la comprendre, non... mais bien de vous mettre dans la tête que c'est une grande responsabilité. Vous avez entre vos mains la possibilité d'ôter la vie ou d'en protéger. Une arme ne connait ni la lassitude, ni la haine. C'est son porteur qui décide de tout cela.
— Bien, ma Dame. »

Ils se regardèrent alors pendant un long moment, laissant le silence dominer les lieux avec élégance. Celui-ci virevoltait autour du jeune homme, serpentant autour de sa gorge pour lui couper le souffle, s'immisçant par son oreille pour geler son esprit.

La scène, pour quiconque, avait quelque chose d'aussi attendrissant qu'apeurant. Cet adolescent, assis sur sa chaise tel un enfant assidu, gardant la tête levée pour observer dans les yeux son interlocutrice. Et cette femme, les mains posées sur la table en face de lui, tête baissée pour le scruter, telle une professeur jubilant des ressentis de son élève. Oui, quelque chose était attendrissant et apeurant dans cette scène.

Le roque était formé, et le Pion demeurait au côté de la Tour.
Protéger le Roi. Qu'importe le prix.


[ > Clantage Vindicte Écarlate ]
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Re: [bghumain] Angueran Archibald.

Message par Ashern » mer. 2 mars 2011 à 17h26

II-II.
Les détonations retentissaient autour de lui, dans un bruit sourd à lui en faire exploser le cœur. Tout semblait se passer au ralenti devant son regard médusé, comme si l'horreur prenait un malin plaisir à montrer toute l'atrocité de ses actes. Un bref regard circulaire, et il comprit que l'espoir n'était qu'une notion inventée pour survivre. Il vit tous ces corps s'écrouler autour de lui dans des râles accompagnés de projections écarlates, rejoignant la terre souillée et meurtrie mollement. Ses visages déformés par la douleur et la rage semblaient tous le fixer, comme quémandant de l'aide pour ne point se faire happer par la Faucheuse. La magie fusa tout autour de lui, serpentant dans les airs sous forme élémentaire pour percuter les créatures abjectes qui ne cessaient de venir de part et d'autres, écrasant de leurs pattes acérées les dépouilles de leurs victimes.

« Angueran, attention ! »

Il se retourna rapidement vers la voix inconnue qui venait de l'interpeler, découvrant ainsi un de ces Ol Mahum foncer sur lui en poussant des hurlements, hache levée. Instinctivement, le jeune guerrier pivota sur le côté, évitant de justesse le terrible coup qui s'abattit au sol dans un nuage de poussières. L'adversaire arracha alors sa lame de l'herbe ensanglantée pour poser son regard ingurgité de sang sur lui, visiblement peu décidé à abandonner face à cette proie facile. Angueran comprit alors que le combat allait être inévitable ; et que le prix de la victoire allait être sa survie ou la mort. Ses gants resserrèrent la garde de sa lance, laissant un léger crissement retentir. Autour de lui, plus rien n'existait. Plus le moindre combat, ni même le moindre son. Il n'avait à présent plus que lui, et cette abominable créature sanguinaire. Celle-ci ne tarda point à repartir à la charge, poussant un nouveau cri en fonçant sur le lancier. Hâtivement, le jeune homme courra à son tour dans sa direction, avant de planter son arme dans le sol afin de s'en servir comme appui pour s'élever en l'air. D'un bond agile, il passa au-dessus de son adversaire, assénant par la même occasion un coup de pied rapide dans son dos. Celui-ci manqua de s'écrouler au sol, titubant quelque peu avant de poser une patte au sol pour demeurer debout. Il savait néanmoins que son agilité l'avait certes sauvée d'une attaque qui aurait pu s'avérer fatale, mais que la force de l'Ol Mahum était bien supérieure à la sienne. Agir avec réflexion, et taper avec minutie.

Il n'eut le temps de reprendre son souffle que l'opposant effectua une botte, frappant plusieurs fois devant lui en forme de croix tout en avançant d'un pas sauté à chaque mouvement. Angueran para le premier coup d'un coup latéral de sa lance, avant de la plaquer à l'horizontal afin de bloquer la lame qui rebondit dans un bruit sourd sur le métal. Néanmoins, bien que son coups arrêté, l'adversaire en profita pour lui asséner un coup de pied dans le ventre qui projeta l'humain au sol en lui coupant le souffle. Il sentit son corps s'écraser lourdement sur un cadavre, avant de rouler dans l'herbe ensanglantée comme un vulgaire caillou lancé au loin. Dans un soupire saccadé par la douleur, celui-ci releva la tête pour observer le visage horrifié d'un soldat mort à quelques centimètres de lui, le fixant. Cet homme n'était guère plus âgé que lui, et pourtant fut abattu comme un vulgaire bétail par une hache plantée au sommet de son crâne. Celle-ci, presque fièrement, domptait ce corps sans vie pour laisser ce nappage écarlate recouvrir son visage souillé par la terre et les hématomes. Ainsi était toute la beauté de la guerre.

Une lourde botte de fer écrasant la boite crânienne de cette pauvre dépouille sortit Angueran de sa « contemplation », lui arrachant un cri d'horreur.

« Petit homme sent la peur. »

Il leva son regard le long de la jambe plantée devant lui, arrivant jusqu'au visage de son adversaire qui le regardait avec une expression d'envie et d'amusement. Un sentiment d'effroi parcourut toute l'échine du jeune combattant alors que ses doigts s'enfonçaient avec rage dans la terre retournée.

« Petit homme sent la peur. » Répéta l'Ol Mahum doucement, comme une mélopée amusante.

Comme pris d'une colère sanguinaire, Angueran attrapa sa lance au sol pour la planter d'un coup sec dans la cuisse. Le sang de la blessure gicla en même temps que l'hurlement de la bête, se répandant le long de sa jambe dans une cascade morbide. Profitant de ce moment opportun, le jeune homme déposa un pied au sol avant de se redresser brusquement en assénant un coup de son poing de fer dans la mâchoire de l'Ol Mahum. Deux crocs éclatèrent d'entre ses lèvres, volant dans une gerbe de sang qui recouvrit le visage du lancier. Titubant quelques pas en arrière, la pauvre créature n'eut le temps de voir arriver l'arme à toute vitesse dans sa direction.

Sa tête s'écroula sans un bruit dans l'herbe, roulant sur plusieurs mètres avant de s'arrêter contre le cadavre d'un de ses frères.

« Ça va ?! »

Angueran ne parvint à détacher son regard du corps décapité devant lui, les yeux perdus dans le vide, avant de se décrocher de cette scène par cet hurlement. La guerre reprit alors autour de lui, comme réalisant à nouveau l'horreur dans laquelle il demeurait. Il vit enfin son tuteur, Iann de Rune, répéter sa question en le fixant, ses lames dégoulinantes de sang.

« Je... Oui, ça va.
— C'était moins une, à ce que je vois. »

Enfin à sa hauteur, le jeune homme suivit le regard de son maître afin d'observer à nouveau la carcasse de l'Ol Mahum qu'il venait de tuer. Pour l'un, le silence qui naquit était pour reprendre son souffle. Pour l'autre, c'était l'abomination qui enrayait sa voix. Ils se regardèrent alors à nouveau, sans un mot, avant que Iann déposa sa main gantée sur l'épaule de son élève.

« Il ne faut pas que tu- …
— Ça va. » Le coupa-t-il, en détournant son regard.

L'homme à le chevelure de blé demeurant quelques brefs instants statique, avant d'acquiescer. Dans un mouvement fluide, il retira sa main d'Angueran pour reprendre sa lame plantée au sol et se détourner pour repartir au combat. Celui-ci le regarda quelques instants pantois, comme voyant au sein de ses prunelles grisâtres une scène digne des romans qu'il lisait plus jeune. Cet homme fort et fier fonçant dans les rangs adverses, avec un ralenti artistique, pourfendant ses ennemis par une danse somptueuse dans des gerbes de sang. Oui, quelque chose demeurait de beau dans cette horreur. Et de penser cela, le jeune homme en eut une nausée.

Il posa les mains sur ses genoux, crachant sa bille dans les entrailles d'un ennemi éventré. Et cette vision devant ses prunelles n'arrêta point le fait de dégobiller, encore et encore. Toute l'atrocité de cette guerre lui tordait les entrailles pour frapper avec violence son cœur ; et ce vomi semblait être le rejet de cet abject. Un mouvement du revers de sa main sur ses lèvres et ses yeux clos permirent de camoufler les preuves, et donner l'apparence d'une quasi normalité — même si le mot « normalité » pouvait apparaître telle une insulte dans cette bataille sanguinaire.

Soudainement, une détonation gigantesque à en faire trembler le sol retentit, accompagnée de hurlements et de bruits de fer s'entre-choquant. Il se détourna pour faire face à cet étrange explosion, avant que son visage se torde d'effroi. Devant lui se dressait une immense créature d'une hauteur presque aussi conséquente que le château, aux muscles saillants. Tel un véritable Titan à la force divine, celui-ci venait de briser les remparts avec une aisance déconcertante, laissant bien des guerriers et Ol Mahum périrent sous les chutes de pierre. Possédant une robe drue tel un étalon et une crinière orangée entourant toute sa gueule, la Bête semblait être un croisement entre un équidé et un félin. Cette supposition aurait pu être justifiée si deux immenses cornes n'encadraient ses crocs acérés, et que ses jambes possédaient une musculature digne d'un immense taureau ; rappelant un Minotaure de l'Époque Antique.

« Par les Esprits, qu'est-ce que... »

Angueran tourna son regard sur le guerrier inconnu qui était à ses côtés, dont son visage tout aussi horrifié le trahissait. Il remarqua alors que l'épée et le bouclier tremblotaient dans ses mains, et qu'une blessure conséquente gisait à son épaule. Il voulut lui répondre, mais il n'eut le temps. Cet homme fonça sur l'ennemi en brandissant son arme en l'air, poussant un cri rauque pour se donner le courage. Le jeune homme le regarda faire, la bouche entre-ouverte de désarroi. Il l'admirait sauter au-dessus des corps, pourfendant les Ol Mahum osant se dresser entre lui et la Bête. Et ce cri... Ce cri qui semblait résonner à travers toutes les terres. Enfin, la distance fut bravée. Le guerrier inconnu planta son épée avec rage dans la jambe de l'immense Titan qui n'eut comme seul réflexe quant à ce coup de baisser la tête. D'un geste rapide et puissant, elle donna un coup de sa patte dans l'homme qui ne put l'éviter, envoyant son corps à plusieurs dizaines de mètres pour s'écraser lourdement dans l'herbe sans vie. Un soubresaut de surprise frappa le cœur d'Angueran devant cette terrible scène, suivant du regard le heaume du mort rebondir au sol.

Il sentit la rage l'envahir, tel un poison létal s'insinuant dans les moindres parcelles de son corps et de son esprit. Sa vision se troubla, laissant ce champ de bataille l'entourant ne devenir qu'une flaque opaque embuée. Les bruits de fer se croisant et de hurlements retentirent dans son esprit comme des supplices de damnés implorant son aide. Puis, les images du Maréchal Di Lamia et ses troupes attaquant Giran lui revint. Ce château devint le Temple, ces Ol Mahums des Légionnaires, ces guerriers de pauvres habitants. Et cette Bête n'était autre que le Maréchal. Il revit le feu lécher les parois des murs, et ce sang couler sur les pavés comme une pluie amère. Ces corps sans ville peupler le sol, et ces armes auparavant étincelantes être souillées. Oui, pour le jeune Angueran Archibald, une toute autre guerre se dessinait devant lui. Une guerre où il ne fut que spectateur, et qui hantait depuis chaque jour ses nuits. Cette guerre qui plongea sa famille et lui dans la pauvreté et la mendicité. Oui, cette guerre qui se déroulait devant lui n'était plus celle-ci, mais celle de Giran. Et il était prêt à tout pour laver sa culpabilité.

D'un geste habile, il fit tournoyer sa lance avant de prendre appui dans la terre pour entamer une course à vive allure. Le vent fouettait son visage endolori, amplifiant sa force et son courage comme les voiles d'un navire. Ses déplacements étaient rapides, précis, et sans bavure ; sautant de cadavre en cadavre tel un félin. Un soldat de Di Lamia s'immisça sur son chemin, évitant une flèche d'un des Giranais. L'arme du jeune homme pourfendit l'air, s'empalant avec violence dans le dos du Légionnaire pour le transpercer. D'un saut, il brava la distance les séparant pour réceptionner son corps afin de lui briser la nuque d'un mouvement sec. La dépouille rejoignit les pavés de la ville en glissant le long de la lame. Hâtivement, Angueran reprit sa course, faisant tournoyer sa lance ensanglantée devant lui pour repousser deux nouveaux assauts et trancher la carotide d'un troisième impétueux. Le Maréchal n'était plus qu'à quelques mètres.

« Angueran, non ! »

Un hurlement au loin. Mais il ne s'en soucia point. Il continua sa course effrénée afin de parvenir à la hauteur de l'homme, où il tenta d'abattre sa lance. Celle-ci rebondit mollement contre son armure, attisant l'intérêt du Maréchal qui semblait bien décider de se débarrasser de ce parasite. Celui-ci tenta d'asséner un coup de son sabre au jeune guerrier qui évita de justesse par un pas sauté. La lame tapa les pavés dans un bruit sourd, provoquant un tremblement assourdissant. Angueran ne se laissa néanmoins point déstabiliser. D'un geste rapide, il passa sa lance derrière sa nuque, la tenant fermement de chaque côté de son visage par ses mains gantées, avant de tournoyer sur lui-même en direction de son adversaire. L'arme frappa dans son mouvement à plusieurs reprises l'épaule, la lacérant en une plaie large et précise. Le Maréchal recula de quelques pas sous la blessure, posant son attention sur le sang s'écoulant le long de son brassard. Il reporta son attention sur son opposant avant de se saisir d'un geste vif de celui-ci par l'armure avant de le soulever en l'air. Le jeune homme tenta de se débattre en assénant plusieurs coups de pied dans son thorax, mais cela fut vain. La poigne était si forte qu'il sentit son armure se plier lentement pour atteindre son corps. Le fer pénétrait dans sa peau en même temps qu'il lâcha un hurlement de douleur. Tout semblait perdu, quand un pic de glace frappa soudainement le visage du Maréchal pour lui entailler grossièrement la joue. Profitant de cette porte de sortie, le lancier posa ses deux bottes sur l'épaule de son adversaire afin de se projeter en arrière hors de son emprise dans un saut périlleux. Il atterrit au sol dans un nouvel hurlement en pliant genou au sol, la douleur vive de ses côtes le parcourant tel un éclair. Mais il ne devait abandonner. Il ne pouvait abandonner...

Alors que l'auto-proclamé souverain d'Aden reprenait ses esprits, le guerrier reprit sa lance en serrant des dents pour cadenasser sa douleur. Non, Giran ne tomberait pas aujourd'hui. Quitte à ce qu'il en paye le prix de sa propre vie. D'un geste lent, presque titubant, il se releva pour faire face à cet homme qui avait provoqué cette guerre et tous ces morts. Ils se regardèrent longuement, sans le moindre mots, leurs respirations comme seules paroles. Puis, dans un cri qui résonna à l'unisson, ils foncèrent l'un sur l'autre en entre-choquant leurs armes, parant et attaquant l'adversaire avec vitesse dans une pluie d'étincelles. Angueran évita de justesse un coup d'épée horizontal qui effleura son armure sur toute la longueur par un saut en arrière. Il murmura alors à voix basse quelques mots avant d'abattre le bout de sa lance devant lui, créant une langue de feu de plusieurs mètres qui brava la distance jusqu'à son opposant pour le frapper. Sous la pluie de flammèches et de poussières, le Maréchal sauta à nouveau sur lui dans son armure noircie par les flammes afin de porter un coup qui se voulait fatal. Le jeune homme, déstabilisé par le sort qu'il venait de réaliser, vit le sabre de son adversaire étinceler sous un rayon du soleil, telle la faux de la Mort venant le chercher. D'un geste presque désespéré, il brandit sa lance en avant tout en fermant les yeux.

Un silence.

Ses prunelles grisâtres s'ouvrirent à nouveau sous la lueur aveuglante de la journée, faisant face au corps de la Bête morte plantée au bout de son arme. Le retour à la réalité fut brutal. Non, ces guerriers se battant à ses côtés n'étaient des citoyens de Giran ; et ces Légionnaires n'étaient autre que les Ol Mahum. Et le Maréchal... Il regarda à nouveau l'immense Bête empalée avant de relâcher sa lance, laissant sa dépouille s'écrouler au sol dans un tremblement sourd.
Giran était détruite. Et tout cela n'était qu'illusions.

Il vit alors des gens hurler autour de lui alors que les derniers Ol Mahum s'enfuyaient. Mais il n'entendait rien, ne voyant que ces cadavres et ses visages couverts de sang où s'affichait un masque de joie. Ils étaient victorieux, oui. Mais dans son cœur, cela était une défaite. Des personnes retirèrent leurs armes de la Bête en ce qui semblaient des cris de bonheur, alors que d'autres se précipitèrent sur lui pour lui parler. Pourquoi le regardaient-ils tous, et l'acclamaient tel un héros ? Tout se mélangeait dans l'esprit d'Angueran alors que des mains solidaires se posaient sur ses cheveux et ses épaules. Des rires, des félicitations. Il sentait son cœur battre contre ses tempes, comme l'implorant de briser son crâne pour le faire sortir. Il ferma alors ses yeux, plongeant dans la profondeur noirâtre de son esprit.

Quant un doux murmure parvint à son oreille.

« Vous êtes un être exceptionnel, sire Angueran Archibald. Jamais je ne vous oublierai... »

Il ouvrit les yeux.
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Re: [bghumain] Angueran Archibald.

Message par Ashern » lun. 14 mars 2011 à 17h04

II-III.
( . )
La main du jeune homme glissa sur la peau de la sylvaine avec une tendresse dépassant l'entendement, tel un sculpteur finalisant l'œuvre d'une vie sans oser l'amocher. Un contact quasi invisible, ne laissant que le bout de ses doigts caresser la peau de porcelaine pour remonter jusqu'aux cuisses. Emmitouflés dans cette danse de draps immaculés, tous juste éclairés par un rayon de lune bravant leur intimité, leur amour était en train de se sceller. Elle passa ses bras autour de son cou, comme une âme s'accrochant à une raison de vivre. Une étreinte qui ne voulait jamais se briser, éternelle et puissante. Leurs regards étaient plongés l'un dans l'autre, comme tout deux fascinés par le spectacle qui s'offrait à leurs yeux. Ce regard si intense qui sembla durer des heures, où seule la respiration haletante s'unissait pour ne former qu'une entité rappelant la vie.

Il brisa alors le contact, allant loger son visage dans le creux de son cou pour déposer un baiser, avant de remonter avec une lenteur sadique jusqu'au sommet de celui-ci. La lèvre inférieure de l'homme frôlait ce fin épiderme semblant si fragile, laissant un râle s'échapper des fines lèvres vermeilles. Un lobe mordillé, une main serrant plus fermement le cou pour approuver la sensation. Les mains ne demeuraient qu'outil de cette tendresse exaltée, où le simple plaisir de la chair semblait être totalement disparu. Ils n'unissaient leurs corps, mais leurs âmes.

Elle le rappela alors à lui, se cambrant légèrement pour monter jusqu'à ses lèvres afin d'y déposer un baiser. Sa main rugueuse passa alors dans ses cheveux, l'empoignant avec délicatesse pour témoigner de la force de cet amour. Leurs bouches ne semblaient vouloir se desceller, emprisonnées dans une faille du temps qui demeurait intemporel. L'humidité de leurs êtres se liait à chaque frottement, laissant cette fine particule de sueur perler comme la rosée d'un champ de roses. Les ongles de la sylvaine parcoururent alors l'échine de l'homme, inscrivant dans l'éphémère la marque de son passage pour finalement trouver refuge à sa taille. Collés l'un à l'autre, sa poitrine collée contre son torse, les tatouages de son corps s'apposaient sur ses cicatrices tel un baume. Unis, ils l'étaient et le demeureraient.

La lune se voila alors discrètement derrière un nuage, alors que leurs corps se scellaient définitivement dans un encéphale d'émotions. La guerre faisait rage, des gens périssaient dans des cris d'agonie, et la veuve pleurait le disparu ; mais tout cela n'existait plus dans cette chambre.
Le goût de la paix était délectable.

[ image externe ]


Vous luisez ensemble, et ensemble vous serez toujours.
Vous serez ensemble quand les blanches ailes de la mort disperseront vos jours.
Oui, vous serez ensemble, même dans la silencieuse mémoire d’Einhasad.
Mais laissez l’espace entrer au sein de votre union.
Et que les vents du ciel dansent entre vous.
Aimez-vous l’un l’autre, mais ne faites pas de l’amour une chaîne.
Laissez-le plutôt être une mer, dansant entre les rivages de vos âmes.
Chantez et dansez ensemble et soyez heureux, mais laissez chacun d’entre vous être seul.
De même que les cordes du luth sont seules pendant qu’elles vibrent de la même harmonie.
Donnez vos cœur, mais pas à la garde l’un de l’autre.
Car seule la main de douce Eva peut contenir vos cœurs.
Et tenez-vous ensemble. Mais pas trop proche non-plus :
Car les piliers d’un temple se tiennent à distance,
Et le chêne et le cyprès ne croissent pas à l’ombre l’un de l’autre.

Eva, Einhasad, Maphr, créateurs et protecteurs de la nature,
Regardez avec bonté ces deux nouveaux époux, et daignez répandre sur eux vos bénédictions.
Qu’ils soient unis dans un même amour,
Et avancent vers une même sainteté, toujours.
Qu’ils soient protégés par votre lumière, qu’ils méritent,
Et resplendissent de vos saints rayons, qui crépitent.
Qu’ils soient reconnus pour les joies de leur vie,
Et que chaque moment témoigne de leur espérance épanouie.

Que les plus rares fleurs écloses pour eux sous les cieux les plus beaux.
Que dans leur cœur s’enflamment toujours de vastes flambeaux.
Qu’à jamais, leurs esprits soient jumeaux.

Qu’ils y parviennent enfin,
Avec tous ceux qui les ont précédés,
Dans votre demeure, Mère, où l’amour ne finira jamais.

Que leurs âmes, incendies,
Éclair brûlant de voluptés,
S’élancent, rapides, hardies,
Vers les vastes cieux enchantés.


Lune, eau sonore, nuit bénie,
Ainsi qu’arbres : Frissonnez autour,
Votre pure mélancolie
Est le miroir de leur amour.


Vos cœurs, comme des hirondelles, volèteront tout joyeux,
Et planeront librement à l’entour des cordages.
Votre navire voguera sous un ciel sans nuages,
Comme un ange enivré d’un soleil radieux.

Il la regardait, courir dans ce champ, les cheveux flottant dans les airs telles les vagues d'une mer paisible, et sa robe légère aux teintes immaculées arborer les mêmes lignes. Cette scène se gravait dans son regard dans un ralenti artistique, admirant ses jambes dénudées être caressées par quelques fleurs tentant de l'atteindre. La beauté de ces pétales écarlates frôlant sa peau de porcelaine avait quelque chose de poétique, comme un habile jeu de couleur réalisé par les plus grands artistes. Oui, tout respirait la splendeur et la légèreté chez cette femme à qui il était prêt à sacrifier toute sa vie et ses pensées. Et son rire... Son rire étincelant résonnant dans la plaine, en le fixant de ses prunelles bleutés respirant la tendresse. La voir si heureuse lui donna envie de pleurer. Lui, cet homme venu de rien, qui la contemplait dans sa fine chemise de toile beige et un pantalon de la même matière brunie, un livre posé à ses côtés. Il ne pouvait détacher son regard de cette fée se déplaçant telle une danseuse, tournoyant encore et encore avec le vent dans un ballet enchanteur. Puis, finalement, elle revint vers lui en terminant son spectacle, se laissant tomber entre ses jambes pour le fixer, ses bras appuyés sur ses genoux, la respiration encore saccadée par sa folie et un rire à demi-caché. Il ne put retenir un léger rire en la voyant ainsi, arborer ce sourire chaleureux et ce regard couveur. D'un geste tendre, il remit une mèche derrière son oreille alors qu'elle fermait les yeux sur la vie pour profiter de la douceur du contact. Elle se laissa tomber lentement contre lui, posant sa tête sur son torse partiellement dénudé par l'ouverture béante de la chemise, afin de trouver le repos.

Alors qu'il passait ses bras autour d'elle, il contempla l'horizon se dessiner au loin. Cefedellen apparaissait en ombrages au loin de la plaine, caché partiellement par quelques arbres centenaires laissant éclater leur magnificence par un panache verdâtre inédit. Une légère brise vint les effleurer, laissant les fleurs danser dans un même mouvement sous ce nouveau pas qui leur était demandé. Ici, ils n'étaient plus ce Commandant ou cette Soigneuse. Ici, ils n'étaient plus des défenseurs de la liberté, et des combattants de l'assujettissement. Ici, ils n'étaient plus un mortel ou une sylvaine. Ici, ils n'étaient plus. Juste deux âmes amoureuses portées par les alizés, et soufflés aux quatre coins dont leurs sentiments pouvaient les envoyer.

« Je t'aime, ma douce. » Laissa-t-il échapper en caressant ses longs cheveux blonds, alors qu'elle se lovait contre lui telle une enfant.

C'est à ce jour qu'il comprit qu'au final, il ne combattait plus pour ses valeurs. Mais seulement pour elle, afin de lui offrir le meilleur monde possible. Telle une poupée de chair et de sang, il accomplissait les moindres mouvements de cette femme qu'il vénérait bien plus que quelconque dieu, laissant son destin être guidé par ses caresses et ses mélopées. Peu à peu, il en oubliait son ethnie ou son enveloppe, quittant les bras réchauffants d'Einhasad pour embrasser les lèvres curatives d'Eva. Qu'importe les titres, au final ; il n'était qu'Angueran Archibald, mari de Laën Archibald.

Et cela lui suffisait amplement.
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Re: [bghumain] Angueran Archibald.

Message par Ashern » lun. 27 juin 2011 à 17h58

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Re: [bghumain] Angueran Archibald.

Message par Ashern » lun. 27 juin 2011 à 17h58

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Re: [bghumain] Angueran Archibald.

Message par Ashern » mar. 28 juin 2011 à 12h33

III-II.


Le spectacle battait son plein, laissant les rires des plus jeunes retentir en échos avec les applaudissements des ainés. La liesse semblait être dans l'atmosphère, encourageant quiconque à s'abandonner dans ses bras pour savourer cet instant de délice, tel un fil d'Ariane s'immisçant d'esprit en esprit. Les éclats de voix résonnaient dans la salle du trône, emmitouflant la foule déjà nombreuse dans une ambiance lourde et pesante. Les rires sonnaient comme le requiem du Malin alors que les applaudissements ne semblaient être que des tambours de guerre.

« Approche, petit mécréant ! Nul ne peut effrayer le Petit Prince ! »

Les enfants ne purent retenir une nouvelle esclaffe, alors que les parents se surprirent à sourire. Les monarques, quant à eux, fixaient le spectacle de marionnettes avec un sourire cloué sur une visage aussi expressif qu'un mur. Leurs pupilles suivaient le mouvement des deux pantins de bois qui se battaient, alors que leurs oreilles frémirent sous chaque mot — que cela soit prononcé par le marionnettiste que la foule elle-même. Le cœur n'était à la fête ; très certainement perdu dans le Labyrinthe de Minos que formait à présent leurs esprits embués.

Le seigneur tourna alors son regard vers la foule, regardant tous ces gens aux visages bouffis se repaître du spectacle dans leurs habits de grande manufacture, un verre de fin toujours au creux de leurs paumes. Deux spectacles étaient en train de se passer devant ses yeux, avec la même froideur et goût de souffre. Deux tristes scènes d'un monde en détresse où l'abondance ne faisait que donner du relief à des personnages burlesques. Il se sentait tel un mouton perdu dans une meute de loups voraces, aux gueules déformées par la rage, la peur et l'avidité. La noblesse semblait danser autour de lui en chantant des odes funèbres, laissant le jus du raisin manger avidement couler de leurs lèvres comme le sang d'un condamné. Leurs rires frappaient son esprit, comme si ceux-ci lui étaient destinés dans un amas de moqueries et de boutades de mauvais genre. La spirale des rires, des applaudissements et des bruits de verre s'entre-choquant l'emporta rapidement, lui laissant transparaître une vision où tout semblait tourner autour de lui. Etait-il le centre de gravité de ce spectacle à la scène de linceul, ou n'était-il qu'un vecteur ?

Alors qu'il se sentit tressaillir, une main délicate le ramena à la raison.

La respiration haletante, le seigneur ramena son regard à son sauveur. Celui-ci apparaissait sous les traits gracieux d'un être angélique qui avait prit comme enveloppe charnelle celle d'une sylvaine. Les yeux délavés de la jeune femme ne le fixaient point cependant, concentrés sur un point fixe entre les deux marionnettes comme pour laisser l'illusion d'un quelconque intérêt. Néanmoins, il savait qu'elle avait perçu son mal et que ce geste anodin était pour le calmer. Conscient de cela, il ferma quelques instants les yeux pour parvenir à faire abstraction du bruit et chasser ces images qui hantaient son esprit.

« Moi, Grand Roi Angueran Archibald Ier, ne peut que rire de ta médiocrité, Petit Prince ! »

L'énonciation de son nom le sortit prématurément de ses songes, laissant ses prunelles grisâtres se poser à nouveau sur le spectacle principal avec mollesse. Les deux marionnettes se faisaient face ; l'une, noble et fière, sensée le représenter, et une habillée de haillons et au visage grotesque, à l'effigie du Prince de Goddard. La pièce se voulait amusante — mais le spectateur que celle-ci devait divertir semblait trouver cela de bien mauvais goût.

Son épouse, quant à elle, demeurait droite et noble dans sa grande robe immaculée. Son âme était déjà celle d'une grande impératrice ; et cette couronne ne semblait être là que pour officialiser cela aux yeux des mortels. Une main pieusement posée sur sa cuisse gauche, l'autre couvait toujours celle de son époux par une caresse tendre et invisible. Les cheveux finement tressés par des servantes, elle arborait une tiare somptueuse qui faisait tenir ses anglaises vertigineuses semblables à des cascades d'or. Elle demeurait, dans la salle richement ornée, le plus beau joyau.

« Prends ça, vil garnement ! »

Son attention fut à nouveau coupée par le cri du marionnettiste. Sur la scène, le combat entre les pantins de bois était à présent terminé, laissant le spectacle grotesque de sa personne donnée la fessée au Prince de Goddard comme pour punir un enfant, sous les rires et les applaudissements de l'assemblée. Les regards se tournèrent alors tous vers lui ; laissant ces centaines de pairs de yeux le fixer comme pour jauger sa réaction. Un frisson parcourut l'échine du seigneur. Mollement, il applaudit, affichant un sourire formel dont il avait grandement l'habitude d'offrir. Son audimat fut alors séduit, redoublant leurs clappements entre leurs mains moites dans des rires gras.

Les bonnes gens reprirent alors le rythme effréné de la délectation de la luxure, serrant de leurs doigts boursoufflés des cuisses de poulet pour en arracher la peau de leurs crocs acérés, alors que leurs lèvres aspiraient abondamment le nectar écarlate des verres qui ne cessaient de tinter. Le seigneur préféra détourner le regard de ce nouvel acte se jouant devant lui, pour ne point se perdre à nouveau dans un tourment de pensée où la réalité était altérée par des visions effrayantes.

« Honorables majestés, le spectacle vous a-t-il plu ? »

Il remarqua alors le marionnettiste devant lui, se tenant le dos légèrement courbé. De longs cheveux grisâtres tombaient sur ses épaules, raides et mal coiffés, alors que sa peau semblait s'apparenter à un désert n'ayant connu le plaisir de la pluie depuis des années. Vêtu d'une longue robe d'un bleu roi réalisé dans un tissu médiocre, il semblait vouloir cacher sa pauvreté sous des parures et ornements ne faisant qu'amplifier son côté grotesque. Son attitude générale le faisait confondre avec un vieil illuminé venant offrir sombres présages, mais son regard d'un bleu clair parvenait à rassurer quiconque le fixait en lui conférant une part d'humanité.

« Oui, marionnettiste. Bien que parfois déplacé, cela n'en demeurait que cocasse. 
— Veuillez pardonner si j'ai froissé ces grandeurs ; cela n'était le but recherché. »

Le monarque regardait l'échange entre sa femme et l'homme, admirant le contraste entre la grâce et la médiocrité. Mais étrangement, il n'eut que pitié pour cet homme — lui qui tentait que de paraître présentable à leurs yeux, préférant enfouir tout ce qu'il était. Fort malheureusement, la peinture qu'il dessinait de lui n'était que peu présentable, et sombrait dans le ridicule. Il sortit de sa « contemplation » par le regard clair de l'homme qui le ramena à la réalité. Ce dernier, les membres tremblants par la vieillesse, semblait attendre son avis quant au spectacle. Le seigneur déglutit discrètement, avant de simplement opiner de la tête — aucun mot ne voulant sortir de sa gorge serrée par une main invisible depuis bien des minutes. Cela sembla suffire au marionnettiste qui opina à son tour avec un sourire avant de se détourner, arc bouté et pas boitillants.

Profitant de cet instant où les regards semblaient enfin détourner, son épouse prit la parole.

« Tout va bien, Angueran. »

Il rapporta son regard à cette dernière, plongeant son être dans ses prunelles, se perdant dans les pourtours de ses iris. Elle offrit alors un sourire rassurant, étirant légèrement en coin la teinte écarlate de ces dernières. Il reconnu une émotion sincère dans cette pièce de faux-semblants, et cela agit alors tel un baume sur son cœur. Un acquiescement de tête accompagné d'un sourire, alors que ses doigts puissants serraient la main délicate de son épouse toujours logée dans son écrin. Elle approuva la caresse par un discret mouvement de doigt venant effleurer la paume de ce dernier — banal geste emplit de tendresse et de douceur. Le monarque reprit sa respiration, laissant son torse musclé transparaissant sous sa chemise de toile finement tissé et orné se surélever légèrement, avant de ramener son regard à la foule. Emplit d'un courage nouveau, il se redressa alors, accompagnant dans son geste la main de son épouse qui se leva à son tour dans une cascade de tissus immaculé s'écrasant au sol le long de ses jambes. L'assemblée se tut alors lentement, alors que les regards vinrent tous sur le couple royal. Bien que fortement déstabilisé, il garda le courage au creux de ses entrailles et leva son verre en l'air, avec un visage faussement joyeux. Il sentit alors l'attention de son épouse posée sur lui, mêlant la peine et l'admiration. Alors qu'il désira capter son regard, celle-ci s'en détourna pour lever son verre à son tour.

« Longue vie aux monarques ! Longue vie à Aden ! »

L'assemblée avait scander ces quelques mots d'une voix unie et puissante.
Après un silence long et puissant, les lèvres du seigneur s'ouvrir enfin.

« Longue vie à Aden. »
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Re: [bghumain] Angueran Archibald.

Message par Ashern » mar. 5 juillet 2011 à 02h37

III.III
( . )
Le combat se passait sous ses yeux dans un ralenti presque sadique. Les épées s'entre-choquaient dans des tintements sourds et sinistres, avant de pourfendre les cuirasses pour laisser échapper un ultime râle dans une gerbe de sang écarlate. Les centaines d'âmes devant ses yeux luttaient pour leurs propres convictions, offrant leurs pauvres carcasses au Gardien du Monde d'En-Dessous pour assurer un avenir meilleur à leurs prochains. Il vit ses pères, frères ou amis se détruire au bout d'un métal sanguinolent pour rejoindre les bras tendres d'Ether, le regard tourné vers le ciel.
Une puissante détonation l'arracha de sa contemplation, laissant sa fidèle monture se cambrer alors qu'il en demeurait aveugler. En ouvrant les yeux, il vit alors le Baron Bashère et l'ancienne Souveraine d'Aden mêler leurs arcanes, offrant une déferlante de magie s'abattre tel un cataclysme sur les rangs ennemis dans une explosion. En voyant tous ses corps s'envoler sous les ondes de mana, l'armure calcinée et les membres gelés, il en eut la respiration coupée — même si ces personnes étaient dans les rangs ennemis, ils n'en demeuraient des personnes dont une famille les attendait quelque part.

Alors que son fidèle équidé laissa ses sabots retomber au sol pour marteler l'herbe ensanglantée, un visage ô combien connu attira son regard dans cette bataille sanguinaire et violente. Son épouse, agenouillée à côté d'un homme dans sa robe immaculée, en train de laisser sa magie blanche couvrir son corps comme un châle. Elle tentait de soigner les plus graves blessés, le regard effrayé par cette guerre, le sang d'autres parsemant son visage. Mais elle en oubliait sa propre protection, et l'homme le remarqua bien vite en voyant une silhouette à la marche féline s'approcher dans une tempête de vent. La Malla.

Guidé par la peur, il tira de ses mains gantés les sangles de son cheval en lui donnant une tape de ses bottes de fer dans son flan, déclenchant un brusque et puissant galop dans la direction de l'arcaniste. La monture brava les corps au sol en les sautant dans des bonds agiles et précis, alors que la lance du seigneur fauchait dans son sillage des âmes trop audacieuses s'attaquant à lui. Alors que la magicienne approchait dangereusement de son épouse, il ordonna un ultime saut à sa monture à la robe blanchâtre, dans un hurlement rauque, lance dressée. Mais alors qu'il demeurait quelques centimètres au-dessus du sol, celui-ci vit une flèche foncer dans sa direction avec une précision mortelle. Il n'eut juste le temps de dévier un peu que cette dernière se logea dans son épaule dans une gerbe de sang, le projetant de la selle pour s'écraser lourdement au sol. Il en demeura sonné.

« N'abandonne point. Pour elle. »

Alors que cette voix provenant de son propre esprit résonnait au creux de ses oreilles, l'homme eut la force d'ouvrir les yeux pour observer un ciel à la teinte opaque. Il devait se battre, pour elle, pour eux, et pour Aden. Sa main se cramponna à sa fidèle lance encore logée dans sa main, se redressant dans un hurlement pour porter un coup à un adversaire qui courait devant lui, le fauchant dans sa course pour le faire s'écraser quelques mètres plus loin. D'un geste brusque, il arracha la flèche plantée dans son épaule pour la loger d'un coup violent dans la tête d'un nouveau garde fonçant sur lui. Alors que le cadavre sombra à ses pieds dans un bruit sinistre, il perçut la silhouette de la Malla lui faire face, avec un sourire d'arrogance. Ils se faisaient face, et savaient tout deux que cela n'était plus une guerre ; mais un duel. Elle ouvrit la danse en mouvant ses doigts fins, laissant un ruban de vent serpenter tout autour sans lâcher le seigneur du regard. Le ballet de corps s'entre-tuant autour d'eux n'avaient comme plus d'importance, demeurant un décor abjecte où le sang était l'encre et la mort les pages. Mais dans ce monde, plus qu'eux comptaient ; comme seul élément perceptible par leurs pupilles respectives.

Le monarque poussa alors un hurlement de guerre, avant de foncer dans la direction de la sombre en tenant sa lance fermement en main. Celle-ci fit un habile saut en arrière en projetant une onde de vent, l'obligeant à se protéger en croisant ses bras devant son visage. Mais même son armure imposante et lourde ne semblait point résister à la puissance du mistral, laissant ses pieds glisser sur l'herbe sanguinolente comme une vulgaire brindille. D'un geste vif et précis, il abattit alors la lame de sa lance au sol, laissant une aura marronnée scinder ce dernier pour provoquer un tremblement où même la terre se déchira. Coupée dans son incantation, la Malla dût cesser son sort, offrant ainsi au combattant une chance de s'approcher à nouveau. Il profita alors de cette brèche pour reprendre sa course, dressant son arme en avant pour la laisser étinceler sous un rayon lunaire perçant les nuages. La magicienne se décala de l'attaque frontale de justesse, en profitant pour apposer sa main sur le manche de la lance — la faisant se parcourir d'éclairs qui mirent à mal son possesseur. Il serra les dents sous la décharge pour ne point plier genou au sol, rassemblant toute sa force pour pousser son arme à l'horizontal ; frappant ainsi au ventre la sombre qui s'écroula au sol, contre le corps d'un de ses soldats. Alors que le lancier tenta de profiter de sa position pour abattre sa lame sur elle tel le couperet d'une guillotine, celle-ci leva sa main en l'air pour laisser la lame s'écraser contre un bouclier invisible. Les deux serrèrent les dents, usant de toutes leurs forces pour percer la défense de l'autre. Finalement, l'énergie déployée par le monarque lui provoqua une vive douleur dans la plaie de son épaule, lui offrant une seconde de relâchement. L'arcaniste profita alors de ce moment de faiblesse pour faire exalter sa magie, laissant le bouclier de vent éclater dans une onde de choc qui projeta à son tour l'homme au sol, quelques mètres plus loin. Le bruit de son armure s'écrasant au sol ressembla au bruit du fer se tordant ; et cela n'était point qu'une apparence quand une épaulière s'envola dans la chute pour s'écraser plus loin. Il n'eut le temps de reprendre ses esprits que son corps se mit à être soulevé du sol par une puissante bourrasque.

« Pauvre fou. »

La Malla tenait ses deux mains devant elle, dans sa direction, laissant les flots de sa magie l'entourer comme un animal piégé. Il voulut répondre, mais déjà les tumultes du sort écrasèrent son armure pour la faire plier petit à petit. Ses pieds patinaient dans le vide, cherchant un appui quelconque — mais cela demeurait vain. Un sourire sadique parsema les lèvres de la sombre quand l'homme arracha un hurlement sous le métal pénétrant sa propre chair ; faisant de sa propre armure un calice lui lacérant la peau. Puis, d'un geste vaste, elle envoya sa main droite sur le côté, laissant le corps meurtri de l'homme s'envoler pour s'écraser contre un arbre qu'il arracha sur son passage.

( A terminer. )
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