Kaytia

[Nykozaiya]

Kaytia se mit assise sur le sable chaud et regarda, admirative, tout autour d’elle … Quel bel endroit pour se reposer, se dit-elle. Partout des falaises plus ou moins abruptes, une petite crique avec cette plage de sable blanc que le soleil réchauffait doucement alors que ce dernier était au zénith. Au loin, elle distinguait un château, des remparts, un port …

Je suis heureuse … heureuse de m’être enfuie et d’avoir rejoint ces terres qui me semblent très accueillantes… heureuse d’avoir quitté cette vie qui ne pouvait rien m’apporter… J’espère que vous me pardonnerez un jour de vous avoir quitté ainsi chers parents. Mon cœur sera toujours auprès de vous, mais la vie que vous me proposiez ne pouvait me convenir … Les mots de Kaytia ressemblaient étrangement à une prière d’adieu où se mélangeait tristesse et joie d’avoir décidé de prendre sa vie en main.

Ce qu’elle connaissait de la vie n’était que très succin, car depuis sa tendre enfance elle avait été protégée du monde extérieur et bercée par des histoires féeriques où le mal n’existe pas et où les gens vivent heureux et en paix.

Sa vie avait pourtant commencé normalement, comme celle de toutes les petites naines de son village à cette exception … qu’elle était la fille unique, depuis la mort de sa sœur jumelle, de parents très fortunés où le père était un artisan très convoité et où la mère était une chasseuse de trésors hors pair. Au fil des ans, ses parents s’étaient fait une réputation qui allait au-delà des frontières. On venait de tous les villages et même de territoires très éloignés pour acheter ou faire créer sur mesure la marchandise de très grande qualité que fabriquait son père.

Mais un jour alors que les petites jumelles allaient avoir 5 ans, le sort s’acharna sur la famille… Kaytia et sa sœur furent touchées par une fièvre foudroyante qui tua en quelques heures la plus fragile des deux sœurs. Kaytia resta agonisante pendant plusieurs jours, plongée dans un coma que les médecins croyaient irréversible. On découvrit en prélevant quelques gouttes de sang de la jeune naine, qu’un empoissonnement était à l’origine de cette fièvre. Malgré les nombreuses recherches, on ne sut jamais ce qui était à l’origine de cet empoissonnement qui plongea la famille dans un profond désarroi.

Profitant de sa réputation, le père de Kaytia fit venir à son chevet les plus grands médecins, sorciers, guérisseurs qu’il connaissait. Ces derniers se penchèrent sur le cas de la petite pendant des jours et des nuits entières. Mais rien ne semblait pouvoir venir à bout de cet empoissonnement et de cette fièvre. Nombre de médicaments, plantes, soins et incantations de toutes sortes furent apportés et prodigués à Kaytia, pourtant chaque jour aucune amélioration sur la santé de la petite, chaque jour le même rituel et le même résultat … On prélevait un peu de sang de son tout petit bras meurtri par les piqûres à répétition, on choisissait un prisonnier et on lui faisait boire le sang de la petite … quelques heures plus tard, le malheureux mourrait d’une fièvre foudroyante.

Un jour pourtant la fièvre s’estompa et Kaytia reprit conscience du monde qui l’entourait. Jour après jour elle reprenait des forces, au grand bonheur de ses parents. Elle semblait ne se souvenir de rien et ne semblait avoir aucune séquelle de cette fièvre maudite, si ce n’est que son sang était toujours empoissonné…

Elle finit par reprendre une vie normale … enfin normale … elle continua de vivre tout du moins. Ses parents tellement tristes d’avoir perdu la petite sœur jumelle, se jurèrent de protéger coûte que coûte Kaytia du monde extérieur, afin de ne pas la perdre elle aussi. C’est ainsi qu’elle vécu jusqu’à l’âge de 17 ans enfermée dans cette immense maison avec tous les esclaves et ses parents. Elle ne manqua de rien, elle eut une éducation privée de très grande qualité et avait tout ce qu’elle souhaitait. Tout était là pour assouvir ses moindres souhaits ou caprices. Pourtant … elle n’était pas heureuse et ne souhaitait qu’une chose … sortir de cette maison pour vivre normalement … pouvoir aller et faire sa propre vie, découvrir le monde par ses propres moyens.

Durant toutes ces années où elle avait été enfermée dans cette maison, Kaytia avait noué des liens très serrés avec l’une des esclaves. Cette dernière lui avait tout appris… à l’insu de ses parents… tout appris sur ce qu’il y avait à savoir sur la vie extérieure, sur les territoires lointains et les races, les rapports entre les gens, les guerres, l’amour, les sentiments, les moyens de se défendre. Mais elle lui enseigna surtout certaines techniques pour être plus rusée et maligne que la plupart de gens, pour paraître naïve tout en ne l’étant pas …

Au fur et à mesure qu’elle grandissait et qu’elle apprenait ce qu’était la vie à l’extérieur de ces murs, son envie de fuir devenait de plus en plus grande. Elle mit au point une stratégie afin de s’enfuir pour ne jamais revenir, une stratégie pour mettre fin à cette existence qui la pesait et ne lui convenait plus. C’est à l’âge de 17 ans qu’elle décida de mettre son projet à exécution … Elle profita d’un voyage de quelques jours de ses parents, voyage d’affaire et d’échange, pour demander à cette esclave, qui était devenue au fil des ans sa meilleure amie et confidente, de l’aider. Elle lui demanda simplement de s’assurer que la porte du jardin serait ouverte toutes les nuits pendant l’absence de ses parents, ainsi elle pourrait s’enfuir et courir jusqu’à la forêt sans risque que les gens du village ne puissent la voir et la suivre.

Puis, une nuit, alors que tout le monde dormait paisiblement, Kaytia se faufila jusqu’à la chambre de son amie, la prit dans ses bras et lui dit :

Je te remercie de m’avoir tout enseigné et d’avoir été ma confidente pendant toutes ces années. Tu resteras à tout jamais dans mon cœur et mes yeux chercheront toujours ton visage dans ces territoires lointains où ma vie va prendre tout son sens à présent. Si un jour tu es libre, je t’en prie cherche moi afin que nous nous retrouvions. Je garderai le même prénom, ce sera peut être ton seul moyen pour me retrouver…


Elle partit ainsi sans attendre les mots d’adieu de son amie …

Kaytia courut sans arrêt dans la nuit étoilée, elle courut dans la forêt pendant de longues heures et elle s’y cacha quelques temps, chassant pour subvenir à ses besoins. Elle devait maintenant mettre au point un scénario qui allait à tout jamais mettre fin aux recherches de ses parents pour tenter de la retrouver. Elle n’eut pas besoin de chercher trop longtemps, car sur sa route, elle trouva le parfait scénario qui s’offrit à elle tel un cadeau tombé du ciel … Là, sur le sol gisait le corps d’une jeune naine qui devait avoir environ son âge. Elle réfléchit quelques instants assises près du corps de cette pauvre malheureuse. Il lui fallait absolument faire en sorte que personne ne puisse reconnaître le visage, ni le corps de cette naine si on venait à la retrouver. Le seul moyen qu’elle trouva était de brûler le corps sans vie. Puis, pour être certaine qu’il n’y eut aucun doute possible sur l’identité du corps brûlé, il fallait trouver une bête, lui faire boire un peu de son sang empoisonné, laissant croire que la bête avait attaqué Kaytia et que cette dernière était tombée dans le feu suite à un combat avec la bête.

Kaytia était plutôt fière d’elle et de sa mise en scène, elle mit donc son projet à exécution. Elle trouva une bête, qu’elle réussit à ligoter. Elle se coupa le doigt pour en extraire quelques gouttes de sang et le fit boire à la bête sauvage. Il ne fallut pas longtemps pour que la bête tombe et meurt … désormais le sang de la bête portait le sceau de l’empoissonnement de Kaytia. Elle alla chercher du bois pour le feu, mit des pierres en rond pour limiter ce dernier et s’affaira à faire de celui-ci un élément destructeur qui saurait mettre fin à tous soupçons sur l’identité de la personne qui se trouvait à cet endroit. Elle regarda le corps sans vie de la naine à ses côtés, lui prit la main et lui demanda pardon pour ce qu’elle allait faire maintenant. Grâce à elle, Kaytia allait pouvoir être heureuse et vivre sans crainte d’être poursuivie, recherchée et traquée jusqu’à sa mort.

Elle souleva le corps inerte et le jeta difficilement dans le feu. Très vite les flammes prirent de l’ampleur, une odeur insoutenable se dispersa dans l’air environnant. Kaytia se boucha le nez comme elle put et détourna le regard se sentant terriblement cruelle de faire une telle chose, mais elle n’avait pas d’autres choix. Le corps mit un long moment à brûler pour finalement laisser place à un simple tas d’os calcinés dans les braises brûlantes. Elle resta là jusqu’à ce que le feu s’éteigne complètement. Maintenant plus personne ne pourrait reconnaître le corps, se dit-elle. Elle prit soin de laisser, également, une magnifique bague que ses parents lui avaient fabriqué de toutes pièces, ainsi plus aucun soupçon ne pourrait exister …

Kaytia avait repris sa route, le cœur lourd mais plein d’espoir en l’avenir, vers une ville nommée Giran, puis jusqu’à cet endroit où elle se reposait près d’une crique repensant à sa vie passée…

[Nykozaiya]

Plusieurs mois se sont écoulés depuis mon arrivée sur ces terres. J’y ai rencontré beaucoup de gens de toutes races. Parmi toutes ces rencontres, deux m’ont particulièrement marquées. Tout d’abord Nimbus, un artisan dont les doigts valent de l’or … Etant seul, tout comme moi, nous nous sommes vite liés d’une sincère et profonde amitié. Puis, au fil des jours, cette amitié s’est peu à peu transformé en un amour plus fort que tout, un amour profond et partagé où chacun s’épanoui dans le respect et la confiance.

Nimbus et moi travaillons toujours ensemble. Moi, je récupère des ingrédients de qualités et des plans de toutes sortes allant des plus faciles au plus complexes à la fabrication et lui s’affaire à comprendre et apprendre les divers plans que je ramène et à modeler ensemble tous les ingrédients pour arriver à des produits finis de grande qualité. Nous formons une très bonne équipe, tout comme l’était ma mère et mon père… Nimbus devient de plus en plus habile chaque jour et il ne fait nul doute qu’il deviendra un très grand artisan. Puis, il est si gentil envers moi, il a toujours une petite attention, un petit cadeau …

La seconde rencontre m’ayant beaucoup marqué est cet orc que le destin a mis sur ma route il y a quelques jours à peine. Cette rencontre m’a beaucoup perturbé et influera, sans conteste, sur toute ma vie à venir … Nos chemins ce sont croisés par un malheureux hasard et si ce n’eut été de mon passage à Varka, nous ne nous serions jamais rencontré.

Ce jour là j’étais donc de passage à Varka dans le but de récupérer quelques enchantements de très grande qualité. Malheureusement, mon périple prit une toute autre dimension quand mes yeux croisèrent ce blason … Quelqu’un l’avait visiblement perdu lors d’une chasse un peu musclé. J’ai tenté de retrouver le ou la propriétaire de ce blason, mais en vain. J’ai eu beau parcourir tout le territoire de Varka, mais mes recherchent restèrent infructueuses. Juste cette nouvelle découverte …une petite broche pour les cheveux, immaculée de sang encore frais. Il me fallait à tout prit savoir à qui appartenait ce blason et peut être même cette broche.

Après de longue minutes à regarder le blason, je m’aperçus que deux petites initiales y étaient inscrites … deux petits N entrecroisés et traversés en plein centre par une épée … Puis, je me suis souvenu avoir déjà vu ces couleurs sur une naine à Rune, une naine avec qui j’avais fait quelques échanges … Muirguen !!! Elle était, sans conteste, la seule personne à pouvoir m’aider pour le moment et peut être savoir à qui appartenait ce blason.

J’ai parcouru les rues de la Cité de Rune à sa recherche, demandant aux commerçants, aux responsables de l’entrepôt et même au tavernier s’ils ne l’avaient pas vu passer par là. Elle n’était pas là, elle avait bien été vue plus tôt dans la journée, mais elle semblait ne plus être là. En retournant vers la passeuse, je me suis dit que je ne perdais rien à lui montrer le blason, elle était sûrement une des personnes de la Cité à voir le plus de monde passer dans une journée. Ayant sorti le blason pour lui montrer, elle me dit de me renseigner auprès de Floryan qui se trouvait juste là tout près, car elle était très occupée. Quelle ne fut pas ma surprise en me tournant et en voyant cet orc … un orc imposant, immense, il devait bien faire deux fois ma hauteur et il se tenait à mes côtés. Il semblait quelque peu inquiet et avait les yeux fixés sur le blason que je tenais entre mes petites mains…

Où avez-vous trouvé ce blason ?... qu’il me dit, d’un ton sec.

Je ne savais pas trop quoi dire …

Euh … vous savez à qui il appartient ?

Oui, il appartient à ma compagne, Nykozaiya… me dit-il, le regard perdu.

Il le prit et le regarda plus attentivement. Puis, j’ai sorti la broche pour lui demander si celle-ci lui appartenait aussi. La réponse fut immédiate et positive. Cette broche lui appartenait également. Nous avons discuté un moment, puis je lui ai demandé s’il voulait qu’on reparte vers Varka pour voir si elle était toujours là-bas ou si on pouvait trouver d’autres indices nous permettant de la retrouver.

Il semblait très perturbé. Apparemment, elle lui avait donné un rendez-vous et n’était pas présente sur les lieux au moment venu. Il avait peur que quelque chose ne lui soit arrivée… ce qui semblait, en effet, être le cas …

Nous avons cherché d’autres indices, je lui ai indiqué les endroits où j’avais trouvé le blason et la broche et en voulant lui indiquer l’endroit où j’avais trouvé cette dernière, nous sommes tombés sur un bout de terre souillé de sang … de beaucoup de sang …

A ce moment, ses yeux se sont obscurcis, les traits de son visage se sont durcis et tous les muscles de son corps se sont contractés. On pouvait voir toute la tristesse et la rage qui s’entrechoquaient en son fort intérieur pour former un sentiment dévastateur qui se manifestait sur chacune des parties de son corps, surtout au niveau des tempes et du cou …

Je dois avouer qu’à ce moment précis, j’eue un peu peur de ce qui pouvait m’arriver, mais je n’ai montré en aucun moment cette angoisse qui m’envahissait.

Au contraire, j’essayais de le rassurer …

Mais ne soyez pas trop inquiet, elle a peut être tout simplement perdu ces objets en chassant. Vous ne croyez pas ?

Il ne disait rien.

Elle avait des ennemis ?... que je me permis de demander le plus calmement possible.

Non, elle n’avait aucun ennemi … me dit-il.

Sauf …peut-être …cet …cet orc, qui d’après Nykoza lui en voulait … et il s’arrêta brusquement.


Je ne voulais pas trop insister, le voyant déjà bien perturbé. Je lui dis, tout simplement, que je restais à sa disposition s’il avait besoin de moi et que je chercherais de mon côté tout indice pouvant le mener à elle.

Il semblait être redevenu un peu plus calme. Il sorti le blason de Nykozaiya et me le donna en me disant d’en prendre grand soin et de le garder avec moi afin que les membres de son clan puissent me reconnaître en tout temps.

Restez en contact avec eux et rapportez leur tout ce que vous m’avez dit et savez à propos de la disparition de Nykoza… me dit-il en me regardant droit dans les yeux.

Moi je pars à sa recherche et je chercherai tant que je ne l’aurai pas trouvé vivante ou … morte…avait-il rajouté en baissant les yeux.

Je suis partie en le laissant à Varka, je devais continuer mes recherches de mon côté puisque j’étais maintenant impliqué et que même sans connaître cette Nykozaiya, j’étais dorénavant liée à elle par ce blason et ce que j’avais découvert … je savais que mon destin était de lui venir en aide …

[Nykozaiya]

Voilà maintenant plusieurs jours que j’étais partie à la recherche d’indices pouvant nous mener à Nykozaiya. J’avais décidé d’être très méthodique dans mes recherches, définissant avec précision les différentes villes, plaines, montagnes et villages à parcourir. Depuis, j’avais marché sans relâche sur tout le territoire septentrional des Terres d’Aden et d’Elmore, demandant à tous et chacun croisant ma route s’ils n’avaient pas vu une dame orc passée par là accompagnée ou non d’un orc mâle. Partout on me répondait négativement, personne n’avait rien vu, ni entendu. Je me rendais compte au fil de mes discussions que je n’avais, en fait, que très peu de détails à fournir sur Nykozaiya pour la reconnaître.

J’avais donc décidé de retourner vers Rune afin de rencontrer les membres de l’Ordre d’Ambre ou peut-être même Floryan, afin qu’ils me donnent quelques informations supplémentaires sur Nykozaiya. Je me devais aussi de les rencontrer pour leur dire ce que je savais.

Qui sait, elle était peut-être revenue ou l'avaient-ils peut-être retrouvée … C’est ce que j’espérais au plus profond de moi.

Puis, il me fallait aussi retourner auprès de Nimbus. J’étais partie si précipitamment que je n’avais même pas pris la peine de l’informer de mon départ et du pourquoi de celui-ci.

Mon pauvre Nimbus, tu dois être très inquiet, j’aurais dû au moins te laisser un mot avant de partir… m’étais-je dis sur la route du retour vers Rune.

[Lotradas]

Compte supprimé par conséquent de même pour le perso