[BG] Hivana (sans clan)

[hivana]

(Background complet du temps passé)

Chapitre 1

Il est par delà ce royaume et bien plus loin encore, des destins tragiques.
Laissez-moi vous conter le notre ...

Bien avant la réunification des races, nos ancêtres rêvaient d'un idéal : un monde ou tous seraient en paix et vivraient dignement sans crainte de la guerre.
Évidemment, cela ne plu pas à tout le monde et ils furent persécutés par les leurs.
Afin de protéger leurs familles et leurs enfants, ces elfes noirs utopistes s'enfuirent de leur village sous la colère de leur seigneur et de leur dieu et se réfugièrent dans de lointaines montagnes.
Arrachés à leurs racines, ils vécurent tous de même paisiblement. Enseignant leur art de la magie et du maniement des armes à leur descendance.

Mais hélas, la haine planait toujours sur eux et ils finirent par être retrouvés et massacrés.

Il y a deux ans, alors que rien ne présageait de si sombres jours et que les noces de Fargas et de moi-même étaient sur le point d'être célébrées, un terrible sort planait sur nous. Le ciel s'assombri subitement et des myriades de boules de feu s'abattirent sur nos demeures, les réduisant automatiquement en cendre, tuant de dizaines d'entre nous. Nos guerriers tentèrent de combattre ce danger inconnu mais ils se retrouvèrent bien vite impuissants face à ce fléau.
Ce fut donc, les mages de la cité qui tentèrent de créer un dôme de protection mais en vain. Celui-ci fut vite transpercé de toutes part. Devant la dure réalité de notre perte à tous, nos parents nous ordonnèrent de nous enfuir afin de survivre.
Chose que mon futur époux Fargas et son frère magicien Fargus, ne voulurent pas admettre. Nous restâmes donc à protéger notre village et nos blessés jusqu'au bout.
Jusqu'à ce que le feu cesse enfin.
Nous avions tout perdu. Nos familles, nos amis, nos biens et, nous relevant de ce cuisant échec, nous promettant, en mémoire de nos morts, de reconstruire notre village, une dernière et terrible malédiction s'abattit sur nous.
Seuls survivants dont la puissance se retrouvait décuplée grâce à la mise en commun de nos dons, nous furent brutalement séparés par la volonté d'un puissant mage.

Ce fut d'abord le noir complet, je me souviens m'être réfugiée dans les bras de mon aimé puis j'ai perdu connaissance.
Je me suis réveillée au matin, seule et dans un pays inconnu.

Depuis, j'erre dans le but de retrouver mon bien aimé.
L'y avez-vous croisé ?

Mes souvenirs de lui s'effacent peu à peu et je me dois d'écrire ces quelques lignes pour ne pas oublier.

[hivana]

Chapitre 2

Mes pas me conduisirent dans une ville immense et remplie de centaines d'êtres de toutes races, de toutes religions. Mes yeux allaient partout, parfois émerveillés par le travail en groupe de nains ou les bénédictions lumineuses de certains mages humains, parfois réticents devant quelques spectacles d'ivrognes sortant des tavernes ou des bagarres d'orc au coin des ruelles.

Remontant la rue principale, j'atterris bien vite sur une grand place noire de monde. Tous écoutaient religieusement les paroles d'un page, monté sur un tonneau de bois, qui déclamait à haute voix son message.
Je voyais, sur les visages, toute l'attention qu'ils avaient à boire ses moindres paroles. Et bien que j'aie raté le début de son discours, je me pris également à l'écouter.

"Cette quête extraordinaire débutera dès demain à l'aube. Comme chaque année, nos sept grands sages choisiront parmi la foule ceux d'entre vous étant les plus aptes à y participer."

Vint alors sept vieillards, les badauds s'écartèrent sur leur passage, formant un couloir entre le temple et le centre de la place ou se tenait le page. L'un d'eux désigna un chevalier parmi la foule, celui ci poussa un cri de victoire et se dirigea vers le temple en courant. Le deuxième désigna un elfe archer, grand et blond qui s'inclina humblement devant l'ancien et prit le même chemin que son futur compagnon de quête.
Quelle ne fut pas ma surprise lorsque le troisième me désigna du doigt !

"Moi ?"

Il ne me répondit que d'un signe d'acquiescement de la tête. A son regard noir, je compris qu'un refus de ma part risquerait de m'apporter quelques soucis et je suivi le même chemin que les deux autres, la tête basse et lasse de mon long voyage.

[hivana]

Chapitre 3

Lorsque les sept participants furent choisis, nous nous retrouvâmes dans une grande pièce où siégeaient quatorze sièges disposés en cercle. Les sages nous y rejoignirent et s'assirent en demi cercle, nous invitant à faire de même. Puis nous expliquèrent de quoi il retournait de cette fameuse quête. J'avais l'impression d'être la seule qui ne rêvait pas d'y participer, les autres autour de moi semblaient fiers et ravis. Moi je sentais encore un lourd écho de douleurs dans mes pieds et mes jambes après tant de kilomètres de marche. Le seul point qui m'enchanta alors, dans leur discours, est que nous pouvions bénéficier d'une chambre et d'un copieux repas dans une luxueuse auberge avant de nous mettre en route. C'était inespéré vu le peu d'argent dont je disposais et cette nuit me fut plus réparatrice que n'importe quelle autre. Avec le recul, je me demande même si nous n'avions pas reçu quelques bénédictions puissantes de la part des vieillards durant notre sommeil.

A l'aube, on vint nous chercher. La brume enrobait encore chaque demeure, si bien que l’on n’y voyait pas à plus de deux mètres devant soi. Nous fûmes conduit devant une immense porte à deux battants à la sortie de la ville.
Usant de magie, les sages l'ouvrirent et nous conseillèrent de faire vite pour la franchir afin de la refermer prestement derrière nous. Je ne savais pas du tout ce qui m'y attendait, je rassemblais alors mes souvenirs confus sur ce que l'on m'avait enseigné en matière de magie car j'avais alors l'étrange impression qu'ils me seraient utiles pour survivre ...

[hivana]

Chapitre 4

Ma mémoire troublée se souvient péniblement de ces jours qui suivirent. Et heureusement pour moi car le peu qui m'en reste est des plus terrifiants. Nous avons d'abord traversé un marécage nauséabond dont l'odeur des eaux putrides aurait dégoûté l'orc le plus sale d'Aden. Des feux follets semblaient éclairer une voie incertaine vers une mort beaucoup plus certaine, elle. Nous suivions donc, avec beaucoup de précautions, ce chemin naturel pendant plusieurs heures. Le silence qu’il y régnait semblait pire que tous les hurlements, du moins c'est l'impression que nous avions avant de commencer à entendre des bruits étranges.
Des craquements d'os, des cliquetis de chaînes et ce bruit dégoûtant ressemblant à une masse de chair décomposée en mouvement. L'odeur déjà à la limite du supportable devint tout à fait impossible à respirer sans haut le coeur. Je me souviens qu'un de mes compagnons de quête, notre prêtre soigneur, en remis bruyamment son repas de la veille. Il se redressa ensuite, s'excusant de n'avoir pu se retenir, surtout devant une dame puis son visage se figea en une grimace de terreur et devint blême. J'avoue que j'avais plus que peur de me retourner et comprendre pourquoi ses yeux voulaient ainsi sortir de leurs orbites. Le chevalier, lui, avait eu plus de courage et articula un "Oh ! Par Einhasad !" pas très optimiste. Suivit de l'archer qui sorti quelques flèches de son carcan. Le nain à barbe rousse nous accompagnant nous murmura quelques paroles d'encouragement. Puis ce fut le chaos. Les braves s'élancèrent, le prêtre vint auprès de moi et nous nous plaçâmes dos à dos, entourés des guerriers qui frappaient à tour de bras.

Ils semblaient être des centaines, si incroyables à voir que j'ai encore du mal à les décrire. Des hommes ... enfin non, ce n'étaient plus des hommes. Des amas de chairs décomposées portées par un squelette moisi mais brandissant encore l'épée et le bouclier comme si leurs muscles en étaient encore capables. Si j'avais eu, à ce moment la, un quelconque Dieu à prier, je m'en serait remise à lui. Mais, le choc de ces apparitions passées, je me rendis compte que ma seule chance de survie était de participer à la bataille. Je m'en remis donc à mes cours de magie d'antan et invoquant tous les sorts que je connaissais, j'en mis également beaucoup hors d'état de nous nuire. La lutte fut longue et, lorsque nous n'en vîmes plus aucun, nous avons continué notre route mais au pas de course afin de quitter au plus vite ces marais maudits ...

[hivana]

Chapitre 5

A la lueur d'une chandelle déjà bien entamée dont la cire s'étalait sur la table de bois grossier jusqu'à presque toucher le rebord de son grimoire, l'elfe noire se tenait la tête dans les mains. Tentant de rassembler ses souvenirs.

Qu'il était difficile de les retrouver dans les recoins sombres de sa mémoire défaillante, elle se frotta les yeux, la fatigue la gagnait de plus en plus mais pourtant elle ne voulait pas s'arrêter pour la nuit. Elle savait qu'une nuit de plus et elle aurait tout perdu de son passé.
A son retour de cette quête maudite, les sept sages le lui avaient bien dit.

"Tu oublieras tout. Ta nouvelle fonction ne peut souffrir de ce que tu caches à présent en toi. Tu es pure et doit le rester dans ton corps comme dans ton âme et ton esprit. La souillure du sang sur ton corps disparaîtra bien vite et les images de mort de ta mémoire s'effaceront peu à peu. Oublie la tristesse passée, la perte de ceux et de celui qui tu aimes tant.
Oublies ton passé pour être prête à conquérir ton avenir."

Elle reprit sa plume, tremblante et les larmes aux yeux. Sans plus trop savoir pourquoi elle avait tant envie de pleurer. Une lointaine mélancolie dont la cause lui était devenue inconnue au fil des heures la submergeait sans qu’elle comprenne pourquoi. A peine, les mots des sages posés par écrit qu'ils s'effacèrent de sa mémoire.
Depuis qu'elle avait commencé la rédaction de ce livre, elle en avait lu et relu les pages, se traitant parfois de folle car tout cela lui semblait étranger pourtant elle y reconnaissait son écriture. Souvent elle avait failli tout déchirer ou jeter au feu.

Elle trempa sa plume dans l'encrier, prête à continuer son histoire quand sa main resta figée dans les airs.
Une goutte d'encre noire tomba sur la page encore vierge qui attendait la suite avec impatience. Il était trop tard, elle avait oublié.

Éclatant en sanglots, elle tourna nerveusement les feuillets précédents à la recherche de ce qu'elle venait perdre. Revint plusieurs pages en arrière, la ou il était inscrit en grands caractères : la dernière épreuve. Et lu :


Nous arrivions en vue d'une grotte dont l'entrée immense rappelait la gueule ouverte d'un monstre gigantesque mais heureusement édenté. Après avoir marché deux jours dans un désert aussi aride que mortel. Après avoir vu périr l'elfe archer sous les coups d'une armée de morts vivants aux os asséchés. Entendu, au loin, les cris de terreur puis de douleur du malheureux prophète qui nous accompagnait. Nous arrivâmes la où nous pensions devoir enfin arriver.
L'ombre de la grotte nous fit un bien immense mais l'eau nous faisait cruellement défaut. Nous n'avions rencontré que monstres au sang de venin et armées de squelettes. Mais la, au fond d'un couloir, on voyait déjà d'immenses créatures bossues à la peau d'écaille. Le chevalier se releva, prit une pierre et la lança d'un geste habile sur la tête de la plus proche de nous. La bête s'approcha de nous, furieuse et rencontra la lame de celui qui avait osé le déranger. D'un geste brusque, il découpa l'épaisse peau verte, faisant déverser les entrailles du monstre dans des flots de sang.

"Voila qui étanchera notre soif." Fit-il.

Les autres suivirent son geste et se penchèrent sur la bête mourante et burent à même la blessure tout ce qui en découlait.

J'en eu un haut le coeur mais la soif me poussait malgré tout à les imiter. Ils s'écartèrent et me laissèrent la place, comme curieux de me voir accomplir un acte aussi ignoble.

Nous avons passé la nuit la, à côté de l'animal qui se putréfiait à grande allure du à la chaleur des lieux et commençait à faisander. Le seul avantage était que notre odeur étrangère resta masquée de ses frères toujours tapis plus loin dans la grotte. Au matin, le seul moment de la journée ou la température se faisait supportable, le nain me réveilla et me tendit un présent. Il avait toujours eu les égards d'un père pour moi, ce petit barbu un peu bourru mais malgré tout grand stratège et maître forgeron en son village natal.
Il me tendit un objet jauni, courbe et pointu qui n'était autre qu'une des incisives géantes de la bête.

"Un souvenir de guerre. Me fit-il. Pour que tu n'oublies jamais le courage dont tu as fait preuve en nous accompagnant jusqu'ici, mon enfant."

Pour que je n’oublie jamais ...

[hivana]

Chapitre 6

Son regard se brouilla de nouveau sous les larmes.
Il lui semblait s'émouvoir devant des faits vécus par une autre mais qui lui semblait si proche d'elle, jusqu'à lui ressembler tout à fait. Elle essuya ses yeux du revers de la main et observa ses larmes sur sa peau, elles lui semblèrent un instant faites de sang, du sang de ce petit bonhomme qui l'avait prise en affection, lorsqu'il mourut dans ses bras, si proche du but. Elle ressentit une douleur vive dans le bras l'avait fait se redresser et lâcher le petit corps meurtri qui tomba lourdement sur le sol poussiéreux.

"J'ai besoin de tes soins, la sombre ! Veux tu que nous mourrions nous aussi ?"

Le Chevalier m'avait tirée à lui et me secouait comme pour me remettre les idées en place. Mais, il me semblait que c'était tout le contraire qui se produisit. Je ne voyais plus que lui, blessé, et les monstres qui arrivaient vers nous. Je lui lançais alors un sors de soin, le plus puissant que je pus avant de m'effondrer de nouveau.

J'avais essayé de sauver le pauvre nain mais sans pouvoir, mes forces m'abandonnaient et je sombrais moi-même dans l'inconscience et la mort. L'humain me prit sur son épaule, laissant son bouclier à terre et couru vers l'entrée du gouffre qui s'offrait a lui. Tentant coûte que coûte à franchir cette dernière barrière entre nous et l'ultime épreuve.

Après avoir déboulés sur plusieurs centaines de mètres, nous arrivâmes miraculeusement indemnes dans une grotte étrangement silencieuse. Il se releva et m'aida à faire de même mais toutes mes forces m'avaient lâchées.

"Allons ! Nous y sommes ! Nous sommes les derniers et les seuls pour tuer le dragon. Si tu ne peux m'épauler, comment vais-je réussir ? Lèves toi, femelle ! Cria t-il."

Mais je n'y arrivais pas, plus rien ne comptait plus que le repos même s'il advenait qu'il soit mortel. J'étais plus qu'épuisée, ma force magique semblait réduite à néant tant j'avais donné de moi-même. Je lui adressais un regard triste et fatigué, accompagné d'un faible mouvement négatif de la tête. Il comprit et se calma, s'asseyant à mes côtés.

"Reposons nous un instant."

Le silence pesant de grotte disparu par saccades. J'aurais parié, dans un premier temps, qu'il s'agissait d'une bourrasque de vent s'engouffrant entre les roches de la grotte. Mais c'était sans savoir que nous étions profondément enfuis sous terre. Le souffle fut bientôt suivit par un léger grognement qui devient de plus en plus sonore. L'humain se releva d'un bond, il avait compris, lui, et pointa son épée poisseuse de sang et de sable en direction de deux lumières hautement perchées dans le fond de la grotte.

"Te voila enfin, dragon !"

Sa dernière phrase fut pour moi. Sans cesser de fixer l'animal enfuit dans l'obscurité, il me dit adieu puis couru vers lui.
Je le vis longuement tenter de le blesser, esquiver ses coups de griffes immenses, ses coups de mâchoires mortelles. Chaque pas de l'immense dragon faisait trembler la caverne toute entière. Tous ses coups semblaient inutiles et je le voyais se fatiguer de plus en plus, trébuchant maintenant plus qu'il n'esquivait.

Je puisai alors une dernière fois dans mes réserves d'énergie, persuadée que c'était maintenant la fin. Je ne pouvais le laisser mourir seul sans tenter de l'aider alors que son épée m'avait tant de fois protégée durant cette quête.
J'eus une dernière pensée pour Fargas, mon brave et doux guerrier sombre disparu et me relevai. En mémoire de son courage légendaire, j'allais lui faire honneur et me battre comme lui l'aurait fait, jusqu'à la mort.

Je marchais, boitillant, vers l'animal. En route, ma main se posa naturellement sur la dent de monstre offerte par le nain.

Je la sorti de dessous mes vêtements, à sa vue, une idée me vint. Je fixai le dragon, c'était comme une intuition, fixant ses yeux. Je criai au chevalier de tenter de lui crever les orbites mais il faiblissait tant que je ne pouvais l'affubler de cette tache. Et puis, comment aurait il pu atteindre cette hauteur ?

La formule du sort de vent me revint en mémoire et je l'utilisai dans un ultime effort, lançant, au travers des airs vers l'emplacement que je fixais depuis tout à l'heure, la dent pointe vers l’avant. Mortellement blessé, il tenta de me happer mais mes forces m'abandonnant déjà, je retombais à terre, échappant à sa tentative que la douleur avait rendue maladroite. Je retombais à côté de l'humain, allongé lui aussi, les yeux mi-clos, il me sourit et me murmura "Nous l'avons eu !" avant de s'éteindre, apaisé d'avoir accompli sa tache.

Mon dernier compagnon d'aventure mort, je pensais qu'il était temps, pour moi, aussi de les rejoindre.

[hivana]

Chapitre 7

"Hâtez vous ! Il faut que ce soit fait prestement !" Fit la voix fatiguée d'un vieillard.

"Ce sort devrait lui vider l'esprit de toutes ces horreurs. Patientez, il n'y en a plus pour longtemps. Lorsqu'elle se réveillera, plus aucune trace ne subsistera. Soyez en sur." Répondit une autre.

Des bruits de pas, se firent entendre depuis le fond du couloir tandis que les deux hommes, subitement paniqués, se dépêchaient à concocter la potion qu'ils voulaient faire boire à une elfe noire encore inconsciente, allongée sur un grand lit blanc.

La porte de la chambre s'ouvrit avec fracas et les nouveaux arrivants déboulèrent. L'allure hautaine et fière de celui qui les devançait fit se courber en révérence les deux maniganceurs.

"Êtes vous fous tout deux ? Ne vous avais-je pas ordonnés de simplement lui effacer la mémoire et de l'envoyer au royaume d'Aden afin qu'elle y prennent ses fonctions ? Qu'est-ce qui vous a pris de l'envoyer ainsi en mission et sans ma permission ?"

"Mais Maître ! Elle ne se souviendra jamais de ce qui s'est passé durant ces quelques jours. Jamais, je peux vous l'assurer. Nous allions justement procéder à ..."

Mais il fut coupé avant de terminer sa phrase.

"Il suffit ! Tonna sa voix, allant jusqu'à faire trembler les vitres. Elle avait tout noté ! Tout, dans les moindres détails de son aventure dans ce livre que l'on a retrouvé sur elle ! Si jamais ce document était retrouvé, nous serions durement châtiés !"

"Il n'y a qu’à le détruire." Proposa l'un.

"Oui, brûlons le." Riposta l'autre en tentant de s'approprier l'ouvrage. Mais le Maître l'en empêcha.

"Non, nous avons tous fauté. Vous de m'avoir désobéis et moi, de ne pas avoir pu vous en empêcher. Si, un jour, ce recueil était découvert et mis au grand jour, ce jour serait celui de notre perte. Tout ce qu'elle a vécu, ce qu'elle a vu, entendu, fait ..." Il marque une pause, n'osant imaginer ce qu'elle avait bien pu faire sous leurs ordres. "Je vais faire cacher cet objet. Si le destin décide qu'il soit retrouvé, nous en paierons les conséquences comme il se doit."

Sa voix se fit plus calme et son regard se tourna vers elle, qui semblait dormir.

"Nous l'avons arrachée à la mort suite à sa victoire devant le grand dragon, elle mérite le repos à présent. Finissez votre travail et confiez la aux Gardiens du Monde d'Aden. La est sa place à présent."

Une fois le grand maître et ses gardes repartis, les deux vieux sages continuèrent leur complot interrompu.

"Vieux fou ! Lança l'un à l'encontre de son maître absent. Nous tenons la, une arme de choix, une poupée de chiffon docile et obéissante. D'une pureté telle que tout le monde s'y tromperait et le paierait de sa vie dans l'instant et lui veut en faire une gardienne ..."

"Mais tais toi donc ! S'il nous entendait ! Il vaut mieux que nous l'envoyions la bas. Du moins, dans un premier temps. Et puis, qui nous empêcherait de lui asséner, discrètement, quelques missions de temps à autre ? Qui s'en douterait ?"

Ils se penchèrent sur l'elfe et sourirent sournoisement, pensant déjà à quelques plans diaboliques futurs. Et pendant que l'un lui fit boire la potion d'oubli récitant son incantation. C'était la seconde fois qu'il opérait ainsi sur elle et ne semblait pas se soucier le moins du monde des conséquences que cela pourrait ou non engendrer sur la santé mentale de jeune elfe à la peau sombre. L'autre se glissa hors de la chambre par une porte dérobée, emportant avec lui les vêtements poisseux de sang et les linges qui avaient servis à la laver, eux aussi rougis du liquide de vie dont elle avait du vider ses
victimes.


Deux jours plus tard au royaume d'Aden, dans une ville du nom de Giran plus précisément, apparu une elfe sombre nommée Hivana et envoyée par un comité d'anciens mages. D'abord un peu perdue au milieu d'une foule d'inconnus, elle entreprit de saluer un passant et s'étonna de prononcer son nom avant même qu'il ne le lui dévoile.

"Comment connaissez vous mon nom ?"

"Je le connais, c'est tout, je ne sais comment."

"Vous êtes voyante ? C'est pour cela que vous portez ce masque ?"

Hivana toucha son visage et s'aperçut qu'elle portait bien quelque chose lui voilant légèrement ses yeux. Il lui semblait qu'elle n'était pas tout à fait éveillée, l'esprit embrumé comme dans un rêve. Mais lorsqu'elle se sépara de l'objet couvrant sa face, des myriades d'images l'assaillirent. Ce fut si violent qu'elle failli tomber à la renverse. Des batailles, des soirs de beuveries à la taverne de la ville, des routes, un château. Tout le passé de cet inconnu repassait devant ses yeux.

Elle remit prestement le morceau d'étoffe sur ses yeux et tout cela disparu aussi vite, la laissant dans un état d'hébétude.

"Ça va jolie dame ?" Lui demanda l'homme en souriant.

"Oui, je vous remercie."

"Bon et bien je vous laisse, je compte aller chasser avec quelques amis aujourd'hui. Au revoir."

A peine remise de ses émotions, deux gardiens virent l'accueillir afin de lui souhaiter la bienvenue et lui enseigner les rudiments de sa nouvelle fonction de Gardienne.
L'une était belle et blonde, une Déesse elfe nommée Arwen. L'autre, un Seigneur humain courageux et jovial répondait au nom de King. Hivana préféra ne pas leur dévoiler ce qui venait de se produire, ne sachant pas encore pourquoi cela lui était arrivé. D'ailleurs, elle avait beau tenter de se rappeler ce qu'elle faisait la, et comment elle y était arrivée. Rien dans sa mémoire ne pouvait l'y aider.

C'est alors que l'elfe blonde la salua et lui sourit si aimablement qu'elle se senti rassurée. Même si elle avait tout oublié de son passé, elle avait devant elle, un avenir des plus serein à présent.

[hivana]

Chapitre 8

Le Grand Sage, le plus grand et le plus puissant des sept se tourna et retourna dans son lit. Assailli de violents cauchemars depuis quelques jours maintenant, il geint longuement dans ses draps humides de sa sueur avant de se redresser, épouvanté.

Il retrouve, en instant l'allure calme et rassurante de sa chambre. Ses grimoires précieux disposés tout autour de lui sur de larges étagères, cette odeur si caractéristique du vieux parchemin et de l'encre pure. Mais son esprit n'est plus en paix, il se relève et s'approche d'une large boule faite d'un cristal si pur qu'il reflète tant le passé que l'avenir tout en oubliant le présent.
Il se penche au dessus de lui, l'effleure du dos de la main tout en prononçant la formule qui convient. Ce qu'il y vit le glace un instant puis il se ravisa.

"Si le destin en à décidé ainsi ..."

[hivana]

Chapitre 9

LIVRE 2 - Extrait du début

Je viens d'arriver en Giran il y a quelques jours à peine et déjà je m'arrête un instant pour écrire ces lignes. Je me suis attablée dans le coin sombre d'une taverne bien calme. Il est très tôt et les habitués les plus bruyants ne viennent qu'en soirée m'a t-on signalé.

La table où je me trouve, malgré le nombre incalculable de fois ou elle a du être nettoyée par le chiffon du patron, un orc colossal, sent la bière et le vomi. C'est un peu incommodant, je l'avoue, mais c'est le prix à payer pour rester discrète.

Je ne sais pourquoi j'ai eu ce réflexe d'acquérir ce grimoire aux pages vierges, une impulsion soudaine au début puis je me suis rendue compte que cela ne serait pas inutile de répertorier un peu ce qui se passe dans ma nouvelle vie.

Et qui dit nouvelle vie, dit ancienne.
Tout cela est si trouble à présent. Je ne sais même si ce que je crois l'avoir vécu, je ne l'ai pas rêvé uniquement. Des images atroces me reviennent chaque nuit, j'en ai du mal à dormir. Je revois ce dragon ...
Non, je ne préfère plus y penser !

Je crois que je me demanderai toute ma vie pourquoi ces sept sages ont tellement tenus à ce que je participe à cette folie meurtrière ? Et pourquoi ils m'ont fait venir ici et faire de moi ce que je suis ?

Oh, je ne peux pas dire que je sois malheureuse. Au contraire, ma fonction me plait énormément. Je rencontre chaque jour de nouveaux visages. Parfois doux et amicaux mais parfois sévères et empli de traîtrise aussi. Mais je me sens seule, si seule parfois que la mélancolie me pousse à croire que quelqu'un ou quelque chose manque terriblement à ma vie.

[hivana]

Chapitre 10

Son image trouble encore tant mon âme à cet instant même que j'ai bien du mal à exprimer clairement ce qui m'arrive. J'ai rencontré tant de gens depuis ma venue dans cette ville, je crois même qu'il se peut que je noue quelques amitiés sincères avec certains d'entre eux. Mais "lui", c'est différent.

Il me glace et me brûle à la fois. Je me sens pâlir lorsqu'il s'avance dans la foule. Et rougir lorsqu'il est à proximité. On va bientôt me croire souffrante à perdre ainsi mes moyens ! Je n'ose l'approcher et encore moins lui parler, je me sentirai bien trop idiote si je me mettais à bégayer en le saluant. Il a tant de prestance, de charisme ! Malgré son habit sombre, se fondant dans la foule comme une ombre que personne ne remarque, il dégage, cependant, une aura exceptionnelle et enivrante qui ne m'a pas échappé à moi.
Pourtant, je ne devrais pas. Je sais ce qu'il est ... enfin, je ressens malgré mon masque qui m'en protège, qu'il cache des choses terribles. Mais comment m'empêcher ?


Hivana referma le grimoire et le tint un moment contre son coeur. Pensant à cet elfe sombre qui la troublait tant. Elle essayait pourtant de le chasser de ses pensées mais il y revenait toujours. Tant et si bien, qu'un jour elle ne chercha plus à combattre ses sentiments.

Un jour ou l'animation citadine était à son comble, elle osa l'aborder. Enfin, oser est un bien grand mot. Comme elle craignait, les mots ne sortirent pas facilement de sa bouche alors qu'il lui était si simple habituellement se s'armer de son sourire et de douces paroles.

Il s'approchait des marches du Temple scrutant, de son oeil exercé, les badauds alentours. Glissant parmi eux aussi discrètement que la brise légère qui l'accompagnait en cette après midi. Elle se posta face à lui, tentant courageusement de lui adresser un salut totalement détaché afin de ne pas éveiller de soupçons. Ce fut le contraire qui arriva. Elle se glaça sur place, bafouilla un faible "Bonjour" et se senti si ridicule qu'elle aurait préféré ne jamais sortir pour avoir à affronter un tel échec. Lui, fut des plus hautains, la traitant avec le même panache que si elle eut été un vil misérable. Cela la laissa sans voix et prête à fondre en larmes en un instant mais elle sorti sa dernière carte, celle qui lui ressemblait le moins, celle de la froideur. Redressa la tête et affronta son mépris apparent de la manière la plus franche et la plus hautaine qu'elle put. Pourtant, imperceptiblement, elle tremblait derrière son masque. Son dernier rempart pouvant à la fois cacher son regard déjà rempli d'amour pour lui et la protéger de visions le concernant.
Bien que cette première confrontation se passa au plus mal, elle en sorti tout de même avec une première victoire et non des moindre : il connaissait son existence et elle, son nom : Gongbao.

[hivana]

Chapitre 11

La gardienne elfe noire regagna sa chambre non sans mal. La tête bourdonnant de choses incohérentes, s'affala sur son lit et se mit nerveusement à pleurer sans trop savoir pourquoi. Trop d'émotions se bousculaient en elle, trop de gens dans le besoin à secourir en si peu de temps que comptait une journée. Et toujours devoir garder secret cette angoisse incompréhensible au fond d'elle. L'impression que quelque chose de terrible se passait en parallèle de tout cela. Des journées interminables ou elle s'épuisait en magie incantatoire, des missions imposées par les Dieux d'Aden jusqu'à cet elfe noir qu'elle savait être à
la tête d'une organisation plus qu'obscure et qui occupait son coeur contre toute raison.

Mais il lui fallait tenir bon, c'était la son nouveau rôle et il lui fallait l'accepter. Elle se releva avec peine, les membres douloureux et s'assit devant le petit bureau de sa chambre. Prit son grimoire et sa plume d'une main égratignée, et s'étonna un instant de l'état dans lequel elle se trouvait, ayant l'impression qu'elle avait du combattre des armées entières à elle seule. Mais ce devait être impossible, son travail était éprouvant mais loin, très loin d'être dangereux. Alors, d'ou venaient ces marques et ces courbatures ?

Lasse, elle s'endormit sur son pupitre, laissant tomber sa plume sur le plancher, recouvrant de sa joue ses derniers récits ...

LIVRE 2 - Extrait

Mon don de double vue semble me faire défaut. Serait-ce du à mon état de fatigue actuel, je ne sais. Mais je ne dois pas m'en plaindre. Au contraire, je trouvais même cela plutôt gênant que de tout savoir d'un regard. Voir les atrocités derrière le visage de chaque passant m'était trop insupportable. Cependant, j'hésite toujours à ôter ce masque protecteur.

[hivana]

Chapitre 12

LIVRE 2 - Extraits

J'ai retrouvé ce livre. Cela faisait si longtemps que je ne l'ai pris.
J'y ai à peine parlé de lui. De ce premier baiser volé qui fit de moi la femme la plus troublée et la plus heureuse au monde.
De ses paroles que je n'attendais plus.

"Vous serez ma force, Hivana. Pour continuer, j'aurai besoin de vous."

M'avait-il grugée durant tous ces mois passés ?
S'était-il servi de moi ? Je n'arrive même plus à panser la blessure de mon coeur avec nos doux souvenirs. J'ai l'impression qu'ils ne furent que mensonges. Mais je n'arrive toujours pas à comprendre pourquoi.

Je lui ai tout donné : mon coeur, mon corps. La moindre de mes secondes était à lui et maintenant, je suis seule. Sans explication. Le vide de lui tout simplement.

Je l'ai vu avec une autre femme et la, j'ai compris. Tout était brisé.
Alors que la veille il me parlait de nous unir pour toujours. J'ai tout accepté pour lui, jusqu'à redevenir mortelle et abandonner ma fonction de gardienne pour le suivre, le protéger. En fait, c'est plutôt lui qui me protégeait.
Je ne suis rien en ce monde. Sa nouvelle compagne, elle, peut le protéger, pas moi. Et alors que je le hais de tout mon coeur autant que je l'aime encore, j'espère tout de même qu’elle y parviendra.

Je clôture donc ce livre. Tenant au silence pour ne pas me blesser un peu plus, tous ces moments de merveille en sa compagnie. Il semble les avoir oublié, à mon tour.

J'ai pensé à la mort bien souvent ces dernières semaines mais je n'ai pas le courage puis, au hasard d'une rue, j'ai entendu parler d'une chose que j'avais quasiment oubliée. Ces marques sur mon corps lorsque j'étais gardienne. Puis, cet anneau que j'ai offert à Gongbao, cet anneau qu'il m'avait faussement volé pour m'embrasser la première fois. Je le lui avait offert depuis. Tout devint subitement clair ! Depuis ce cadeau, plus de troubles, plus de marques, plus rien !
Il y avait un rapport certain alors j'ai cherché lequel sans rien lui dire. J'ai fini par retrouver ce premier livre qui me parla des ces sept mages qui abusèrent de moi pour leurs noirs desseins.

Un jour, j'ai pénétré en son château et dérobé la bague. Celle ci était la clé de tout. Du malheur d'Irinam a qui j'avais volé sa vie en massacrant sa famille mais aussi celle de bien d'autres.
Je n'étais pas moi même, j'étais manipulée. Et, a chaque fin de ces funestes missions, ma mémoire me faisait défaut.
Cette bague me fit remonter à la source, aux manipulateurs sans scrupules.
J'empruntais alors des épées à Dame Lena. Celle ci, qui m'avait beaucoup aidée matériellement depuis un bon moment, me regarda partir stupéfaite, presque au bord des larmes. Pensant sûrement que jamais je ne reviendrais.
Elle avait raison. Hivana ne reviendra jamais en Aden. En tout cas, plus sous ce nom, plus sous cette douleur.

Maintenant, même si je sais que cela ne rendra pas les morts à leur proches. Même si cela ne me rendra pas mon amour. L'heure de la vengeance et de la mort a sonné.

La mort de sept mages, la mort d'une elfe noire nommée Hivana.


Elle jeta le livre du bord d'une falaise, sorti ses lames, encore un peu lourdes pour elle et eut une dernière pensée pour son amant malgré tout.

"Tu souriais que je ne sache pas me battre. Et bien je vais te prouver le contraire ..."