[bgelfe] Peluli

Ici se trouvent les BGs des héros décédés, paix à leurs âmes.

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[bgelfe] Peluli

Message par Elios » ven. 20 avril 2012 à 19h18

Nom : Lelulaliluli (inventé par Peluli)
Prénom :Peluli
Surnoms :Pel', Pelu, Peluluche, Lulli
Titre : néant
Age :12 années
Sexe :masculin
Race :elfique

Compétences : chant, soins
  • Magie : Peluli peut créer des illusions pour altérer les sens et le jugement
Alignement : Neutre bon
Langues parlées : commun, elfique

Description physique : Sa longue chevelure rosée entoure un minois dont les prunelles mauves reflètent tantôt une douceur prodigue, tantôt le néant opaque conservant le secret de ses rêves. Les robes courtes et légères qu'il peut arborer prononcent son corps gracile. Un élégant serre-cou de dentelle et des bandages serrés dissimulent les éléments susceptibles de trahir toute appartenance à son genre véritable. Ses jambes nues s'achèvent par de petites bottines plates. L'élégance de sa tenue contribue considérablement à son charme désarmant. Au-delà de son absence totale de formes, sa féminité paraît incontestable.
Habillé en garçon, Peluli porte une chemise de couleur écru, ainsi qu'un veston et un pantalon bleus. Ses cheveux sont désormais ramenés en arrière par un ruban mauve nouant un catogan.
Caractère : Sa propension à répondre à la nécessité d'autrui rivalise avec sa vocation de rêveur. Tant qu'on le traite comme la demoiselle qu'il semble être, il s'évertuera à propager sa joie, à moins qu'il ne se soit abîmé en plein songe.
Autres : Peluli est sujet à des crises d'hyperventilation.

Situation financière : humble
Comportement social : docile
Type d’éducation reçue : au ras des pâquerettes
Popularité et/ou influence : la plupart des clercs einhasadiens se rappellent de ses loyaux services
Pensée politique : néant

Croyances :
  • Einhasad : Je la prie quotidiennement
    Gran Kain : Je ne le connais pas.
    Eva : Je la prie quotidiennement.
    Shilen : J'en ai entendu du mal.
    Sahya : Je ne la connais pas.
    Pa’agrio : Je ne le connais pas.
    Maphr : Je la prie quotidiennement.
Relations extérieures :
  • Elfes : Je ne suis pas à l'aise avec eux.
    Humains : Je ne les comprends pas.
    Kamaels : Ils sont beaux avec leurs plumes.
    Nains : Ils sont passionnés.
    Orques : Ils sont violents.
    Sombres : Ils sont intimidants.
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Re: [bgelfe] Peluli

Message par Elios » dim. 22 avril 2012 à 03h17

Mon enterrement

Dans le flux de l'existence, il peut arriver que deux infinis se confrontent. Pareil événement fait du temps une notion bien dérisoire, et assimile la seconde à l'éternité. En l'occurrence, deux magnifiques prunelles mauves s'étaient abandonnées à la contemplation de « l'océan d'en haut ». Les yeux dans les cieux, son balais encore dans les mains, Peluli vivait un rêve éveillé, plongé dans une semi-léthargie des plus appréciables.

—Est-ce que ça va, petite ?

Celui qui avait arraché le jeune elfe au monde des songes était l'un des prêtres en office au temple de Gludin. La main sur son épaule, il lui souriait avec indulgence, son inquiétude rapidement dissipée par la surprise de celui qu'il avait ramené à la réalité.

—Tout va bien ? demanda-t-il.
—Oh, excusez-moi, mon père. Je n'ai pas terminé le nettoyage du parvis.
—À te voir comme ça, tu paraissais en plein commerce avec les puissances divines.
—Je suis bien trop insignifiante pour mériter une telle attention, déclara-t-il dans un léger rire.
—Tu es déjà un ange à nos yeux. Qu'Einhasad te garde.
—Merci, mon père.

L'homme lui frictionna doucement la tête, avant de retourner dans l'église.

Peluli avait pris pour habitude de servir les clercs depuis que le temple de Gludin avait constitué pour lui un refuge. Ce fut en effet entre les murs de cette église que, pour la première fois de sa vie, il s'était senti à l'abri, accepté. Aussi était-il enchanté de se rendre utile en son sein. Et les prêtres étaient ravis de voir leur petite protégée se consacrer fervemment aux multiples tâches qu'ils lui confiaient. Dans une telle harmonie, qui pouvait bien soupçonner cette charmante jeune fille d'être en réalité un garçon qui les avait tous trompés sur son identité ?

À Cefedellen, l'Arbre Mère avait un jour fêté sa naissance par l'apparition de deux bourgeons, un d'argent et un d'or. Ce garçon était en effet né avec une sœur qui lui était sa jumelle. Kokin et Peluli étaient leurs noms. Leur mère, connue pour partager avec les Sombres une inclination prononcée pour le matriarcat, avait tôt fait d'accorder l'intégralité de son attention et de son affection à sa fille. Le garçon fut donc tout naturellement laissé aux bons soins du père qui, tout accaparé qu'il était par ses fonctions professionnelles et par les caprices de son épouse, ne disposa jamais vraiment du temps nécessaire à l'aide au développement de son fils.

Qu'est-ce qui pouvait pousser celle qui l'avait fait naître de favoriser ainsi sa fille, qui paraissait somme toute identique à son frère jumeau, si l'on omettait un infime détail, un élément si négligeable qu'il n'était ni nommé ni visible... Sans doute ne pourrait-on même différencier le frère de la sœur si l'on juxtaposait ces derniers, habillés de la même façon.

Kokin grandit donc seul, savourant les rares fois où il pouvait côtoyer Peluli, ces instants précieux où leur était épargné l'emprise de la génitrice. Les deux enfants se trouvaient alors transportés en un paradis miniature par sa temporalité, qui n'avait pour toute autre limite que celles de leur incroyable imagination. Leur père, alors chargé de les surveiller, croyait voir deux exemplaires de la même personne, car s'il était vrai que le garçon fût délaissé au profit apparent de la fille, aucun d'eux n'était réellement épanoui par cette situation. Peluli se trouvait en effet elle-même étouffée par la forme que prenait la sollicitude de sa mère.

Il arriva hélas qu'un jour, alors qu'ils jouaient vraisemblablement trop près de la Zone Neutre, les deux enfants croisassent la route d'un reptile pour le moins malveillant. Leur père, ayant cultivé l'habitude et assimilé l'ordre de demeurer à bonne distance de sa propre progéniture, fût-ce pour garantir leur sécurité, arriva trop tard pour empêcher l'inévitable de se produire.

Le serpent avait fondu sur Kokin, qui, si sa sœur ne s'était pas interposée, se serait vu administrer un puissant poison. Leur père attrapa l'animal pour l'occire d'un coup de poignard. Mais c'était trop tard pour Peluli. Son frère, qui s'était penché vers elle après que la morsure l'eut fait chuter, ne vit pas le visage horrifié de l'adulte qui avait reconnu le serpent. Ce dernier était du type de ceux dont le venin se révélait terriblement expéditif, même avec les cibles les plus massives.

Transcendé par l'adrénaline que lui octroyait cet instant dramatique, le père conservait une honorable présence d'esprit, et s'affairait d'ores et déjà à mettre en pratique le plan qu'il élaborait au fur et à mesure qu'il dévêtait sa fille, qui n'en avait plus pour bien longtemps à survivre. Il lui avait déjà dégagé le buste lorsqu'il intima à son fils d'une voix qui se voulait ferme :

—Ferme les yeux !

Kokin s'exécuta, ne laissant s'échapper de ses paupières qu'un torrent de larmes, et de sa gorge d'affreux gémissements. Ainsi ne vit-il pas non plus son géniteur lorsque celui-ci planta sa lame dans la gorge de Peluli, avant de lui souffler douloureusement :
—Qu'Eva te guide vers Éternelle Rencontre, car tu ne souffriras plus...

L'enfant désormais unique sentit sur ses épaules les mains de son père, ces mains qui de sa vie ne l'avaient jamais effleuré.

—Garde-toi de les ouvrir pour le moment, lui murmura-t-il. Je vais te donner les vêtements de ta sœur, et t'emmener derrière un arbre, plus loin. Là, je veux que tu les mettes après avoir ôté les tiens. Fais vite, mais n'aie crainte : je viendrai sous peu te rejoindre.

Il fallut un certain moment à Kokin pour œuvrer, tant il était bouleversé par ce qui venait de se produire. Quand son père arriva pour se pencher vers lui, il ne restait pour parfaire la supercherie que le serre-cou à nouer. L'adulte s'en saisit, et avec toute la délicatesse dont peut faire preuve un être magnanime envers son enfant, vint attacher l'accessoire autour du cou de Kokin. Après avoir inspiré profondément, il s'adressa à lui avec gravité :
—À partir de maintenant, ton nom est Peluli et Kokin et ton frère. Répète-le.
—Peluli... Mon nom est... Peluli, hoqueta-t-il.
—Concentre-toi... Je sais que c'est très difficile mais je t'en prie, calme-toi. Répète après moi : « Je m'appelle Peluli. »
—Je m'appelle... Peluli.
—« Kokin est mon frère. »
—Kokin est... mon frère.
—« Je suis une fille. »
—Je suis une... fille.

Kokin essaya de faire ralentir sa respiration, mais ne parvint qu'à émettre un sanglot pathétique.

—À présent dis-moi : qui es-tu ?
—Je suis Peluli, gémit-il.
—Qui ça ?
—Peluli ! Je suis Peluli !
—Qu'est-ce que tu es ? Un garçon ou une fille ?
—Je suis une fille !
—Un garçon ?
—Non ! Je suis une fille ! Je suis une fille et je m'appelle Peluli !

L'adulte étreignit son enfant pour la première et dernière fois, déchiré par le désarroi dont celui-ci était victime. Kokin... Non, Peluli serra la chemise de son père, et demeura ainsi, pleurant, gémissant, pendant ce qui parut aux deux elfes une éternité.

C'est ainsi que Peluli grandit durant la seconde moitié de son existence en tant que fille. Une fille aimée et choyée par sa mère, qui se trouva parfaitement leurrée lorsque son fils se présenta à elle pour la première fois. Cette mère était donc aveugle au point d'être incapable de percevoir l'immense tristesse qui ravageait l'intérieur de celui qui avait par ailleurs remplacé sa fille. Sans le savoir, elle se comporta indifféremment avec un inconnu en deuil qu'avec celle sur laquelle son regard s'est toujours porté. Et pourquoi pas, après tout ? Cet enfant était physiquement identique, et il avait même la voix et le caractère de sa sœur, qui reposait désormais sous terre au nom de Kokin.

La succession des années rapprochait davantage Peluli de la puberté, et donc de l'âge où une demoiselle se doit d'acquérir certaines formes. Le père, qui s'inquiétait de plus en plus du sort de Peluli, fut un jour convoqué par son épouse qui entretenait une toute autre préoccupation. Comme sa fille allait prochainement admirer son douzième printemps, elle avait rassemblé toute sa perspicacité pour en déduire que son fils en ferait autant. À ses yeux, il était temps pour ce dernier d'être assujetti sous sa servitude. Le mari dut alors lui en annoncer le décès qui datait déjà de six années, avant de se faire expulser de la chambre à grands cris.


—Quel incapable ! pesta la femme. Un homme comme il y en a tant !

Elle caressa la chevelure de Peluli, assise à ses côtés.

—Bon débarras, poursuivit-elle. De toute façon, ce n'était qu'un déchet et je ne l'ai jamais aimé. Toi seule, ma fille, mérite mon affection. Si cette vermine est morte, tant mieux, j'en suis bien heureuse. Je suis seulement déçue de ne pas avoir pu assister à ça. Sais-tu pourquoi je l'ai appelé Kokin ? Parce que c'est un coquin et rien de plus ! C'est un mâle, et donc un mal, et c'est un grand bien qu'il ne soit plus.

Chaque mot renforçait la compression du cœur déjà convalescent de Peluli. Le petit elfe avait interrompu sa respiration afin de retenir ses larmes. Mais cet assaut de haine à son encontre rendait son esprit fou. Alors que ses sens se brouillaient, il se mit à perdre pied et à suffoquer. Il s'effondra sous le regard catastrophé de sa génitrice, haletant misérablement.

Plusieurs jours après cet événement, Peluli reçut la visite de son père en l'unique endroit où il était certain que la mère ne pût s'y trouver simultanément : les latrines. Il avait en effet pris soin de s'y aménager un accès qui, tout limité qu'il était, pouvait lui permettre de communiquer avec son fils. Ce fut donc par l'intermédiaire d'un orifice mural qu'il s'adressa à lui en ces termes :

—Peluli... N'aie pas peur, elle ne peut pas nous entendre ici... Peluli, je suis désolé pour tout ce que je t'ai fait subir. J'aurais voulu être un vrai père pour toi, et non pas une marionnette inerte... Je ne mérite pas ton pardon, ni pour avoir échoué à la protection de ta sœur et toi, ni pour t'avoir fait endosser ce rôle durant tout ce temps... Peluli, pour tes douze ans, et pour te permettre de commencer enfin à vivre, je tiens à t'offrir deux choses. La première est une bourse contenant un maigre pécule que j'ai pu amasser à l'insu de ta mère. La seconde est un outil qui m'a beaucoup servi, et que je tiens de mon propre père... Tu le reconnaîtras peut-être, il a plus de mille usages, et je suis certain que tu sauras toi-même l'utiliser à bon escient. Je te demande de le cacher sur toi, là où personne n'ira le trouver. Lorsqu'il t'arrivera de perdre espoir ou de ne plus savoir quoi faire, rappelle-toi que tu possèdes cet outil. Il t'aidera, quel que soit ton but... Adieu, Peluli. Je te laisse le choix mais je sais que tu feras le bon, et que nous ne nous reverrons donc plus. Retourne à l'arbre qui t'a vu devenir une fille. Mes humbles présents s'y trouvent. Qu'Eva te protège, Peluli...

L'enfant, qui avait écouté son père en silence, dut consacrer un long moment à la digestion de ce qu'il venait d'entendre. Bien entendu, il suivit les ultimes recommandations paternelles, et rejoignit directement le fameux arbre après avoir quitté les lieux d'aisance. Là, il trouva une escarcelle de cuir, ainsi qu'un poignard. Peluli se saisit délicatement de l'outil et le considéra quelques secondes. Lui-même ignorait pourquoi il fondit en larmes alors. Il lui semblait que la simple vue de cette lame lui perçait le cœur de part en part. Ce qui était sûr, ce que quelque chose en lui se brisa en cet instant dont il se souviendrait toute sa vie durant.
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Re: [bgelfe] Peluli

Message par Elios » dim. 22 avril 2012 à 03h32

Les arbres étaient en pleines célébrations ce jour-là. En effet, ils se trouvaient tous entraînés dans une dans une danse qui les voyait se synchroniser harmonieusement au rythme du vent. Le riche tableau que constituaient les innombrables feuilles, qui, pareilles à des touches de peinture sur une toile impressionniste, paraissaient pourtant toutes pourvues d'une conscience et d'une volonté individuelles tant elles se mouvaient de façon imprévisible, exerçait sur Peluli un envoûtement des plus efficaces.

Dans un silence solennel, toutes les feuilles s'envolèrent pour se changer en étoiles. L'éternelle étendue ténébreuse que formait « l'océan d'en haut » à l'état nocturne afficha alors un faisceau lumineux regroupant l'intégralité de ces astres. Le petit elfe l'était bien plus encore face à pareille majesté.
Il suivit de ses yeux que l'émotion avait humectés la structure rayonnante si précise et pourtant si effilée qu'elle semblait former une voie dont les Dieux seuls pouvaient connaître l'issue, pour peu qu'elle existât. Si ce sentier n'aboutissait pas, peut-être s'agissait-il d’Éternelle Rencontre ?

Une mélodie parvint jusqu'aux oreilles de l'enfant. Il la reconnut immédiatement, sa sœur la chantait jadis. Pour Peluli, cette composition musicale était une source de joie comme de peine, car elle évoquait malgré sa beauté la mort de
la vraie Peluli.

À cette pensée, toutes les étoiles se fondirent en larmes dont l'accumulation formait une immense cascade. Seule une constellation demeurait, dessinant la silhouette de sa mère. Cette figure s'anima pour ressembler davantage à l'originale, et admirer la détresse de son fils parmi les eaux au fond desquelles il se débattait vainement.

Comme la dernière parcelle d'espoir menaçait de mourir à son instar, le petit elfe vit apparaître dans sa main le poignard de son père. Cet héritage salvateur, une fois brandi, fendit l'océan lacrymal. En s'y soustrayant, Peluli fut livré au vide abyssal de ténèbres inconnues...
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Re: [bgelfe] Peluli

Message par Elios » mar. 24 avril 2012 à 16h04

Cet outil que je dissimule

La curiosité amena Peluli de Gludin à Dion. Si son zèle se révéla fort apprécié durant ces derniers jours, on lui recommanda tout de même d'aller chercher occupation plus honorable ailleurs, ainsi qu'un logement. Or, la détresse de Dion constituait une source inépuisable de demande d'aide. Il s'agissait d'une opportunité providentielle pour le petit elfe.

Par « porter assistance au temple », il ne s'attendait cependant pas à ce que l'édifice lui-même nécessitât un véritable secours, aussi se demandait-il à qui d'autre que les prêtres il pourrait s'adresser. Mais à peine eut-il foulé le sol dionnais qu'il rencontra celle qui allait combler ses attentes.

Un travail et un toit : voilà ce que sœur Enaelle lui offrit de bon gré. Peluli fournirait désormais en eau potable les ouvriers assignés à la reconstruction du temple, et logerait temporairement au dispensaire de fortune, à l'étage. Tout s'était passé dans une hâte semblable à celle qu'un rêve pouvait présenter. Finalement, tout était peut-être possible dans le monde réel ?

Le dispensaire n'était autre que la demeure d'Enaelle, que la nécessité lui avait voulu reconvertir. Ainsi le petit elfe et l'humaine dormiraient-ils à quelques mètres l'un au-dessus de l'autre. Quelque chose à faire, quelqu'un à aimer, et quelque part où aller : que demander de plus ?

Aux dires d'une certaine Azzura, qui lui était congénère, Peluli devait recevoir davantage : un enseignement qui pourrait assurer son bon développement. De la bouche de pareille elfe, il s'agissait de la
bonne éducation, concentrée en trois imposants ouvrages traitant de la culture elfique, qui trouvèrent leur place sur le bureau de sa nouvelle chambre, fût-elle temporaire, rapidement rejoints par un précis d'anatomie, science dont elle souhaitait apprendre les secrets. Ce fut encore une fois Enaelle qu'elle dut remercier pour le lui avoir fourni.

Avide de découvertes, le petit elfe se mit bien vite à étudier la structure et les organes des êtres vivants, rassemblant toute la concentration et l'assiduité dont il pouvait faire preuve. À la lumière d'une lanterne que sœur Enaelle avait substitué à une bougie pour le bien des yeux de sa tendre protégée, cette dernière s'adonnait à une lecture attentive.


Des os, des muscles, beaucoup de rouge, tout un complexe réservant encore bien des mystères aux plus érudits. Peluli se trouvait bien confus. « Comment peut-on receler tout ceci en nous ? C'est horrible. Et si cela casse, est-ce que tout se détraque ? C'est peut-être ça, mourir... Mais quel est le rapport avec les armes ? Et se battre, est-ce bien apprendre à réaliser des miracles ? Ayen a dit que les miracles passaient par nous. La réponse se trouve peut-être là-dedans... »

L'enfant se souvint alors de la mimique d'Enaelle vis-à-vis d'Azzura concernant l'enseignement que l'humaine serait en mesure de pourvoir : « Ce sera limité. » De quoi parlait-on exactement ? « Peluli veut apprendre à soigner, et à se battre. » Des miracles, il avait déjà essayé d'en précipiter la production. Lorsque sœur Enaelle était revenue au dispensaire avec de terribles blessures au bras, Peluli était monté dans sa nouvelle chambre et s'était saisi du poignard de son père. « On peut s'en servir pour faire du mal à autrui, où pour protéger ceux que l'on aime » avait déclaré l'humaine en parlant de son épée. « Mille usages ? Hmmm... Non, mais un couteau peut être utilisé de beaucoup plus de façons. » Cet outil dont avait parlé le père de Peluli devait certainement être un couteau. Et s'il s'agissait bel et bien d'une arme, c'est que l'on pouvait s'en servir pour protéger les êtres précieux. Le petit elfe s'était donc acharné à prier en empoignant la lame de son héritage paternel. « Lorsqu'il t'arrivera de perdre espoir ou de ne plus savoir quoi faire, rappelle-toi que tu possèdes cet outil. Il t'aidera, quel que soit ton but... » Dans son recueillement où le jugement se trouvait altéré par l'émotion, Peluli ne s'était pas aperçu que ses mains saignaient abondamment. Aussi s'était-il finalement endormi dans des draps souillés par le sang et les larmes.
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Re: [bgelfe] Peluli

Message par Elios » dim. 6 mai 2012 à 12h47

La magie du mensonge

Lelulaliluli. Tel était l'héritage que la vraie Peluli fit à Kokin. Lelulaliluli, la chanson qui rend heureux. La chanson que lui chantait sa sœur jadis, et qu'il chantait désormais lui-même. Lelulaliluli, la chanson qui rend les gens heureux, se trouvait ainsi altérée par la profonde tristesse qu'éprouvait la nouvelle Peluli à l'égard de sa sœur jumelle décédée. Lelulaliluli, la chanson qui rend heureux ceux qui l'entendent, pénétrait les oreilles de ses auditeurs comme le désarroi pénétrait leur cœur. Lelulaliluli, tel était le nom que Peluli s'était approprié.

Cette chanson utilisait des paroles inspirées de la langue elfique, sans pour autant correspondre au moindre mot. Elle se chantait certes, mais ne ressemblait pas toujours à une mélodie. De la bouche de Peluli, Lelulaliluli avait donc le pouvoir de rendre ceux qui l'écoutaient terriblement tristes. Quelle magnifique chanson cependant, si belle et intrinsèquement joyeuse. Mais Peluli Lelulaliluli ne cachait pas que son genre véritable, il recelait également un puissant pouvoir encore incontrôlé : le pouvoir de mentir.

Cette aptitude qu'il avait bien vite dû apprendre à développer avec son travestisme se trouvait ancrée jusque dans ses aspirations magiques. Tout comme il se faisait passer pour une fille, il parvenait donc aisément à teindre Lelulaliluli d'un voile de malheur. En usant de cette voie magique, il n'était plus question uniquement de sons ; l'intégralité des sens pouvait subir un assaut d'illusions.

Des illusions, c'était le nom que leur avait donné Eriahlis, la nouvelle amie et sœur de Peluli. Car Peluli choisissait sa famille, à l'instar de cette orpheline aux pouvoirs ardents non maîtrisés, ces mêmes pouvoirs qui l'avaient forcée à changer régulièrement d'établissement et de foyer. Ces deux filles nourrissaient un objectif commun : apprendre à user de leur puissance magique.

Pour l'elfe, les songes semblaient être le lieu de dissimulation de ce secret. Les rêves qu'elle formulait en plein état d'éveil, ou de semi-léthargie. Plus précisément, c'était cet état frictionnel entre la concentration et l'imagination, entre le monde réel et le monde onirique, qu'il lui fallait étudier. Cet état, elle parvenait à y entrer sans peine avec le chant. Tant elle fouillait dans son cœur pour y trouver non seulement les mots, mais aussi les émotions nécessaires à la réalisation de son œuvre, tant elle agissait bel et bien dans la réalité avec ses cordes vocales et son flux magique sur la sensibilité d'autrui.

Pareilles facultés n'empêchèrent cependant pas l'inévitable de se produire. Oui, quelqu'un avait découvert l'un de ses secrets, le plus précieux...
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Re: [bgelfe] Peluli

Message par Elios » jeu. 17 mai 2012 à 10h24

Vices cachés

Elle dut finalement affronter la terrible épreuve de la confession. Par deux fois, elle dut avouer qui il était. Pour autant, c'était toujours un secret, n'est-ce pas ? Nul ne semblait le savoir en dehors de sa nouvelle famille, après tout. Quatre personnes, cela ne fait pas une grande différence, du moins une fois la vérité dévoilée. En revanche, le moindre mensonge changeait tout. Et l'on ne mentait pas à sa famille.

Aux yeux du jeune elfe, il n'y avait pourtant qu'une issue à pareille culpabilité : la servitude fervente et absolue. Après les avoir tant trompés et blessés, il se devait de leur accorder la plus fidèle et la plus stricte des obédiences. Aussi surveilla-t-elle ses manières pour se montrer irréprochable. Conserver la même position courtoise pour rappeler son statut, s'incliner régulièrement, ne prendre la parole que si l'on lui accordait, à moins que s'exprimer oralement n'entrât dans quelque dispositif de complaisance vis-à-vis de ceux qu'il aimait tant. Pour peu, elle les aurait appelés « maîtres ».

Mais sa famille en décida autrement. « Par les Déesses, Peluli, tu n'es pas une servante ! » lui avait dit Enaelle. « La dernière fois que j'ai voué mon existence à quelqu'un, j'ai obtenu les deux cicatrices que tu as pu voir, et un an et demi de convalescence » avait surenchéri Aldo. Pour celui qui était né dans l'unique dessein de servir sa génitrice, il relevait de la fable que l'on se montrât si gentil avec lui, surtout après s'être montré si peu honorable.

« Je pense que tu es une petite fille un peu perdue, et un peu menteuse. Mais tu es aussi une excellente apprentie, es tu es foncièrement gentille. » Tels furent les propos d'Enaelle.

Une fille ? Pourquoi pas... Mais pour Aldo qui avait toujours rêvé d'un digne hériter masculin, que devait penser ce jeune travesti ? La propre mère du petit Kokin avait voulu sa mort, et voilà que l'on attendait de lui qu'il fût ni plus ni moins que ce qu'il était intrinsèquement. Sa nouvelle famille lui laissait le choix, mais quelle issue était la bonne ?

« Ne te presse pas. Tu as le temps. »

Soit... Peut-être allait-il finalement goûter aux joies de son vrai genre... Ne serait-ce que pour essayer. Après tout, il était libre. Libre de choisir.
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