Il faisait frais ce soir-là. Le ciel était parsemé de bandes de nuages cotonneux, qui masquaient partiellement un ciel de crépuscule. Sous la ramure des arbres de la forêt runhirrim, le silence régnait. Un silence total, de ceux qui vous font vous sentir en danger à chaque instant, de ceux qui vous informent que vous êtes désormais seul face à ce qui pourrait survenir.
Même l’odeur des pins et les derniers rayons de soleil qui filtraient la frondaison ne parvenaient pas à atténuer cette sensation de danger omniprésent. Un corbeau s’envola, poussant son cri rauque, et le silence retomba.
Il retira son épée ancestrale d’un gigantesque abdomen arachnéen et lui donna un coup sec et mesuré pour enlever un maximum de sécrétions et de sang. Son regard rouge balaya les alentours. Tout autour, les cadavres se comptaient par dizaines, qu’ils soient arachnéens, zombies ou animaux ; tranchés en deux ou criblés de carreaux, entre autres choses. Il pinça les lèvres dans un sifflement de dédain et fixa son épée dans son dos, à côté de son unique aile immaculée.
Un bruit léger lui fit tourner la tête alors qu’une voix féminine, tendue, se faisait entendre.
— Naler.
— Oui, je le sens aussi.
— Ça ne change rien au fait que cette magie ne devrait pas être si puissante. Rentrons.
— Je te trouve bien inquiète.
— Tu l’es autant que moi, alors tais-toi un peu.
Il servit un rapide sourire à son équipière, qu’elle ignora. Tout en faisant volte-face, elle replaça une mèche de cheveux blancs dans son chignon, un peu malmené par leur petite danse avec les dizaines d’araignées enragées qui leur était tombées dessus. Ses yeux pourpres exprimaient la perplexité, tandis que sa main directrice ne s’éloignait jamais de plus de quelques centimètres du manche de son arbalète.
Naler lui emboîta le pas, quittant le charnier qu’ils avaient créé tous deux, aux aguets. La tension du combat était retombée, en partie, mais il sentait toujours les résidus de magie noire parcourir son corps. Il ne leur avait fallu que quelques minutes à plein régime, comme toujours lorsque ces deux soldats surentraînés devaient user de leurs talents. Les carreaux et les pièges de Kheza avaient affaibli une grande partie des créatures, lui laissant le soin de les achever rapidement. Mais il leur restait toutefois une étrange sensation de malaise.
— La moindre bestiole rencontrée dans ces bois était plus agressive que d’habitude. Qu’est-ce que ça signifie, selon toi, Kheza ?
— Ça signifie que nous devons faire notre rapport tout de suite. Nous n’avons pas à tirer de conclusions, tu le sais.
— Alors il va falloir marcher plus vite.
Elle n’ajouta rien. Nul besoin d’ailleurs : ils savaient tous deux à quel point la situation était étrangement exceptionnelle. L’agitation des bois qui jouxtaient leur cité n’avait jamais été aussi particulière que ce soir-là ; et pourtant, elle recelait des créatures dont il valait mieux ne pas approcher en temps normal. Cela ne présageait pas du bon.
Ils puisèrent tous les deux dans les capacités de leur peuple, et quelques secondes plus tard, ils filaient tous deux comme le vent, courant à travers le bois.
La petite Gabrielle observait le ciel étoilé depuis le balcon de sa chambre de l’école de Magie d’Einhovant. On lui avait donné des devoirs d’astronomie plutôt compliqués, et elle tentait de comprendre toutes les notions qu’on lui avait inculquées dans la journée. Ah, si elle était née avec du sang d’elfe comme son amie Leäwen, elle pourrait avoir autant de facilités qu’elle, même si les professeurs lui répétaient souvent qu’elle avait un potentiel qu’elle n’exploitait pas encore. L’enfant fit une moue boudeuse, les yeux toujours portés sur les étoiles. Qu’est-ce que ça voulait dire, exploiter son potentiel, pour une petite fille de 7 ans, comme elle ? Rien du tout.
De toute façon, elle ne parvenait pas à travailler ce soir. Elle se sentait nauséeuse, mal à l’aise ; si elle avait écouté ce que son corps et son esprit lui dictaient, elle serait déjà tapie dans un recoin des souterrains de l’édifice. Mais son côté rationnel l’empêchait d’obéir à ce genre de pulsions. Elle n’était pas une peureuse.
Soudain, elle tomba à genoux avec un cri étouffé, les yeux écarquillés de terreur. Une force magique immense et maléfique venait de se dévoiler. Mais elle ne pouvait quitter des yeux le ciel, où d’étranges lueurs spectrales naissaient au loin, sur l’horizon. Un cri d’horreur passa ses lèvres alors qu’un professeur faisait irruption dans sa chambre pour la mettre à l’abri. Lorsqu’il la prit dans ses bras pour l’emporter, elle se débattit, obnubilée par le spectacle qui se déroulait sous leurs yeux. De grands fils de lumière s’étendaient progressivement vers un point précis de l’atmosphère ; un sifflement affreux les obligea à se boucher les oreilles et donna des frissons à l’enfant.
Le professeur la serra contre lui en la protégeant de ses bras, mais le phénomène ne s’arrêtait pas. De même que le sifflement ; on aurait dit des milliers de cris d’agonie, mais ne provenant pas de voix humaines. Les trainées de lumière se concentraient toujours, formant une sphère de plus en plus lumineuse et de plus en plus énorme. Un tremblement de terre se mit alors à secouer le monde comme s’il voulait en finir avec lui ; Gabrielle et son professeur furent jetés à terre.
Un cri de terreur échappa de nouveau à la fillette, alors qu’elle levait les yeux vers un ciel rouge sang, tandis que le monde continuait de trembler. Elle sentait la magie noire s’infiltrer partout, même en elle, à partir de cette boule d’énergie qui les surplombait de toute sa hauteur, et qui semblait s’éteindre peu à peu. Bientôt, le tremblement de terre se calma, laissant ceux qui avaient vue sur le ciel découvrir une seconde lune, funestement ornée du symbole de Shilen.
— Nos ennemis auraient-ils vaincu ... ? Déplora le professeur dans un murmure.
L’enfant ne releva pas, pleurant toutes les larmes de son petit corps. Ils sursautèrent tous deux lorsqu’un coup de tonnerre retentit, et que le ciel se couvrit de nuages noirs à une vitesse surnaturelle. Gabrielle jura avoir entendu un rire féminin retentir dans le ciel. Et soudain, une pluie tiède se mit à tomber.
Le professeur eut un mouvement de recul alors que la fillette hurlait de nouveau, les yeux fixés sur ses mains, cette fois. Elles se teintaient petit à petit d’un liquide épais et sombre. Gabrielle s’évanouit.
Il pleuvait du sang.
La peau verte de l’Orc se teintait doucement de rouge alors qu’il s’extirpait avec difficulté de l’entrée d’un temple souterrain. Une respiration bruyante se fit entendre à côté de lui, alors qu’un nain émergeait de l’eau tiède qui dissimulait l’entrée dudit temple.
— Qu’est-ce qui vient d’se passer ? Fit le nain. On a failli y laisser not’ peau !
— J’en sais rien.
— Comment ça t’en sais rien, bougre d’Orc ? Par Maphr, comment une catacombe de cette taille a pu s’vider aussi rapidement d’ses Lilims ?
— Encore un coup d’la Déchue, moi c’est tout c’que j’ai à en dire.
— Et comment tu pourrais l’savoir ? Et puis c’est quoi c’te pluie bizarre, sacrebleu ?
L’Orc resta un moment silencieux, encore sous le choc de ce qui venait de se passer. Entre le tremblement de terre, la lumière aveuglante, les hurlements des Lilims et maintenant cette pluie, il ne pouvait que demander instamment à Pa’agrio de la protéger, lui et son collègue mercenaire.
Le Nain se mit soudain à cracher ses tripes au sol. Lorsqu’il se retourna pour voir ce qui lui arrivait, l’Orc demanda à nouveau à Pa’agrio de les protéger : derrière la colline et au travers des arbres qui dissimulaient l’entrée de la catacombe qu’ils venaient d’explorer, une lune ornée du symbole de Shilen venait d’apparaître.
— Par les Dieux, qu’est-ce que tu nous fais ? C’est pas l’moment d’tomber malade.
— Mais c’est du sang, c’te pluie, bougre d’aveugle, du maudit sang !
— Raison d’plus pour déguerpir. Mate un peu l’ciel. Quelque chose me dit qu’on d’vrait pas rester ici plus longtemps.
— Mouais, t’as raison ... on abandonne le contrat, alors ?
Avant même que l’Orc puisse répondre, un brouillard irrespirable tomba alors sur eux, amenant avec lui des créatures aux yeux emplis de folie. Il était temps de partir.
Le tour de garde des Sentinelles de Shel’Oloth fut mouvementé cette nuit-là. Emplies du sentiment que leur Déesse Mère avait remporté une bataille significative, bien que sans yeux pour admirer sa victoire, les gardiennes des entrées du village sentirent que quelque chose avait changé aux alentours du village. Un changement autre qu’une nouvelle force qui parcourait leurs membres, autre que la soudaine vie revenue au village, autre que les nombreuses messes noires qui emplissaient maintenant le temple de chants.
Une force ténébreuse et différente les appelait inexorablement.
Elles firent quérir une prêtresse, qui arriva accompagnée de ses protecteurs, et les suivit jusqu’au lieu d’où provenait l’anomalie. La prêtresse retint une exclamation admirative, mais ne put s’empêcher de déclamer quelques remerciements à Shilen. Une bien étrange fontaine, emplie d’un sang au pouvoir puissant, se trouvait maintenant sur les terres sombres. Incapables de déterminer qui l’avait construite, les Elfes Noirs constatèrent cependant rapidement l’effet de ce sang sur les créatures et la nature environnante.
De nombreuses expérimentations se succédèrent, pour tenter de comprendre la nature du cadeau que leur avait fait leur Déesse. Il s’avéra que quelques gouttes suffisaient pour rendre fou un être vivant, ou corrompre sa nature. La flore déjà si particulière de leurs terres n’en resplendissait que mieux, exceptés les arbres encore en bonne santé qui poussaient çà ou là.
Sa provenance était également un mystère. Nombre de personnes s’accordaient pour dire que ce sang était celui des morts, celui qui avait imprégné la terre au cours de ces millénaires. D’autres soutenaient que ce sang était celui de Shilen elle-même offert à ses enfants comme une arme contre ceux qui essayaient de la maintenir enfermée.
Mais Ses enfants veillaient dans l’ombre, et réussiraient à la libérer, tôt ou tard. En attendant, le combat de la Lumière et des Ténèbres reprendrait.
Même l’odeur des pins et les derniers rayons de soleil qui filtraient la frondaison ne parvenaient pas à atténuer cette sensation de danger omniprésent. Un corbeau s’envola, poussant son cri rauque, et le silence retomba.
Il retira son épée ancestrale d’un gigantesque abdomen arachnéen et lui donna un coup sec et mesuré pour enlever un maximum de sécrétions et de sang. Son regard rouge balaya les alentours. Tout autour, les cadavres se comptaient par dizaines, qu’ils soient arachnéens, zombies ou animaux ; tranchés en deux ou criblés de carreaux, entre autres choses. Il pinça les lèvres dans un sifflement de dédain et fixa son épée dans son dos, à côté de son unique aile immaculée.
Un bruit léger lui fit tourner la tête alors qu’une voix féminine, tendue, se faisait entendre.
— Naler.
— Oui, je le sens aussi.
— Ça ne change rien au fait que cette magie ne devrait pas être si puissante. Rentrons.
— Je te trouve bien inquiète.
— Tu l’es autant que moi, alors tais-toi un peu.
Il servit un rapide sourire à son équipière, qu’elle ignora. Tout en faisant volte-face, elle replaça une mèche de cheveux blancs dans son chignon, un peu malmené par leur petite danse avec les dizaines d’araignées enragées qui leur était tombées dessus. Ses yeux pourpres exprimaient la perplexité, tandis que sa main directrice ne s’éloignait jamais de plus de quelques centimètres du manche de son arbalète.
Naler lui emboîta le pas, quittant le charnier qu’ils avaient créé tous deux, aux aguets. La tension du combat était retombée, en partie, mais il sentait toujours les résidus de magie noire parcourir son corps. Il ne leur avait fallu que quelques minutes à plein régime, comme toujours lorsque ces deux soldats surentraînés devaient user de leurs talents. Les carreaux et les pièges de Kheza avaient affaibli une grande partie des créatures, lui laissant le soin de les achever rapidement. Mais il leur restait toutefois une étrange sensation de malaise.
— La moindre bestiole rencontrée dans ces bois était plus agressive que d’habitude. Qu’est-ce que ça signifie, selon toi, Kheza ?
— Ça signifie que nous devons faire notre rapport tout de suite. Nous n’avons pas à tirer de conclusions, tu le sais.
— Alors il va falloir marcher plus vite.
Elle n’ajouta rien. Nul besoin d’ailleurs : ils savaient tous deux à quel point la situation était étrangement exceptionnelle. L’agitation des bois qui jouxtaient leur cité n’avait jamais été aussi particulière que ce soir-là ; et pourtant, elle recelait des créatures dont il valait mieux ne pas approcher en temps normal. Cela ne présageait pas du bon.
Ils puisèrent tous les deux dans les capacités de leur peuple, et quelques secondes plus tard, ils filaient tous deux comme le vent, courant à travers le bois.
La petite Gabrielle observait le ciel étoilé depuis le balcon de sa chambre de l’école de Magie d’Einhovant. On lui avait donné des devoirs d’astronomie plutôt compliqués, et elle tentait de comprendre toutes les notions qu’on lui avait inculquées dans la journée. Ah, si elle était née avec du sang d’elfe comme son amie Leäwen, elle pourrait avoir autant de facilités qu’elle, même si les professeurs lui répétaient souvent qu’elle avait un potentiel qu’elle n’exploitait pas encore. L’enfant fit une moue boudeuse, les yeux toujours portés sur les étoiles. Qu’est-ce que ça voulait dire, exploiter son potentiel, pour une petite fille de 7 ans, comme elle ? Rien du tout.
De toute façon, elle ne parvenait pas à travailler ce soir. Elle se sentait nauséeuse, mal à l’aise ; si elle avait écouté ce que son corps et son esprit lui dictaient, elle serait déjà tapie dans un recoin des souterrains de l’édifice. Mais son côté rationnel l’empêchait d’obéir à ce genre de pulsions. Elle n’était pas une peureuse.
Soudain, elle tomba à genoux avec un cri étouffé, les yeux écarquillés de terreur. Une force magique immense et maléfique venait de se dévoiler. Mais elle ne pouvait quitter des yeux le ciel, où d’étranges lueurs spectrales naissaient au loin, sur l’horizon. Un cri d’horreur passa ses lèvres alors qu’un professeur faisait irruption dans sa chambre pour la mettre à l’abri. Lorsqu’il la prit dans ses bras pour l’emporter, elle se débattit, obnubilée par le spectacle qui se déroulait sous leurs yeux. De grands fils de lumière s’étendaient progressivement vers un point précis de l’atmosphère ; un sifflement affreux les obligea à se boucher les oreilles et donna des frissons à l’enfant.
Le professeur la serra contre lui en la protégeant de ses bras, mais le phénomène ne s’arrêtait pas. De même que le sifflement ; on aurait dit des milliers de cris d’agonie, mais ne provenant pas de voix humaines. Les trainées de lumière se concentraient toujours, formant une sphère de plus en plus lumineuse et de plus en plus énorme. Un tremblement de terre se mit alors à secouer le monde comme s’il voulait en finir avec lui ; Gabrielle et son professeur furent jetés à terre.
Un cri de terreur échappa de nouveau à la fillette, alors qu’elle levait les yeux vers un ciel rouge sang, tandis que le monde continuait de trembler. Elle sentait la magie noire s’infiltrer partout, même en elle, à partir de cette boule d’énergie qui les surplombait de toute sa hauteur, et qui semblait s’éteindre peu à peu. Bientôt, le tremblement de terre se calma, laissant ceux qui avaient vue sur le ciel découvrir une seconde lune, funestement ornée du symbole de Shilen.
— Nos ennemis auraient-ils vaincu ... ? Déplora le professeur dans un murmure.
L’enfant ne releva pas, pleurant toutes les larmes de son petit corps. Ils sursautèrent tous deux lorsqu’un coup de tonnerre retentit, et que le ciel se couvrit de nuages noirs à une vitesse surnaturelle. Gabrielle jura avoir entendu un rire féminin retentir dans le ciel. Et soudain, une pluie tiède se mit à tomber.
Le professeur eut un mouvement de recul alors que la fillette hurlait de nouveau, les yeux fixés sur ses mains, cette fois. Elles se teintaient petit à petit d’un liquide épais et sombre. Gabrielle s’évanouit.
Il pleuvait du sang.
La peau verte de l’Orc se teintait doucement de rouge alors qu’il s’extirpait avec difficulté de l’entrée d’un temple souterrain. Une respiration bruyante se fit entendre à côté de lui, alors qu’un nain émergeait de l’eau tiède qui dissimulait l’entrée dudit temple.
— Qu’est-ce qui vient d’se passer ? Fit le nain. On a failli y laisser not’ peau !
— J’en sais rien.
— Comment ça t’en sais rien, bougre d’Orc ? Par Maphr, comment une catacombe de cette taille a pu s’vider aussi rapidement d’ses Lilims ?
— Encore un coup d’la Déchue, moi c’est tout c’que j’ai à en dire.
— Et comment tu pourrais l’savoir ? Et puis c’est quoi c’te pluie bizarre, sacrebleu ?
L’Orc resta un moment silencieux, encore sous le choc de ce qui venait de se passer. Entre le tremblement de terre, la lumière aveuglante, les hurlements des Lilims et maintenant cette pluie, il ne pouvait que demander instamment à Pa’agrio de la protéger, lui et son collègue mercenaire.
Le Nain se mit soudain à cracher ses tripes au sol. Lorsqu’il se retourna pour voir ce qui lui arrivait, l’Orc demanda à nouveau à Pa’agrio de les protéger : derrière la colline et au travers des arbres qui dissimulaient l’entrée de la catacombe qu’ils venaient d’explorer, une lune ornée du symbole de Shilen venait d’apparaître.
— Par les Dieux, qu’est-ce que tu nous fais ? C’est pas l’moment d’tomber malade.
— Mais c’est du sang, c’te pluie, bougre d’aveugle, du maudit sang !
— Raison d’plus pour déguerpir. Mate un peu l’ciel. Quelque chose me dit qu’on d’vrait pas rester ici plus longtemps.
— Mouais, t’as raison ... on abandonne le contrat, alors ?
Avant même que l’Orc puisse répondre, un brouillard irrespirable tomba alors sur eux, amenant avec lui des créatures aux yeux emplis de folie. Il était temps de partir.
Le tour de garde des Sentinelles de Shel’Oloth fut mouvementé cette nuit-là. Emplies du sentiment que leur Déesse Mère avait remporté une bataille significative, bien que sans yeux pour admirer sa victoire, les gardiennes des entrées du village sentirent que quelque chose avait changé aux alentours du village. Un changement autre qu’une nouvelle force qui parcourait leurs membres, autre que la soudaine vie revenue au village, autre que les nombreuses messes noires qui emplissaient maintenant le temple de chants.
Une force ténébreuse et différente les appelait inexorablement.
Elles firent quérir une prêtresse, qui arriva accompagnée de ses protecteurs, et les suivit jusqu’au lieu d’où provenait l’anomalie. La prêtresse retint une exclamation admirative, mais ne put s’empêcher de déclamer quelques remerciements à Shilen. Une bien étrange fontaine, emplie d’un sang au pouvoir puissant, se trouvait maintenant sur les terres sombres. Incapables de déterminer qui l’avait construite, les Elfes Noirs constatèrent cependant rapidement l’effet de ce sang sur les créatures et la nature environnante.
De nombreuses expérimentations se succédèrent, pour tenter de comprendre la nature du cadeau que leur avait fait leur Déesse. Il s’avéra que quelques gouttes suffisaient pour rendre fou un être vivant, ou corrompre sa nature. La flore déjà si particulière de leurs terres n’en resplendissait que mieux, exceptés les arbres encore en bonne santé qui poussaient çà ou là.
Sa provenance était également un mystère. Nombre de personnes s’accordaient pour dire que ce sang était celui des morts, celui qui avait imprégné la terre au cours de ces millénaires. D’autres soutenaient que ce sang était celui de Shilen elle-même offert à ses enfants comme une arme contre ceux qui essayaient de la maintenir enfermée.
Mais Ses enfants veillaient dans l’ombre, et réussiraient à la libérer, tôt ou tard. En attendant, le combat de la Lumière et des Ténèbres reprendrait.