-Prélude-
Premier Chapitre
" Toute vie véritable est rencontre."
Lamalas Liandrell est un templier d’Eva, son nom lui avait été donné en hommage à un ancêtre oublié du peule elfique.
Plein d’esprit, et de vivacité on l'initia très jeune à l’art de la défense à travers le maniement de l’épée et du bouclier.
Lamalas ne passe pas inaperçu, son visage carré s’étire en pointe vers son menton. Ses longs cheveux d’un noir si profond rappellent celui de l’ébène. Et ses yeux -ses yeux verts sont d’une merveilleuse limpidité. Ils semblent vous lancer sans cesse des regards complices pleins de compassion. Tout son visage est, pour ainsi dire, illuminé d’une douce ténacité.
Il réalise de drôles de petits gestes saccadés, sa tête bouge sans cesse et son vif regard se pose partout, enregistre tout en un clin d’œil. Tous ses mouvements sont assurés comme les pas de la tortue. Oui, c’est bien ça, il ressemble à une robuste tortue sage et bienveillante.
Il y a bien longtemps un groupuscule nommé les Insaels Alfirins fut anéanti pour ses convictions jugées trop radicales. Les partisans de cette idéologie furent massacrés ou emprisonnés lors de la "nuit des eaux glacées".
Néanmoins un petit nombre de fidèles réussi à fuir dans une forêt reculée. Ce bois mystérieux n’était accessible qu’à partir des terres elfiques.
Lunes après lunes, printemps après printemps, les récits des Alfirins se transmettaient de génération en génération
Ils ignorent tout du monde actuel, de son évolution et ne désirent pas entreprendre un quelconque changement.
Quelque part dans une forêt oubliée...
Les Grands arbres ombrageaient magnifiquement cette partie de la forêt qui avait la particularité d'inspirer le templier. La douce mélodie des branches qui s'entrechoquaient sous l'effet du vent, apparaissait comme une caresse pour ses oreilles.
Lamalas était couché dans l’herbe fraîche adossé à un chêne près d’une rivière. Son bouclier et son épée déposés non loin, un petit carnet à la main, il s’adonnait à l’un de ses passe-temps préféré la poésie.
Dis ce que le feu hésite à dire
Soleil de l’air, clarté qui ose,
Et meurs de l’avoir dit pour tous.
Un craquement de branche retentit à quelques mètres, mais cela n’attira pas plus son attention, la forêt est verdoyante et de nombreux animaux y cohabitent paisiblement.
Concentré sur la tournure de ses vers, il ne sentit que tardivement la fine silhouette qui s’approchait
au loin de l’autre côté de la rive. Il leva les yeux et son regard se posa sur une Elfe qui récupérait un peu d’eau de la rivière. Se sentant observée elle leva les yeux à son tour, et ouvrit la bouche pour formuler cet unique mot « merci » et disparut comme une ombre dans la végétation.
Lamalas fut quelque peu troublé par la scène à laquelle il venait d’assister. Il n’avait jamais contemplé d’aussi belle créature, une beauté ineffable si bien qu’il se demanda si tout cela n’était pas le fruit de son imagination. Plusieurs questions lui vinrent immédiatement en tête : Qui est-elle ? D’où vient-elle ? Pourquoi a-t-elle fuit?
Des lunes passèrent depuis l’épisode de la rivière, Lamalas s’était reclus durant plusieurs mois plus haut dans les bois afin de méditer et prier sa déesse, il devait éclaircir son ésprit. Après plus de sept mois vécu en ermite, il se sentait métamorphosé, un doux sentiment l’envahit progressivement. Lamalas le ressentait au plus profond de son âme : Il devait quitter la forêt et rencontrer le monde.
Depuis des décennies déjà le templier ne se sentait plus toujours en adéquation avec les pensées de ses frères. Il s’interdisait parfois d’évoquer certain sujet. Si bien que régulièrement il s’imaginait se baladant par-delà les arbres de ce bois, sans jamais le souhaiter réellement. Mais l’apparition près de la rivière avait tout remis en cause. Lamalas perçut cela comme un signe envoyé par la déesse Eva. Il devait partir à la recherche de cette muse qui s’invitait dans ses poèmes et dans ses songes les plus profonds.
Un soir de pleine Lune sans un bruit, la tortue quitta son village. Elle avait seulement laissé un parchemin avec ces quelques phrases.
Nous sommes ainsi faits que les devoirs communs de l’amitié absorbent une bonne part de notre vie. Il est raisonnable d’aimer la vertu, d’estimer les belles actions, d’être reconnaissants pour les bienfaits reçus, et de réduire souvent notre propre bien-être pour accroître l’honneur et l’avantage de ceux que nous aimons, et qui méritent d’être aimés.
" Plus la tortue vieillit, plus sa carapace devient dure."