Solsin

[chazius]

Solsin Chapitre 1:

<center>Les sentiments ne se voient pas, mais se sentent…</center>


Des musiciens assis en cercle sur la place de Gludin entamaient le « thème de l’amour » avec un entrain qui faisait se retourner tous les passants , parmi eux se tenait un jeune humain au visage calme , aux bras forts et au sourire ravageur…elle ne cessait de le fixer avec des yeux brillants et humides, ne pouvant détacher son regard de lui …elle était transportée par les notes de son instrument et n’écoutait plus que lui…

La mélodie touchait à son paroxysme et elle ne put s’empêcher de s’élancer au centre du cercle et d’entamer à son tour une danse lente et lascive, usant de tous ses charmes pour attirer et fixer les regards sur elle…surtout son regard à lui.

Elle tenait un beau bâton d’ivoire à la main droite, le faisant parfois tournoyer dans ses mains jusqu'à le faire ressembler à un disque lisse et opaque. Ses mouvements précis et fluides faisaient onduler et s’entrelacer son corps avec ses longs cheveux noirs tels deux serpents dans une parade nuptiale…

Mais lui…

Il ne regardait rien…il semblait ailleurs dans un autre univers…ses mains caressaient les cordes de son instrument à l’en faire gémir…et elle…elle s’imaginait dans ses bras…elle dansait frénétiquement et ses pensées se bousculaient dans sa tète à lui en faire perdre toute lucidité…

Pourquoi ne la voyait il pas ? Parce qu’elle était sombre fille de Shilen ? Parce qu’elle était fille du peuple exilé ?

Elle était belle parmi ses sœurs et elle le savait …alors pourquoi ?

Y avait-il des hommes sur ces terres qui résistaient à ses longues jambes de nymphe ?
A ses douces rondeurs et à ses yeux ambrés ?

Le thème était fini et pas un de ses regards ne s’était posé sur elle alors elle se retira la tête baissée malgré les ovations de la foule des badauds.
Solsin, c’était ainsi qu’elle se nommait, fit quelques pas et s’assit non loin de lui.
Elle ne pouvait s’empêcher de rester là et de l’observer…sa vanité avait été rudement malmenée et son orgueil la poussait à trouver le fin mot de ce qui était pour elle une parfaite énigme…

Alors elle vit avec douleur l’objet de son violent désir se lever lentement et déplier une canne d’aveugle et se diriger vers un des quartiers de la ville appuyé sur le bras d’un autre musicien…

Les larmes coulèrent abondantes sur les joues de Solsin…
Comment les dieux pouvaient ils être aussi cruels…Un être aussi beau, aussi talentueux et aussi fort frappé de cécité…cet homme qui venait de ravir son cœur, ne pourrait jamais la voir…

Alors elle marcha derrière eux, elle s’approcha peu à peu de celui qui guidait et lui mit silencieusement une pièce d’or dans la main en lui faisant signe de partir…il obéit…
Alors Solsin prit doucement la place du guide tenant le bras du jeune homme sans que leur marche ne s’arrête…
Ils firent encore quelques pas sans qu’elle n’ose rien dire …quand le jeune homme lui dit d’une voix suave et mélodieuse :

Bonjour danseuse inconnue…

Elle s’arrêta stupéfaite ne sachant quoi dire…le jeune homme enchaina…

Ce que nous ne pouvons voir…nous le sentons…et je vous ai sentie…

Solsin répondit alors en séchant ses larmes :

Bonjour mon beau musicien…

Et ils continuèrent leur chemin…