[BG Kamaël] Xeryth

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Ashren
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[BG Kamaël] Xeryth

Message par Ashren » jeu. 25 juin 2020 à 18h40

Spoiler:
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Matricule : K2-00791-F
Prénom : Xeryth
Age : 62 ans
Sexe : Féminin
Race : Kamaël


Métier : Musicienne, cartographe, chroniqueuse, encyclopédiste
Compétences : Violon, calligraphie, éthologie, botanique
Combat : Maniement de la rapière
Magie : Manipulation des âmes


Alignement : Loyal-neutre
Guilde : -
Faction : -
Langues parlées : Commun et Kamaël


Description physique : Fière représentante des standards de son espèce, Xeryth s’établit à un peu plus d’un mètre quatre-vingt. Ses yeux pourpres, rieurs ou froids selon les circonstances, sont parfois masqués par quelques mèches de sa chevelure d’albâtre parcourue de reflets azurés, souvent indisciplinée et parfois domptée en un chignon savamment maintenu par un fragment de trait.
Confiante, grande et élancée, Xeryth reste néanmoins consciente des regards et de la passion que peut susciter l’asymétrie propre à son peuple. Elle s’efforce de maintenir son aile rabattue tant par pudeur que pour limiter les quelques contacts désagréables auxquels elle pourrait l’exposer. Seule l’ardeur des combats ou une passion irréfrénée peut l’inciter à la déployer.

Caractère : Hautaine à ses heures, Xeryth s’efforce de masquer ses excès scientifiques derrière une affabilité assumée. Animée d’une curiosité utile à sa mission, sa façade cèle en réalité une personnalité sinistrement méthodique et calculatrice.


Situation financière : Sans-le-sou
Comportement social : Vagabonde se mêlant aux populations locales afin d’en codifier les us et coutumes
Type d’éducation reçue : Militaire
Popularité et/ou influence : Aucune


Croyances :
  • Einhasad : Intérêt académique
  • Gran Kain : Intérêt académique
  • Eva : Intérêt académique
  • Shilen : Intérêt académique
  • Sahya : Intérêt académique
  • Pa’agrio : Intérêt académique
  • Maphr : Intérêt académique

Relations extérieures :
  • Elfes : Fascination
  • Humains : Relation cordiale
  • Kamaels : Relation purement hiérarchique
  • Nains : Relation cordiale
  • Orcs : Relation cordiale
  • Sombres : Fascination

***


Partie 1 : L’opportunité d’un échec

Je poussai la porte me menant à ma première étape. Le contraste me saisit immédiatement, alors même que je me maintins dans l’encadrure de la porte. Bientôt, j’abandonnerais les murmures du vent et m’exposerais à la cacophonie si familière aux tavernes. Le soleil pointant encore à son zénith, je m’accoutumai lentement à l’obscurité régnant dans l’établissement avant d’y pénétrer et de laisser la porte se rabattre dans mon dos.

L’établissement se saisit de mes sens. Mes tympans vibrèrent au rythme des conversations semblables à des hurlements. Des picotements m’assaillirent aux yeux et aux narines ; je distinguai une fumée flottant dans l’établissement, invisible tant que la lumière filtrait encore au travers de la porte que j’avais maintenue ouverte. Je me renfrognai un instant avant de recouvrer mon expression acquise : je ne prendrais aucun plaisir à m’attabler en ces lieux, mais la nécessité et ma mission me dictaient ma conduite.

La taverne semblait consister d’une unique pièce d’accueil. Je distinguai au-travers de la foule un comptoir, au fond de la pièce, derrière lequel un tavernier s'affairait. Non loin, je remarquai une porte aux planches mal ajustées et à la poignée luisante de graisse.

- Sans doute les cuisines, soufflai-je sans que ma propre voix parvînt à mes oreilles, étouffée par l’ambiance de l’établissement.

Mon attention se porta brièvement sur quelques ombres dansantes, dans un angle de la taverne. J’y devinai un âtre désormais impossible à atteindre tant l’emplacement semblait populaire auprès des clients, massés tel du bétail dans un enclos exigu.

Je m’enfonçai dans la taverne à la recherche d’une place libre. J’en trouvai une dans un angle quasi-déserté, à côté d’un nain. En m’approchant, je remarquai la présence d’un chanteur non loin de la place libre, presque invisible dans la marée humaine et tout autant inaudible.

Je me faufilai entre les clients attablés jusqu’à la place libre, prenant garde à limiter tout contact avec cette population alcoolisée et poisseuse de sueur. Je passai souplement mes jambes par-dessus le banc et m’assis. Le nain me sourit et m’adressa un hochement de tête en guise de salutations.

Je m’accoudai. La table, à peine plus large que les bancs, permettait à peine de disposer un plat de nourriture. Je me retournai et observai la nuée d’habitués : l’agencement de la taverne avait vraisemblablement été optimisé pour accueillir le plus grand nombre de convives.

Le nain s’éclaircit la gorge. Je reportai mon attention sur lui.

- Vous voulez le remplacer ? articula-t-il distinctement en me désignant un spécimen à sa droite, vautré dans ses régurgitations et la mousse dont il avait abusé. Je vous invite.

Je distinguai un humain, quoique que son aspect fût des plus grossiers. Je n’osai pas imaginer son odeur, et me réjouis que le nain, quoique ramassé sur lui-même et bas de stature, absorbât les effluves de son compagnon de beuverie.

- Volontiers, soufflai-je.

M’enivrer ne faisait pas partie de mes priorités, mais l’état de mes finances m’interdisait de refuser une boisson offerte.

Le nain se redressa et gesticula à l’adresse du tenancier à peine perceptible derrière son comptoir puis, au bout de quelques instants, se rassit. Mes sourcils s’animèrent : ses gesticulations avaient-elles seulement été remarquées au travers de la foule ? Peut-être un mode de communication non verbale efficace avait-il été développé entre ce nain et le tavernier, à mesure que le premier s’affirmait comme pilier de l’établissement du second ?

- Qu’est-ce que vous avez-là ? me demanda le nain, m’arrachant ainsi à mes pensées, en désignant un étui accroché à ma tunique et reposant contre mon omoplate libre.
- Mon violon, répondis-je laconiquement en appuyant mon sourire.
- Vous en jouez ? fit-il en haussant un sourcil.

Les muscles de mon visage se contractèrent imperceptiblement. Pourquoi donc m’encombrerais-je d’un instrument si je ne daignais en jouer ?

- Je pratique, en effet, soufflai-je sans laisser transparaître l’ire m’ayant brièvement animée.

Le nain me désigna le chanteur, un elfe aux vêtements limés d’usure et bigarrés à mesure qu’il les avait reprisés, d’un mouvement de tête. Sa mélodie, noyée dans le flot cacophonique des conversations d’ivrognes, ne parvenait pas à mes oreilles alors même qu’il se trouvait à quelques enjambées de ma table. J’observai l’artiste un instant : loin de se trouver sur une estrade, la taverne ne lui avait offert comme scène que deux tables aux jonctions inégale, accompagnant chacun de ses gestes d’une plainte.

- Alors, vous en pensez quoi ? Il est bon, hein ? fit le nain en me désignant à nouveau l’elfe dont la prestation ne trouvait public.
- Je ne peux réellement juger, répondis-je en feignant une grimace.
- Justement, fit le nain en s’esclaffant, ça fait plaisir de ne pas l’entendre celui-là !

Je ne protestai pas. L’art ne m’inspirait guère, seul son impact sur les âmes et émotions des êtres vivants se présentait pour moi comme un sujet d’étude digne d’intérêt. Le violon me permettait d’observer des réactions et, ainsi, d’apprendre. Je m’améliorais à mesure que mon étude progressait et, parfois, gagnais quelques adenas utiles à la poursuite de ma mission. Cette perspective me paraissait néanmoins close pour cet établissement : la monnaie n’affluait que lorsque la musique atteignait son auditoire. Ici, elle n’atteignait même pas le premier rang.

- Ah, voilà les boissons ! s’exclama le nain en souriant.

Je détournai mon attention du chanteur pour la reporter vers le tavernier. Il se fraya un chemin entre les tables et les bancs occupés, bousculant sans ménagement les quelques clients ayant l’outrecuidance de se dresser sur sa route. Bientôt, le tenancier abattit une choppe devant moi et devant mon bienfaiteur nain avant de repartir derrière son comptoir en maugréant.

- Avec qui vais-je trinquer ? me demanda le nain en empoignant sa choppe.
- Xeryth, répondis-je en me saisissant de ma choppe à deux mains.
- Terrvar, compléta le nain en frappant sa choppe contre la mienne, manquant de peu de m’asperger de son contenu.

Il porta la boisson à ses lèvres et, alors qu’un fluide doré et mousseux disparaissait dans sa gorge, ne laissant comme témoignages que quelques traces à la commissure de ses lèvres et sur sa barbe broussailleuse, articula un « santé » entre deux gorgées. Je me joignis à lui pour une gorgée puis reposai ma choppe : la tempérance me garderait de partager le destin de son ancien concurrent, encore inconscient.

Le nain finit sa boisson et, déjà, commanda à nouveau en usant de son code gesticulatoire. Je bus lentement, détournant peu à peu mon attention du nain vers le chanteur. Je me délectai de ses expressions et tentatives, tentant de faire fi des entités parasites m’entourant pour me concentrer sur mon sujet d’étude. Les minutes passèrent, ponctuées par quelques gorgées du breuvage offert que j’aurais autrement exécré, mais je ne parvins malheureusement pas à me défaire d’une présence.

- Vous faites quoi ici ? répéta le nain pour la énième fois. Qu’est-ce qui vous amène à Gludin ?

Je ne répondis pas immédiatement et l’observai un instant : l’alcool avait fini par l’affecter. Il gesticula à nouveau à l’adresse du tavernier. J’étudiai la table, parsemée de choppes vides ou renversées. Mon bienfaiteur, incapable de se tenir sur le banc sans se balancer, ne tarderait plus à rejoindre son premier compagnon.

- J’étudie nos ennemis, soufflai-je. L’ire a rebattu les cartes, et j’ai à cœur d’actualiser nos connaissances sur les cités que nous avons perdues et les monstres nous les ayant arrachées.

Le nain ne réagit pas. Son esprit, émoussé par l’alcool, ne parvenait vraisemblablement pas à analyser mes propos. Après tout, mon esprit et mes sens restaient parfaitement aiguisés, préservés par ma tempérance. Quoique, attablée dans cette taverne bruyante et malodorante, j’aurais daigné les sceller pour me préserver de bien des épreuves.

Soudain, un terrible fracas retentit et le silence gagna la taverne, ne laissant plus planer dans l’air que le désagréable fumet de ses occupants. Le chanteur, emporté par son ardeur, venait de chuter violemment de son promontoire. Je souris. Pour la première fois, l’attention des clients se porta unanimement vers l’artiste ou, du moins, vers sa scène de fortune.

Je me levai en extirpant mon violon de son carcan protecteur.

- Pauvre chanteur, murmurai-je en me dirigeant vers l’estrade de fortune.

Je bondis vers l’estrade et y atterris en déployant légèrement mon aile. Je bloquai mon instrument entre mon épaule gauche et mon menton, puis m’armai de mon archet. L’auditoire me fixa, silencieux. Au sol, le chanteur gémit faiblement. Comme rassurés, les clients esquissèrent un mouvement vers leurs choppes et victuailles respectives. Je ne leur laissai néanmoins pas loisir de se détourner de moi.

J’entamai ma première mesure. Mon prédécesseur à mes pieds, je pris l’opportunité de son échec. Je quitterais cette taverne plus fortunée que je n’y avais pénétré.
Dernière modification par Ashren le dim. 30 août 2020 à 10h56, modifié 1 fois.

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Re: [BG Kamaël] Xeryth

Message par Ashren » dim. 2 août 2020 à 23h39

Partie 2 : Le trait déviant


Mon regard glissa sur le soleil. Le zénith ne tarderait plus et, avec lui, mon attente prendrait fin. Je sortis un papier froissé d’un pan de ma tunique.

Destinataire : K2-00791-F.
Lieu de rendez-vous : 700 pas au Sud de Dion, en suivant la route. Arrêtez-vous au grand arbre creux dont les racines sont étouffées par celles d’arbustes naissants, dans un bosquet opaque.
Heure et jour du rendez-vous : le 16 d’Astrée de l’an 958, au zénith.
Objet : remise de rapport. Nouvelles consignes.
Contact : K2-09872-M.

Je froissai le papier dans ma paume, puis le remisai dans un pan de ma tunique. Il me faudrait le détruire à l’occasion, mais l’envie m’en manquait à l’instant.

Je m’éloignai de l’arbre un instant, m’assurant d’avoir bien atteint le point de rendez-vous : un bosquet dense le rendant obscur, une nuée d’arbrisseaux et, en leur centre, un grand arbre mourant au tronc creux. Je hochai la tête, certaine d’avoir trouvé le bon endroit. Il ne me restait plus qu’à attendre mon contact.

Je retournai près de l’arbre et m’y adossai, profitant de son ombre pour échapper aux premières lueurs du printemps. Plus qu’elle ne me gagnait, la fatigue qui m’habitait depuis ma dernière expédition sous terre me contraignait à revoir mes habitudes. J’avais appris à économiser mes gestes, pas encore mes paroles, et à adapter mes entreprises aux signaux parfois délétères que mon corps me transmettait. Surtout, j’avais appris à faire confiance et à considérer les capacités d’autres que moi. J’avais trouvé un allié qui veillait sur moi à tout instant, souvent à l’abri des regards.

Je me massai l’arête du nez et soupirai, balayant les pensées se bousculant dans mon esprit d’un geste de la main et me conditionnant pour mon entrevue. Après tout, n’étais-je point K2-00791-F et n’avais-je point une mission ?

Mes prunelles glissèrent à nouveau vers l’astre ardent : mon contact devrait arriver d’une minute à l’autre.

Je scrutai les collines, attentive au moindre mouvement. Une caravane se dessinait à l’horizon, mais je réalisai rapidement qu’elle rejoignait Dion. Bientôt, le soleil atteignit son zénith, et l’impatience me gagna.

- Et il fallait qu’il soit en retard , fis-je tant irritée par la fatigue que par le manque de déférence de mon contact.

J’attendis encore plusieurs minutes avant qu’une silhouette ne se découpât sur l’horizon. Bientôt, je pus distinguer l’asymétrie de l’arrivant.

- Au zénith, soufflai-je en regardant le soleil une ultime fois.

Je sortis un carnet relié de cuir de ma sacoche. Je remettrais mon rapport, écouterais ce que mon contact devait me dire, puis retournerais à mes occupations. J’avais beaucoup à faire, et trop peu de temps pour contenter l’ensemble de mes instincts scientifiques.

- K2-00791-F ? fit mon contact d’une voix forte quand il parvint à portée.

Je laissai mes yeux rouler dans leurs orbites et soupirai. Je devrais donc deviser avec un imbécile.

- Criez-le donc, lui fis-je sardoniquement, je crois que les oiseaux ne vous ont pas entendus.

Je m’attardai quelques instants sur le Kamaël. Un jouvenceau, grand et élancé comme presque tous les autres représentants de notre espèce. Seul son sourire me déstabilisa, bientôt supplanté par un terrible rictus de supériorité et une diction hautaine au point de la rendre difficilement supportable.

- J’en déduis que je suis au bon endroit, fit-il en regardant les points de repère indiqués sur son exemplaire de la convocation.
Il s’approcha d’un pas leste et se planta à quelques centimètres de moi, sous l’ombre du grand arbre. Il tendit une main vers moi, la paume vers le haut, son autre main fermement agrippée à la garde de la rapière battant sa cuisse.

- Le rapport , cracha-t-il en agitant les doigts.

J’alignai mon regard sur le sien et le soutins un instant, m’efforçant de contrôler l’ire naissante balayant ma fatigue pour ne point froncer les sourcils.

Je lui remis le rapport sans un mot.

K2-09872-M recula de quelques pas, jusqu’à échapper à l’ombre du grand arbre, avant d’ouvrir le rapport et de le parcourir. Il tourna les pages d’un geste presque frénétique, trop rapidement pour ne serait-ce qu’en deviner le contenu, accompagnant chacun de ses mouvements de poignet d’un commentaire sur mon travail.

- Des cartes, des dessins, des notes et encore des cartes, commenta-t-il avec suffisance. Gevurah sera ravie d’avoir de nouveaux dessins à présenter aux enfants.

Je me raidis et serrai la mâchoire.

- Le rendez-vous était au zénith, pas le zénith passé, relevai-je d’une voix rauque, déformée par la colère bouillonnante que je sentais poindre.

Le Kamaël souffla en refermant mon rapport. Il le remisa dans une sacoche avant de rétorquer :

- Oh, comme si vous teniez rigueur des ordres. Vous devriez déjà être bien heureuse d’avoir une mission, et pas des fers aux quatre membres !

Je me décollai du tronc de l’arbre creux d’un coup d’aile et rejoignis mon contact avec célérité. Je me campai devant lui, mon visage à quelques centimètres du sien.

- Je ne vous permets p…, commençai-je en m’empourprant.
- Calmez-vous K2-00791-F, me coupa l’impudent en faisant un pas vers moi.

Il me poussa en continuant :

- Inapte aux rangs. Indisciplinée. Acoquinée avec des humains, des nains, des orcs et des elfes !

Il me poussa une nouvelle fois, assez fort pour me faire tomber.

- Et maintenant, faible, fit-il en riant.

Je restai au sol un instant. Le soldat s’approcha d’un pas lourd et jeta une arbalète devant moi.

- Mais, Gevurah sait que vous êtes faible, fit-il d’un ton moqueur. C’est pour cela que vous avez une nouvelle mission. Vous allez pouvoir faire de nouveaux dessins. Vous allez pouvoir utiliser un nouveau jouet.

Il donna un coup de pied dans l’arbalète, qu’il envoya valser dans mes côtes. Je portai une main à mon poitrail meurtri. Puis, lentement, je me relevai, ramassant l’arbalète au passage.

- Vous pensez bien me connaître, K2-09872-M ? fis-je d’une voix à peine audible. Vous pensez vous être bien informé ?

Je remisai l’arbalète à ma ceinture et laissai ma main effleurer le pommeau de ma rapière. Guidée par un instinct forgé au fil de mille batailles, je laissai mes doigts glisser vers la poignée de mon arme et je la dégainai. L’impudent sourit en dégainant son arme à son tour. Il prit une posture de combat, prêt à m’asséner un coup d’estoc au moindre de mes mouvements.

- Vous pensez tout savoir à mon sujet, K2-09872-M ? soufflai-je cependant qu’un sourire se dessinait peu à peu sur mon visage. Faible, je l’ai été, tout comme vous à votre naissance. Indisciplinée ? C’est mal me connaître. Inapte aux rangs ? Peut-être, si c’est l’histoire qui doit être retenue. Acoquinée à d’autres races ? Pensez-vous que votre xénophobie est bienvenue à l'égard de ceux qui sont aujourd'hui nos alliés ?

Je m’avançai, la pointe de ma rapière orientée vers le sol. Une inspiration accompagna mon premier pas et, avec elle, les âmes alimentèrent ma magie. Une expiration accompagna mon deuxième pas et, avec elle, ma magie se manifesta et une aura sinistre nimba mon corps. Une inspiration accompagna mon troisième pas et, avec elle, l’impudent recula. Le vent hurla ; les feuilles bruissèrent. Aucun de nous ne détourna le regard de l’autre. Peut-être l’aurait-il dû.

- Dois-je vous rappeler votre allégeance ? bredouilla le soldat sans l’insupportable assurance qu’il affichait jusqu’à maintenant.
- Dois-je vous rappeler votre rang, soldat ? crachai-je alors que les âmes alimentant ma magie me semblaient hurler.

Le contact recula de plusieurs pas, sa fuite rythmée par sa respiration bruyante. Son assurance cédait sa place à une panique naissante. J’avançai d’une démarche sinistre, mon absence de garde et les âmes m’accompagnant se substituant aux menaces que je pourrais proférer ; K2-09872-M reculait en jetant des regards paniqués vers ma rapière. Mais, bientôt, je serais sur lui. Il ne pourrait pas me fuir à reculons.

Soudain, un éclair de lucidité traversa le regard du Kamaël et il s’immobilisa.

- Vous ne pouvez pas me toucher ! fit-il en reprenant son air hautain. Gevurah sait que je suis là. S’il m’arrive malheur, le lien avec vous sera vite fait !

Je haussai un sourcil : ainsi avait-il en réalité un semblant d’intelligence ? Je laissai les âmes m’échapper et ma magie se dissiper.

- Vous avez raison, fis-je en souriant. Gevurah sait que vous êtes là, et je ne peux pas vous toucher .

Un sourire carnassier apparut sur le visage du Kamaël. Il ne serait qu’éphémère.

- Mais, si vous m’importunez à nouveau, je n’aurais pas à vous toucher pour vous faire disparaître de la surface de ce continent , soufflai-je en lui indiquant ce qui se trouvait dans son dos d’un mouvement de menton.

Un grognement accompagna mon mouvement. Le Kamaël blêmit. Un frisson l'agita. Bientôt, sa prise sur sa rapière se fit moins assurée, et des tremblements parcoururent son bras d’arme.

- Et si vous rengainiez votre rapière ? soufflai-je en souriant. A moins que vous ne préfériez tentez votre chance face à mon compagnon ?

Le Kamaël déglutit. Il rengaina sa rapière lentement, puis se retourna en serrant la mâchoire. Kerthrael accueillit son regard d’un grognement sonore.

- Viens, fis-je en accompagnant la parole d’un geste de la main.

Mon loup s’avança jusqu’à moi en décrivant un large cercle, maintenant ses pupilles de prédateur sur l’impudent Kamaël et ponctuant ses mouvements par quelques grognements. Je rengainai ma rapière quand il fut à mes côtés, rassérénée par sa présence : Kerthrael aurait aisément dominé mon contact si je lui en avais donné l’ordre, et sans doute si cet imbécile de Kamaël m’avait réellement blessée.

- Gevurah entendra parler de cet incident, siffla K2-09872-M, son visage déformé par un rictus indescriptible.
- Pas la peine, fis-je en souriant. Le Hiérarque pourra le lire dans mon prochain rapport.

***

J’observai le soleil décliner depuis le creux du tronc, bien heureuse que mon contact ait déguerpi. Sans doute la tâche de me rencontrer serait attribuée à un nouveau soldat. Ou peut-être pourrais-je prendre l’initiative de rendre mes rapports avant qu’on ne vînt me les solliciter ?

Je portai ma main à ma ceinture et décrochai l’arbalète que le contact m’avait lancée sans considération. J’avais été formée à son maniement par le passé mais avais toujours préféré la rapière. Mais, sans doute Gevurah avait raison. La fatigue m’animant m’imposait de prendre plus de précautions dans mes engagements martiaux. Kerthrael pourrait contrôler les déplacements de mes adversaires, et je pourrais les cribler de carreaux. Et puis, Gevurah trouverait un nouvel intérêt à mes rapports si je déterminais les cibles à privilégier pour nos régiments d’arbalétrières.

Je hochai la tête en me résolvant à user de l’arbalète. Au moins la venue du contact ne m’aurait pas apporté que de l’irritation. Une nouvelle perspective d’étude s’ouvrait à moi et, avec elle, de nouvelles possibilités pour Gevurah.

Puis, je songeai aux paroles du contact : des dessins, des cartes, des notes. Sans doute mes rapports pouvaient même paraître inintelligibles pour ceux ne parvenant pas à les décoder.

Mais, déjà, le sommeil me gagnait. Je dormirais ici, dans l’arbre creux. Kerthrael monterait la garde et, si un frisson me parcourrait, se blottirait contre moi pour conserver ma chaleur. Je ne pouvais rêver d'un meilleur compagnon.

Mes paupières s’affaissèrent et, bientôt, mes pensées glissèrent d’un sujet à un autre, sans jamais s’y attarder assez longtemps pour en extirper un sens. A mon réveil, seule ma dernière pensée me reviendrait : quel rang Gevurah m’avait-elle attribué ? Ma mémoire ne me permettait plus de m’en rappeler. Sans doute devrais-je le demander à un Commandant à ma prochaine visite.

[Subclasse : Arbalétrière]

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Re: [BG Kamaël] Xeryth

Message par Ashren » dim. 30 août 2020 à 13h27

Partie 3 : Les mauvais remèdes


L'alcool ne se révélait qu'un répit temporaire. Malheureusement, ce répit s'accompagnait d'autres désagréments. Je songeai encore à ma démarche titubante de la veille cependant que j'armais mon arbalète. La bête ne se trouvait plus qu'à une cinquantaine de mètres. J'aurais pu tirer ; j'aurais pu l'abattre. Je n'en fis rien.

Kerthrael, à l'arrêt à quelques mètres sur ma droite, grogna. Il attaquerait la créature dans les prochaines secondes si je ne le tempérais point. Aussi l'intimai-je de celer ses crocs de ses babines d'un geste de ma main libre. Le loup s'assit en couinant : il me laisserait ma proie. Je songeai qu'il avait été bien facile à dresser, peut-être trop, mais me réjouissais d'avoir à mes côtés si fidèle et obéissant compagnon. Je mis la créature en joue. Elle serait sur moi dans quelques secondes. Une trentaine de mètres nous séparait encore. J'aurais pu tirer ; j'aurais pu l'abattre. Je retins mon tir.

Mon appétence pour les rumeurs m'avait menée ici, dans les marais d'Innadril. L'on m'avait conté l'attaque d'un convoi de Tomban. Par curiosité tant que par inconscience, je souhaitais désormais me mesurer aux créatures assez folles pour défier l'Ouest. Ma première proie, une bête humanoïde saurienne, poussa un hurlement d'intimidation alors qu'elle se précipitait dans ma direction, une lame grossière au poing. Bientôt, mon regard s'attarda sur les dents effilées ponctuant sa gueule. Plus que quelques mètres et la créature m'atteindrait. Plus que quelques mètres avant de décocher mon carreau. Je posai mon doigt sur la gâchette de mon arbalète, prête à en actionner le mécanisme.

Ainsi, j'attendis. J'attendis jusqu'à ce que mon regard croisât celui de la créature, jusqu'à ce que je pus sentir son haleine cependant qu'elle balançait sa lame dans ma direction en rugissant. J'attendis jusqu'à ce que mon adversaire remarquât le léger sourire imprimé sur mon visage et, là, j'actionnai le mécanisme. Le carreau siffla ; l'arbalète vibra entre mes doigts, ébranlée par la puissance du tir. La bête ralentit soudain ; sa lame s'approcha de mon visage avant de choir par dessus mon épaule. Elle tituba, son rugissement se muant en un râle étouffé. La créature eut à peine le loisir de contempler le carreau fiché dans sa poitrine avant de s'effondrer à mes pieds, innanimée.

Kerthrael couina, et je repris mes esprits. J'aurais pu abattre la créature à n'importe quelle distance. J'aurais pu me préserver de tout danger : après tout, n'était-ce point en partie pour cela que j'usais désormais d'une arbalète ? Mais, je n'en avais rien fait. J'avais attendu le dernier instant, l'instant où l'adrénaline me gagnait enfin et durant lequel je m'abandonnais au danger. Je soupirai : je n'avais point été formée à de telles manœuvres, du moins point à l'arbalète.

Je soupirai derechef. Le mal sombre m'affectait vraisemblablement plus que je ne me plaisais à l'admettre. Ma témérité nouvelle confinait à l'absurdité, et j'aurais tôt fait de périr si je ne parvenais point à me tempérer. Il me faudrait trouver une solution, mais point en ces lieux ni en cet instant. Je ne pouvais m'attarder dans les marécages : d'autres créatures pourraient m'assaillir, et je ne pouvais gager parvenir à décocher un nouveau carreau à bout portant avant d'être moi-même abattue.

Je m'agenouillai près du cadavre du saurien et l'examinai. Le carreau, fiché entre deux écailles, avait trouvé sa voie jusqu'au cœur de la créature. Je palpai ses écailles, plus tendres sur l'abdomen et l'intérieur des membres que sur le reste de son corps. Je pris des notes à mesures que j'accumulais les observations et, bientôt, me noyai dans le flot de mes pensées. Mon attention se détourna du saurien pour se reporter sur de lointains souvenirs. Gevurah se rappelait à moi, et avec elle nombre de frustrations, balayées en leur temps par les quelques convictions supportant désormais mon existence. Je me remémorai mes entraînements, les enseignements de mes Maîtres puis d'un seul. Je me remémorai mes interdits, bien que je ne les oubliasse jamais. Puis, je revins à moi, toujours agenouillée face au saurien, mon carnet noirci d'encre sur de nouvelles pages. Il me faudrait les relire, à défaut de les avoir écrites en pleine conscience. Combien de temps ma volonté m'avait-elle donc échappée ? Je n'avais pas le loisir de m'attarder sur cette question.

Un rugissement perça derrière une colline, bientôt accompagné par d'autres, plus faibles. Kerthrael grogna : des bêtes arrivaient. Il me fallait me replier ou combattre. La raison m'aurait confiné à la fuite mais mon irascible témérité m'intimait de combattre. Une décision bien peu avisée : j'attendrais sans doute le dernier instant pour décocher un carreau mais, face à de multiples adversaires, ne serais-je point mise en pièces par les créatures que je n'aurais point abattues ? Je mourrais, à n'en point douter. Ou, si je ne mourrais point devrais-je panser de nombreuses blessures. Et, qu'adviendrait-il de Kerthrael ? Il ne se résoudrait jamais à m'abandonner : si l'ennemi me débordait, il serait le premier à périr.

Mais, j'avais une alternative à l'arbalète. J'avais la parfaite compétence pour ma condition. Après tout, ne l'avais-je point apprise ? Gevurah ne m'avait nullement interdit d'user de cette connaissance. Moi qui, quelques semaines plus tôt, participais à une rixe de taverne, qu'avais-je donc à faire arbalète au poing et rapière au flanc ? Pourquoi me rattachais-je si ardemment au raffinement de mes arts alors que j'en maîtrisais également un qui me scierait à ravir dans mon présent état ? Après tout, la grâce Kamaëlle savait parfois se manifester d'une bien curieuse manière. Je cherchais une solution ? Ne venais-je point de la trouver ? Ou, plutôt, ne l'avais point toujours connue, quoique je m'en fusse longuement détournée ? J'abandonnerais la tempérance pour m'abandonner à la frénésie du combat.

Je ramassai l'arme de ma première proie, un bout de ferraille grossier, tranchant plus par hasard que par talent d'un forgeron. Elle ferait une parfaite épée ancestrale.

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Re: [BG Kamaël] Xeryth

Message par Ashren » jeu. 10 septembre 2020 à 19h51

Partie 4 : L'Aile de jais.

Je me défaussais d'une allégeance, et avec elle abandonnais alliés et, peut-être, amis. Bientôt, j'abandonnerais le continent, du moins pour un temps. Il me fallait trouver de nouvelles opportunités, de nouveaux axes que Gevurah et la Légion de l'Ouest sauraient exploiter.

Mes pas me porteraient au port de Gludin, mais point avant d'avoir effacé Xeryth : je rallierais bien assez tôt le continent et, alors, devrais œuvrer sans les entraves de mon identité. Je me résolus à altérer mon apparence, voire me masquer au besoin. Mais, aucune résolution ne me gagnerait jamais s'agissant d'abandonner feu mes compagnons d'armes à la faucheuse : même si je me celais, je me dévoilerais de nouveau un jour si cela me permettait d'assister ceux que j'estimais. Restait que, pour l'heure, ma mission se devait de prendre le pas sur mes convictions.

- Il me reste trois allégeances désormais, murmurai-je en avisant Kerthrael, au pas à ma droite. L'allégeance à moi-même, celle que m'a intimé mon Maître. L'allégeance à mon œuvre, le guide de mon existence. Et, l'allégeance à Gevurah, un tribut pour ma liberté.

Kerthrael grogna, doucement, comme pour annoncer son mécontentement de ne point avoir entendu son nom dans mes paroles. Mais, un loup pouvait-il se révéler si loquace ? Son intellect lui permettait-il seulement de comprendre mes paroles, outre quelques ordres maintes fois répétés ? Sans doute étudirais-je ce sujet si les occupations venaient un jour à me manquer. Rien ne m'interdisait, cependant, à me risquer à contenter mon compagnon.

- Je puis te concéder ma quatrième allégeance, Kerthrael, annonçai-je en regardant l'animal.

Comme pour me répondre, le loup émit un bref grondement, bientôt suivi par quelques discrets mouvements de queue : il comprenait plus que mes ordres, à n'en point douter. Ou, peut-être avait-il seulement réagi à son nom ? Le temps me manquait pour m'adonner à une telle étude.

Bientôt, mon étape avant le port se dessina sur la plaine : un ruisseau, presque imperceptible sinon par la douce complainte de l'eau et la brume matinale s'en élevant, offrant à mes prunelles un spectacle de mille scintillements à mesure que les rayons fendant l'empyrée l'atteignaient.

Quelques minutes passèrent avant que mon regard se posât enfin sur le cours d'eau, masqué par quelques roseaux.

- Chasse ! ordonnai-je à Kerthrael alors que je m'accroupis sur la rive et goûtai l'eau du bout des doigts.

Animé par l'ordre, presque frénétique, Kerthrael s'élança le long de la rive avant de disparaître dans un bosquet.

- Xeryth est très blanche, murmurai-je en sortant quelques articles d'une sacoche, cependant que mon regard suivait mon compagnon jusqu'à ce qu'il disparût.

Je déposai teintures et pinceaux à mes côtés puis, après m'être assurée qu'aucun regard indiscret ne me surprendrait, moins par pudeur que pour ne point gâcher mon entreprise de disparition, me déshabillai.

Alors, je pénétrai dans le ruisseau, à peine assez profond pour que l'eau m'arrivât à la taille à sa plus extrême profondeur. La fraîcheur de l'eau me saisit, mais point assez pour me dissuader d'y plonger buste, aile, visage et cheveux. Je ne m'attardai néanmoins point dans le ruisseau.

Nue, je m'armai d'un pinceau et d'une fiole de teinture opaque dont je l'enduis. Puis, j'appliquai la solution sur mes cheveux, scrutant mon reflet dans le ruisseau pour n'en omettre aucune mèche. Je m'appliquai et, à mesure que j'accumulais les coups de pinceau, ma chevelure argentée prit une teinte de jais.

- Xeryth est moins blanche, commentai-je en hochant la tête, satisfaite du résultat que mon reflet me laissait entrevoir.

Bientôt, je portai le pinceau vers mon aile, vers cette asymétrie gauche qui avait tant suscité la gaucherie chez certains curieux. Bientôt, il ne resta plus rien de mon aile diaphane, balayée qu'elle se trouva par une aile du même jais que ma chevelure. Puis, machinalement, comme si je l'avais toujours fait et aurais toujours dû le faire, je portai le pinceau vers mon aile droite. Néanmoins, je n'y trouvai rien d'autre que mon omoplate et la douleur d'un membre absent.

[Forme finale : première partie]

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Re: [BG Kamaël] Xeryth

Message par Ashren » jeu. 17 septembre 2020 à 20h14

Partie 5 : Résolution.

Le navire fendait les flots, son orgueilleuse progression ponctuée des clapotis des vagues se brisant sur la coque. Rendu stable par le poids de sa cargaison, si imposante qu'elle augmenta son tirant d'eau, le navire ne se trouvait agité que d'un léger roulis : une broutille pour son équipage, et désormais pour moi, accoutumée bon gré mal gré aux maux de l'océan.

Cloîtrée dans la cabine quand je ne me tenais point à la proue, le regard scellé sur l'horizon à l'affût d'un quelconque danger, je pondérais longuement mes alternatives : j'avais abandonné les Innommés, et avec eux tant des renseignements qu'un potentiel martial. Mais, je m'étais également défaite d'un carcan, et ma liberté retrouvée me permettrait la plus prompte et sereine réalisation de mes entreprises. Seulement, il me fallait pallier à ce dont je me privais.

- Bien, il est temps de faire un choix, soufflai-je en extirpant un carnet de ma sacoche, cependant que je m'asseyais derrière l'unique bureau de la cabine, scellé au mur par quatre clous rongés par le sel, Kerthrael allongé à mes pieds.

Je sortis une plume, de l'encre et plusieurs dizaines de vélin que je disposai devant moi. Mes doigts effleurèrent le bois, blanchit par des années d'exposition à l'air marin. Puis, plume en main et encre à portée, je détaillai les noms inscrits dans mon carnet : certains feraient de parfaits agents de terrain, d'autres parviendraient à orchestrer l'entier pan logistique d'un quelconque groupe, tandis que des derniers prospéreraient sans peine au sein des sphères politiques. Et, tous sauraient combattre l'Ire, tous sauraient secourir les populations, ou du moins en faire tentative, tous sauraient comprendre pourquoi la technologie des Géants devait être préservée.

Alors, convaincue de mes choix, je rédigeai ma première missive, puis une seconde. Je ne cessai d'écrire que quand le vélin vint à me manquer, et point même quand je perçus la présence du capitaine du navire après qu'il eût ouvert sans ménagement la porte de la cabine.

- Capitaine, soufflai-je en parachevant ma dernière missive.
- Madame, répondit le capitaine en retirant brièvement son chapeau.

Grisonnant, les vêtements tant raides que décolorés, attaqués par l'air salin autant que par le peu de soin qu'il leur apportait, le capitaine me détailla un long instant. Assurément, ma chevelure et mon plumage désormais de jais tranchaient abruptement avec l'idée que le marin se faisait des Kamaëls, d'autant plus maintenant qu'il avait pu en apercevoir quelques uns. À cela, s'ajoutaient mes vêtements noirs et mon air morne.

- J'ai la mort sur mon bateau, murmura le capitaine pour lui-même.

J'ignorai sa remarque et, impassible, interrogeai le capitaine au sujet d'une bien curieuse créature dont il m'avait vanté les mérites.

- J'ai quelques missives à expédier, commençai-je. Vous évoquiez un oiseau, une "mouette voyageuse" il me semble ?

Le capitaine sourit et, sans un mot, sortit de la cabine au pas de course. Bientôt, les vibrations du plancher annoncèrent son retour.

- Voilà la bête ! s'exclama le capitaine en passant la porte, une cage rongée par les embruns et mouchetée d'excréments dans les mains.

Consternée un instant, je posai néanmoins mes prunelles sur la créature en cage : une mouette, à n'en point douter.

- Donc, vous avez dressé une mouette à porter des messages ? demandai-je sans masquer mon scepticisme.
- Ouais ! fit le capitaine en fanfaronnant. Elle va du bateau jusqu'à notre gars du port, et de notre gars du port au bateau !
- Alors même que le bateau est en mouvement ? relevai-je, incrédule.

L'humain sourit en découvrant ses dents étrangement blanches. Il s'approcha de quelques pas et, présentant une main qu'il libéra pendant que l'autre soutenait la cage, me fit signe de lui confier mes vélins.

- Eh ! fit le capitaine. Parfois il faut bien croire en quelque chose !

Je considérai mes vélins. Assurément, il me fallait croire. Mais, ne cherchais-je point trop vite à m'entourer, alors que je recouvrais à peine la latitude d'actions qui m'avait préalablement fait défaut ? Après tout, je cherchais ne cherchais que des informations, des angles, des pistes. Et, pour cela, ne devais-je point avant autre chose faire appel à certaines de mes compétences ?

Je me levai et m'approchai du capitaine : pour l'heure, je ne lui confierais que deux vélins.

[Subclasse : Inspectrice - Partie 1]