[BG Métisse] Saoirse Meh'Säa

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Ashren
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[BG Métisse] Saoirse Meh'Säa

Message par Ashren » sam. 2 avril 2022 à 19h26

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Nom : Meh'Säa
Prénom : Saoirse
Age : 28 ans
Sexe : Féminin
Race : Demi-Elfe

Métier : Cardinale
Compétences : Partisane du moindre effort, Saoirse n'en reste pas moins une adepte de la magie divine. Sept années de formation au sein de la Division des Visionnaires de l'Académie lui ont appris tant à châtier les partisans de l'obscur qu'à invigorer ses alliés. Après tout, pourquoi se fendre d'un effort qu'un autre acceptera volontiers de fournir ?
- Magie : Cardinale - Soins divins et bénédictions
Métamorphoses : -

Alignement : Loyale-neutre
Guilde : -
Faction : -
Langues parlées : Commun et Elfique

Description physique : De complexion agréable, Saoirse ne saurait pour autant prétendre à l'insistance des plus agréables courtisans. Semblable à une Elfe, seule une légère dysmorphie trahit son métissage : si l'une de ses oreilles est elfique, l'autre est assurément humaine. Si sa richesse transparaît dans la qualité de ses vêtements, pour la plupart des robes amples somptueusement brodées, sa toilette est surprenamment austère. Saoirse n'apprécie guère les bijoux et ne s'en pare qu'en de rares occasions.



Caractère : D'une indolence exacerbée, Saoirse ne peut en réalité se permettre cet excès qu'au prix de véritables compétences et qualités, quoique difficilement perceptibles tant elle s'emploie à les celer. Calme, diplomate et pragmatique, la Demi-Elfe accomplit ses missions avec une honorable diligence, animée par la perspective de retourner à son confort.

Situation financière : De haute extraction, éduquée, adepte du luxe : Saoirse ne saurait plus vivre sans la légion de banquiers comptant ses adenas.
Comportement social : Noble de naissance, Saoirse ne s'accommode pas pour autant des réceptions et autres dîners mondains. Éduquée, elle démontre d'une équitable politesse à l'égard de toute personne, quelle que soit son extraction, ainsi que d'une égale volonté de se défausser de leur compagnie.
Type d’éducation reçue : Saoirse a reçu une éducation complète dès le plus jeune âge. Initiée aux us des cercles de noblesse par ses parents, son enrôlement au sein de l'Académie lui a permis de bénéficier d'une éducation religieuse et politique.
Popularité et/ou influence : Malgré sa tendance à l'inertie, les compétences de Saoirse sont reconnues au sein de l'Académie. Saoirse est honnie par quelques personnes, rares survivantes du siège de Giran, pour ses décisions prises sur le pont Sud. D'autres personnes, survivantes tout aussi rares de ce même siège, l'admirent pour ces mêmes décisions.
Pensée politique : Quoiqu'initiée aux arcanes de la politique, la Demi-Elfe est indifférente à sa pratique. Consciente de certaines manœuvres et luttes de pouvoirs, elle préfère les ignorer tant qu'elles ne nuisent pas à son quotidien.

Croyances : Académicienne de formation, Saoirse a rapidement intégré à ses pratiques les grands préceptes du culte d'Einhasad. Révérencieuse à l'égard de la Déesse-mère, elle manifeste également un profond respect pour les enfants-Dieux restés dans le giron de leur mère. En contrepartie, elle voue une haine sans limite envers Shilen et ses engeances. Seulement, si sa foi semble saine, Saoirse s'abandonne volontiers à la passion d'un culte plus insidieux : l'argent et le confort qu'il lui procure. La demi-elfe est thésaurisatrice à l'excès seulement pour le plaisir de se défausser de monts d'adenas dès qu'il plait à son humeur.

Relations extérieures : Qu'importe la race ou l'extraction, pour Saoirse tout être est doté d'un égal potentiel d'inconvenance. Attachée à son confort et à l'indolence dans laquelle elle se complet, elle n'apprécie pas d'être sollicitée pour des banalités. Dans de rares cas, Saoirse parvient tout de même à se lier d'amitié avec certains êtres, pour peu qu'elle estime que le temps qu'elle investit dans cette relation ne lui sera pas néfaste.
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Re: [BG Métisse] Saoirse Meh'Säa

Message par Ashren » lun. 4 avril 2022 à 11h31

L'illusion Gludienne - An 949

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Un bourdonnement parvenait à ses oreilles, témoignage cacophonique de l'entrain des convives réunis dans le grand salon du Baron Meh'Säa. La musique, production d'une troupe démarchée pour l'occasion, un temps distincte et agréable, ne parvenait désormais plus à imposer sa mélodie, noyée dans le flot de discussions dont elle ne devenait plus qu'une distraction.

Les jambes sur le dossier d'un fauteuil, sa robe en pagaille et ses cheveux, pourtant ordonnés pour l'occasion, déjà ébouriffés, la jeune Saoirse attendait patiemment son heure. Malgré ses à peine douze printemps, la jeune noble ne pouvait échapper tant aux us de sa condition qu'aux emplois que lui réservait son père. Alors, Saoirse attendait, un soupir au bord des lèvres, guettant le son bien distinct des talons de sa gouvernante heurtant le marbre bleu du couloir menant jusqu'à sa chambre.

Bientôt, le tocsin des talons retentit : la gouvernante traversait le couloir à un rythme quasi-frénétique, jusqu'à ce que la porte de la chambre s'ouvrît sans guère de cérémonie.

« Saoirse, que faites-vous donc ainsi ! » tonna la gouvernante en avisant l'état de la jeune fille, débraillée.
« J'attends, Cécile, j'attends », répondit la jeune fille.

Lentement, la Demi-Elfe laissa basculer ses jambes sur le côté et, accompagnant son geste d'une plainte témoignant de sa lassitude, se redressa.

« Vous êtes dans un état déplorable ! » s'alarma la gouvernante. « Votre robe est froissée et vos cheveux... ne parlons pas de vos cheveux ! »

Saoirse haussa les épaules, bien consciente de son état mais plus encore de son absence de volonté de se mêler aux pires engeances de la noblesse et de la bourgeoisie environnantes. Un nouveau soupir fendit les lèvres de la jeune fille, qui déjà inspirait et en préparait un nouveau. Mais, fidèle à sa fonction, Cécile arracha Saoirse au cercle de lamentation duquel elle ne ne savait que trop bien s'accommoder.

D'une main ferme mais sans rudesse, la gouvernante attira Saoirse devant une armoire. D'un geste pratiqué, elle libéra, quoique brièvement, la jeune fille du carcan de sa robe et en sélectionna une nouvelle, présentable. Cécile vêtit Saoirse comme elle l'aurait fait avec un poupon, guidant ses bras dans les manches, ajustant chaque pli de la robe avant de nouer les lacets en ponctuant les flancs.

« J'ai du mal à respirer », se plaignit Saoirse cependant que Cécile resserrait les lacets.
« Il fallait y penser avant de vous affaler », répondit Cécile. « Si vous pouviez faire honneur à votre rang et vous imposer un minimum de maintien avec le sérieux que vous arborez devant des invités lorsque vous êtes seule, votre père en serait fort satisfait. »

D'un dernier geste, la gouvernante acheva d'ajuster la robe. Assurément, personne ne pourrait ignorer la présence de la jeune Saoirse : immaculée, brodée de fils d'or et alourdie de quelques joyaux, la robe de la jeune fille démontrait de la fortune du Baron Meh'Säa autant qu'elle complimentait sa silhouette svelte.

Puis, avec la même humeur, Cécile installa la jeune Saoirse devant un miroir, se saisit d'une brosse et s'employa à discipliner la chevelure de l'adolescente. Geste après geste, la chevelure de la jeune fille s'ordonna et, quand la matière la satisfit, la gouvernante entreprit de véritablement composer une coiffure, cependant que Saoirse guettait chacun de ses gestes dans le reflet du miroir. Ainsi, une mèche devint une tresse, deux tresses une couronne, quelques cheveux bien ordonnés une frange : Cécile œuvrait avec un nouvel entrain, fredonnant à mesure qu'elle progressait dans son œuvre. Mais, alors qu'elle s'apprêtait à ordonner les cheveux de l'adolescente pour masquer son oreille humaine, Saoirse protesta vigoureusement.

« Non ! » tonna Saoirse en se redressant d'un bond, manquant de peu de percuter sa gouvernante dans son élan. « Vous ne touchez pas à mes oreilles ! »

Cécile déglutit, surprise par la réaction de la jeune fille.

« Saoirse, vous savez bien que votre père, le Baron Meh'Säa, n'apprécie pas de la voir », se risqua la gouvernante, presque confuse. « Dans sa bonté, il tolère votre handicap et ordonne de le celer pour votre bien, Saoirse. »
« Mon oreille humaine fonctionne aussi bien que l'autre ! » fulmina l'adolescente.

La gouvernante resta coite. Mais, déjà Saoirse, un instant pivoine, retrouvait sa pâleur naturelle. L'adolescente lança un dernier regard glacial à sa gouvernante et, ses deux oreilles parfaitement visibles, quitta sa chambre pour rejoindre la réception.
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La réception avait commencé depuis plus d'une heure quand Saoirse parut enfin dans le grand salon du Baron Meh'Säa, peut-être même une trop longue heure s'il fallait considérer l'ivresse étreignant certains des invités. Dansant au son inaudible des mélodies d'un orchestre peinant à s'imposer face à mille conversations concurrentes, quelques convives se partageaient le centre du salon, réservé aux danseurs pour l'occasion. La plupart des autres convives, qu'ils fussent enivrés au point que les colonnes soutenant les balcons encadrant le salon les soutenaient désormais eux-mêmes, ou capables d'exercer assez de retenue pour s'octroyer le privilège de juger de la vertu des autres, occupaient les contours de la pièce, regroupés en autant de cercles de discussion que d'intérêts pouvaient prospérer au cœur de la noblesse et de la bourgeoisie Gludienne.

Saoirse balaya l'assemblée du regard, guettant les conversations cependant qu'elle recherchait son Baron d'Elfe de père.

« Si vous donnez voix à mon avis », commença un convive, « et je ne puis que l'imposer à vos perceptions quoique que vous n'en fassiez point cas, ces engeances bestiales qui sèment terreur et misère, progressant au Sud non à renfort de crocs et d'acier mais par grâce de l'incompétence de ceux qui gouvernent ces nobles terres, ne sont pas une réelle menace. »
« Je ne puis qu'acquiescer », commenta une Dame. « Nos cousins du Sud, pour peu que nous puissions les qualifier ainsi tant il est inconvenant de comparer leurs qualités, absentes, à la grandeur de notre gouvernement, ne ploient face aux bêtes que par incompétence. »
« Mais, là est l'opportunité ! » continua un autre convive. « Voyons au-delà d'une invasion indolore : voyons des terres qui, demain, nous reviendrons ! »
« Vous faites montre de la plus ample des assurances », commenta Saoirse en se joignant au cercle de conversation.
« Honorable Saoirse », la salua un convive. « Avec nos forces conjuguées, la victoire face à ces Bêtes est à portée d'une simple manœuvre militaire. Et, des troupes victorieuses sont toujours bien accueillies par le peuple. »
« L'allégeance du peuple n'ira-t-elle alors point au Général Élion ? » se risqua Saoirse. « Les rumeurs ne font état que de son dévouement et de ses victoires, point de celles de vos tr... »

Une main posée sur son épaule coupa Saoirse, trop consciente de son propriétaire.

D'un geste subtil, les convives s'inclinèrent pour saluer leur hôte. Saoirse se retourna et porta son regard sur son père, un Elfe que les années ne semblaient affecter et dont l'extrême richesse imprégnait chaque fibre de son être.

« Baron Meh'Säa », le salua l'un des convives. « Cet événement est des plus exquis, je ne cèlerai pas le plaisir qu'avoir accepté votre invitation me procure. »

« C'est mon plaisir que de côtoyer mes pairs », répondit le Baron en souriant. « Mais, en père, c'est mon devoir que de côtoyer ma fille. Je vous prie donc de nous excuser. »

Sans attendre de réponse, le Baron s'extirpa du cercle de discussion, tirant Saoirse derrière lui jusqu'à un cabinet. De taille modeste et pauvrement agencée, les murs épais encadrant la pièce offraient cependant un répit à la cacophonie ambiante. Là, le Baron considéra sa fille, détournant le regard quand sa perception eut le malheur de s'attarder sur la dysmorphie de l'enfant.

Un instant, le Baron resta silencieux, le regard dans le vide, avant de s'adresser à sa fille.

« Ne parlez pas à ces imbéciles », commença-t-il. « Nous savons tous deux qu'ils n'ont aucun pouvoir, ni aucune compétence militaire. Peut-être n'ont-ils pas même une perception suffisante pour comprendre que l'Ouest ne connait point le même sort que le Sud que par les efforts du Général Élion. Mais cela, ce n'est pas à vous de leur rappeler. Laissez-les se complaire dans leur ignorance et les opportunités illusoires qu'ils s'estiment à même de saisir. »

Le Baron se détourna un instant de sa fille. Il s'approcha d'un bureau et, d'un geste fluide, en déverrouilla un tiroir. Il en inspecta longuement le contenu sans pour autant y prélever un quelconque article. Ses oreilles, habituellement parfaites, droites et inexpressives, s'agitaient sans qu'il parvînt à les contrôler. Il soupira longuement, d'un soupir si sonore que sa fille sursauta tant il était semblable à ceux dont elle se fendait régulièrement. Le Baron, bien conscient qu'il n'avait guère plus de pouvoir que celui que les adenas pouvaient lui conférer, n'existait plus à l'intérieur du cabinet. Sa posture, son statut, tout ce qu'il représentait s'affaissa d'un pan pour qu'il redevînt père l'espace d'un instant.

« Saoirse », souffla-t-il d'une voix étranglée, « c'est ta dernière nuit ici. Demain, tu partiras pour Giran où tu intégreras l'Académie. »
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Re: [BG Métisse] Saoirse Meh'Säa

Message par Ashren » lun. 4 avril 2022 à 13h07

Saoirse des Visionnaires - An 956

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Un soupir sonore troubla la monotonie de la litanie de l'Académicien. D'une coordination éprouvée, l'amphithéâtre entier se tourna vers la source du soupir, une Demi-Elfe affalée sur son pupitre, un œil clos et l'autre fixé sur une chaire où, sauf au mépris de son affectation, elle ne siègerait jamais. L'Académicien, un rictus déformant son visage habituellement placide, ajusta ses lunettes d'une main tremblante.

« Saoirse Meh'Säa ! » tonna-t-il. « Après presque sept années au sein de notre institution, pourquoi faut-il toujours que vous démontriez de votre désinvolture de manière aussi sonore ! »

Saoirse se redressa, s'étirant au passage, dévoilant un sourire satisfait.

« Je prends mes affaires ? » demanda la Demi-Elfe avec désinvolture.

Le Cardinal s'empourpra et, d'un geste de la main, chassa sa terrible étudiante. L'Académie ne connaissait pas d'échec, se répétait-il. Mais, face à cette fille de Baron, cette enfant terrible se complaisant dans l'indolence, ne faudrait-il point ménager une exception ? La fille Meh'Säa accomplirait son sacerdoce dans quelques semaines : l'Académie pouvait-elle accueillir une Cardinale de son tempérament au sein de ses rangs ? Certes, la Demi-Elfe démontrait de véritables qualités, d'une connaissance profonde du dogme et d'une maîtrise fort convenable de la magie divine. Mais, ces qualités justifiaient-elles d'ignorer sa perpétuelle mélancholie et sa tendance à l'inertie ?

« Qu'Elle nous garde », murmura l'Académicien.

Déjà, Saoirse quittait l'amphithéâtre, un fin sourire aux lèvres, pour retrouver les rues de Giran.
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Telle une mélodie enfantine, Saoirse récitait la litanie qu'elle avait interrompue d'un soupir. Perceptive qu'à ses oreilles au milieu des invectives et injonctions des marchands Giranais, la litanie ponctuait ses pas vers le siège de toutes ses paresses : un établissement obscur, impopulaire tant son propriétaire ne savait le promouvoir, mais d'une quiétude si absolue que Saoirse ne pouvait que l'apprécier.

Après quelques minutes de marche, Saoirse quitta les artères principales de la cité marchande pour s'engager dans une ruelle qui, quoique sombre, restait bien entretenue. Là, elle poussa la lourde porte en chêne d'une devanture sans enseigne : un salon de lecture seulement connu par quelques initiés et fréquenté quasi-exclusivement par la Demi-Elfe.

« Saoirse », la salua le propriétaire sans lever les yeux du livre qu'il parcourrait, assis dans un grand fauteuil molletonné. « Tu arrives plus tôt que d'habitude. »
« Je me languissais de la qualité de ton accueil, Marc », répondit Saoirse d'une voix filante.

Déjà, dans un élan insoupçonné, la Demi-Elfe se jeta sur un canapé et s'y réceptionna sur le flanc. Un soupir de bonheur lui échappa alors qu'elle s'étalait de tout son long sur la banquette, adoptant, par des mouvements experts, la position la plus confortable pour ses heures de paresse à venir.

« Marc », souffla Saoirse quand elle fut parfaitement installée, « tu veux que je te paye ? »

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L'homme, un individu précieux à la chevelure bouclée, fournie et argentée, releva un instant les yeux de sa lecture avant de les y replonger.

« Tu vas lire quelque chose ? » demanda Marc.
« Non », souffla Saoirse.
« Dans ce cas, je ne te ferai rien payer », conclut-il.

Saoirse roula sur la banquette du canapé et se contorsionna pour scruter les étagères fournies d'ouvrages. Lentement, elle détailla les couvertures dépareillées, les quelques parchemins soigneusement conservés dans des cylindres d'ivoire et les rares tablettes trônant sur un présentoir. De toutes les bibliothèques, celle de Marc comprenait la collection la plus hétéroclite.

« Tu ne développeras jamais ton affaire avec cette attitude », commenta la Demi-Elfe.
« Pourquoi m'en donner la peine ? » rétorqua Marc. « Tu sais aussi bien que moi que ma collection ne trouve valeur qu'à mes propres yeux. Mes encyclopédies sont incomplètes, mes corpus amputés de plusieurs volumes... »
« Mais tes canapés sont les plus confortables de tout Giran ! » le coupa Saoirse.
« Mais mes canapés sont les plus confortables de tout Giran », répéta Marc en affichant un sourire doucereux.

Le silence retomba dans l'établissement, seulement troublé par le bruit de pages glissant les unes sur les autres à mesure que Marc progressait dans sa lecture. Saoirse restait immobile, le regard voilé, perdu dans les lueurs floues émanant d'un chandelier, défaillantes à mesure que l'heure avançait. De tout Giran, sans doute même d'Aden, Saoirse n'appréciait plus de lieu que cet établissement, cette bibliothèque perdue, impopulaire, joyau de tranquillité au cœur d'un continent en émoi. Mais, trop tôt, Marc acheva sa lecture et sa voix grave vint briser le silence, communion tacite entre la Demi-Elfe et lui.

« Tu seras bientôt Cardinale, n'est-ce pas ? » demanda Marc.

Saoirse ne répondit pas, préférant baigner encore un instant dans l'illusion de liberté de ses sept années d'études qui prendraient bientôt fin.

« Une fois que tu auras accompli ton sacerdoce, et même si tu as enfin des responsabilités et moins de temps pour paresser, passes tout de même ici de temps en temps, le canapé sera toujours à ta disposition », expliqua le bibliothécaire.
« Merci, Marc », répondit Saoirse. « Je vais devoir participer à des exorcismes. J'en suis lasse rien que d'y penser. »

Marc se leva de son fauteuil. Il se dirigea lentement vers une étagère et y déposa son livre, sans se soucier d'un quelconque classement alphabétique ou thématique. Puis, un doigt levé devant son visage, il parcourut les tranches des ouvrages de sa collection afin de sélectionner sa nouvelle lecture.

« J'ai entendu que le Haut Cardinal convoquait des prêtres pour prodiguer des soins aux blessés de guerre. Tu ne devrais pas plutôt te joindre à cet effort ? » demanda Marc.

Saoirse se redressa ; Marc tira un manuscrit relié de cuir. La bientôt-Cardinale soupira puis, d'un rebond, se redressa. L'oisiveté ne pouvait s'apprécier pleinement qu'à la mesure du travail qu'elle daignait accomplir par ailleurs.

« J'aurais préféré », répondit enfin Saoirse. « Malheureusement, ce n'est pas parce que les bêtes gagnent du terrain que les démons se replient. »
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Re: [BG Métisse] Saoirse Meh'Säa

Message par Ashren » lun. 4 avril 2022 à 15h04

La fuite - An 957

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Tel l'éclair annonçant le tonnerre, la rumeur n'avait point tardé à infliger sa réalité aux Giranais. L'armée bestiale, cette Ire qu'aucun lettré n'avait su expliquer, se masserait bientôt devant les portes de Giran. Déjà, une peur insidieuse s'insinuait dans l'esprit des habitants. Elle ne tarderait pas à se muer en une terreur instinctive, vivante même dans les cœurs des plus braves, de ceux qui, déjà, prenaient les armes et se postaient aux portes de la cité ou sur ses murailles. Mais, autant fuyaient la cité, encombrant les voies qu'empruntaient les soldats en repli tirant derrière eux leurs camarades blessés au combat.

La Grande Place de Giran, autrefois le principal carrefour commercial de tout Aden prenait désormais tous les traits d'un hôpital à ciel ouvert. Là, au milieu des braves agonisant au sol, des blessés désabusés, piétinés par des fuyards, sous l'ombre d'une cathédrale rappelant à tous la présence de la Mère, la Cardinale Saoirse s'abandonnait à la frénésie du triage. Cela faisait déjà plusieurs heures que canaliser sa magie l'affligeait de nausées et de douleurs si vives qu'elle dût œuvrer de toute sa volonté pour ne pas perdre conscience. Alors, elle laissait pour l'heure le soin à ses pairs, Académiciens, Cardinaux ou non, cependant qu'elle s'infligeait la plus terrible des missions.

Trébuchant d'un blessé à l'autre, d'un cadavre à l'autre, Saoirse constatait les décès et, parmi les blessés, condamnait ceux que la magie sauverait mais ne porterait pas sur leurs pieds. Alors, quand elle estimait qu'un soldat pourrait agiter son glaive à nouveau, elle le marquait du bout de ses doigts, par un cercle tracé d'une peinture blanche ; une croix condamnait les autres.

La gorge sèche, les yeux brûlants de la fumée qui s'élevait de plus en plus partout dans la cité, Saoirse s'agenouillait auprès d'une victime après l'autre pour juger de son état. Sa tunique, habituellement immaculée, s'alourdissait désormais du pourpre des vies s'écoulant à même les pavés de la Grande Place. Épuisée, la tête de plus en plus légère, Saoirse devint incapable de distinguer si le sang qui la maculait était le sien ou celui de ses patients. Mais qu'importait le sang, qu'importait la douleur ou la conscience qui lui fuyait à mesure que le temps s'égrenait douloureusement : l'on appelait la Demi-Elfe auprès d'un autre patient et elle s'y rendait.

Celui-là vivait encore. Mais la magie ne lui rendrait pas ses jambes et il aurait tôt fait de se vider de son sang ; elle le marqua d'une croix. Un autre respirait encore, mais son souffle bruyant et ses expectorations indiquaient qu'il ne tarderait plus à se noyer dans son sang.

« Qu'Elle t'accueille en son domaine », murmura Saoirse en se redressant.

Un « Cardinale Meh'Säa » retentit sur la Grande Place. La Demi-Elfe s'orienta, titubante, dans la direction de l'appel.

« Cardinale Meh'Säa », répéta un individu en se plantant devant Saoirse qui semblait incapable de le percevoir.

Soudain, des mains saisirent les épaules de la Demi-Elfe et sa conscience fuyante revint à elle. Un adolescent revêtu de l'uniforme de l'Académie se tenait devant elle, une lueur de terreur dans le regard. Saoirse le reconnut : une recrue de la Division des Protecteurs, de quelques années son cadet, qu'elle avait déjà croisé à plusieurs reprises au cours de ses études.

« Cardinale Meh'Säa, vous allez bien ? » demanda le jeune homme sans lâcher prise de ses épaules, comme s'il craignait qu'elle s'écroulât s'il la libérait.

Saoirse acquiesça d'un hochement de tête.

« Cardinale Meh'Säa, écoutez-moi attentivement », commença le jeune Protecteur en prononçant chaque mot aussi distinctement qu'il y parvenait dans le brouhaha ambiant. « Le Haut Cardinal Antinéas a des ordres pour vous : vous devez vous rendre sur les ponts et travailler à l'évacuation des populations non combattantes par bateaux. Vous devez œuvrer à l'évacuation des enfants, de nos aînés et de tout adulte incapable de se battre. Vous n'êtes plus en état de rien faire ; vous embarquerez avec eux une fois l'évacuation menée à terme. Tous les autres, femmes ou hommes, doivent participer à la défense de la cité. Est-ce que vous avez compris ? »

Après un instant, Saoirse acquiesça d'un nouveau hochement de tête.

Le jeune homme lui adressa un sourire contrit et relâcha enfin ses épaules. Lentement, les larmes aux yeux, il s'éloigna de la Demi-Elfe.

« Attends ! » se força Saoirse en constatant la trajectoire du jeune homme, qui l'éloignait des ponts. « Tu n'évacues pas ? »
« Je suis un homme en état de me battre », répondit le Protecteur en étouffant un sanglot.

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Feignant une vigueur nécessaire à sa tâche, feinte qu'elle soupçonnait pratiquée par ses collègues, Saoirse tenait un front sur le pont Sud de Giran, départageant encore ceux qui pourraient embarquer sur un navire et fuir la cité et ceux qu'elle condamnait à en défendre les murs.

Proie de toutes les tensions et de toutes les espérances, Saoirse et ses quelques alliés s'abandonnaient peu à peu au constat de l'insuffisance de bâtiments capables d'évacuer la population non combattante. Même en vidant les cales de toutes les marchandises qui pourraient s'y loger, jamais un nombre suffisant de navires marchands ne se présenterait sous le pont pour l'évacuation. Un à un, les quelques élus descendaient sur les ponts salvateurs, glissant le long d'une corde au bas de laquelle des marins les réceptionnaient.

Les ponts se noircissaient de Giranais tétanisés, s'agglutinant là où les marins les guidaient pour que chaque bâtiment parvînt à accueillir autant d'individus que sa flottaison lui permettrait. Mais, malgré le tri opéré par la jeune Cardinale et ses aidants, malgré la résolution animant des parents abandonnant leurs enfants en pleurs pour défendre leur cité, convaincus qu'au moins ces jeunes âmes survivraient, le pont ne semblait nullement se libérer de sa marée humaine, chacun compressé à un autre, presque incapable d'avancer d'un pas.

Mais, soudain, la marée se mut à l'effet d'une annonce.

« Les bêtes sont au mur Nord ! Les bêtes sont au mur Nord ! » hurla un homme, bientôt accompagné par d'autres.

Un silence mortuaire gagna le pont ; un silence d'un instant. Le suivant, la panique gagna la population et des hurlements retentirent de toute part.

Une vague déferla, s'abattant sur Saoirse et ses alliés. Déjà, faisant fi de tout pour privilégier leur survie, hommes et femmes se jetaient du pont pour aborder les navires. Nul ne leur importait de faire chavirer un bâtiment ; nul ne leur importait la vie des autres, ne valait plus que la leur.

« Arrêtez ! » hurla la jeune Cardinale. « Vous allez tous les tuez, arrêtez ! »

Comme une prophétie, des cris d'enfants parvinrent aux oreilles de Saoirse : un navire apponté, pris d'assaut par des survivants, chavira. Les enfants à son bord se noieraient, de même que tous ceux installés dans la cale.

« Arrêtez ! » hurla Saoirse cependant que la pression de la foule la broyait contre la rambarde.

Mais, rien n'y faisait. Aucun ordre, aucune injonction ne parviendrait plus à calmer la population. Dès l'origine, Saoirse savait que beaucoup périraient, que les navires ne pourraient jamais tous les transporter. Mais elle espérait en sauver certains et, pour cette œuvre, elle accepta de condamner les autres.

Manifestant là ses dernières forces, Saoirse se ménagea l'espace nécessaire pour se dégager de la foule. Ignorant la douleur, les coups qu'on lui assénait, les insultes fusant à son encontre et à tous ceux représentant le Clergé, elle se dressa sur la rambarde et choisit sa mort.

« Partez ! » hurla-t-elle en accompagnant la parole de grands gestes. « Larguez les amarres ! Partez ! Vite ! »

Peut-être l'entendirent-elle ; peut-être, plus sûrement, avaient-ils déjà pris cette décision après que le premier bâtiment eût chaviré. Les navires s'éloignèrent du pont d'où se jetaient encore certaines personnes et, à mesure que l'espoir d'une fuite s'estompait, le silence regagna l'assemblée. Les regards se voilèrent ; quelques sanglots troublèrent le silence. La poitrine de Saoirse se soulevait au rythme de sa respiration saccadée. Elle baissa les yeux vers ses alliés. L'un d'eux approuva ses actions d'un hochement de tête. Un autre, gisant de céans, ne paraissant plus respirer.

« Il n'est plus question de fuite maintenant », fit Saoirse d'une voix tremblante mais parfaitement audible. « Regagnez les portes et les mur... »

La jeune Cardinale n'eut jamais l'occasion d'achever sa phrase. La douleur, cette ennemie oubliée au long de son effort, se rappela à elle, lancinante. Du sang ruissela sur son front, assurément le sien. Le souffle court, incapable de comprendre ce qui venait de lui arriver, Saoirse bascula en arrière et chuta dans le fleuve.

Les yeux grands ouverts, brûlants, Saoirse admira les volutes vermillon qui se dégageaient de son front meurtri cependant qu'elle sombrait vers les abysses. Mais, elle ne sombra que jusqu'à ce qu'une main puissante saisît sa tunique et l'arracha de l'eau pour la hisser sur une barque.

« Cardinale ! Cardinale ! » répétait un pêcheur cependant que son collègue manœuvrait sa barque pour l'éloigner du pont. « Restez avec nous, Cardinale ! »
« Sauvez-en d'autres », murmura Saoirse dans un dernier effort, cependant que la conscience la fuyait. « Pas moi, d'autres... »

Elle ne se réveillerait qu'à Althéna.


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Re: [BG Métisse] Saoirse Meh'Säa

Message par Ashren » lun. 4 avril 2022 à 16h41

Conscience professionnelle - An 965

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Affalée sur une banquette d'hippomobile, ballotée par les aspérités de la route, à l'évidence peu empruntée, reliant Dion au charnier prospérant sur son territoire, siège de ces morts qui ne trouvèrent jamais repos même après avoir présenté leur nuque au fil d'une guillotine, Saoirse profitait de ses dernières heures de paresse.

Encore aujourd'hui, elle rêvait d'une chaire d'Érudite, chimère inaccessible pour une Visionnaire condamnée à l'action. Ainsi, l'Académie déployait-elle la Cardinale Meh'Säa partout en terres libres, sinon à Giran. Entre deux missions, la Demi-Elfe logeait selon ses humeurs, à Althéna au cœur de l'Académie nouvelle, au sein des meilleurs salons de Gludin, proche des plus belles plages d'Heine ou au cœur du domaine familial à Gludio. Au final, qu'importait l'endroit, seule valait la qualité de l'oisiveté. Oisiveté seulement troublée par ses affectations et sa dernière avait tout pour lui déplaire : un larcin qui la menait sur une route cahoteuse. Un livre, instrument de l'Obscur, avait été dérobé lors de son transit vers Althéna. Les voleurs, trois humains zélés, quoique bien moins que les gardes lancés à leur poursuite, avaient fui jusqu'à se réfugier au milieu des non-morts des Terres d'Exécution, là où bien peu risquaient de s'aventurer.

« Confisquer des ouvrages pour ensuite les égarer, encore un exploit de l'Académie », commenta Saoirse en se redressant.

La Cardinale tapota la paroi dans son dos du bout des phalanges. Une trappe s'ouvrit quelques instants plus tard, laissant entrevoir le visage gras et rougeot de l'avide cocher qui avait accepté de la guider jusqu'à destination. Sans doute aurait-il été plus rapide et moins onéreux de louer une bonne monture, mais la Demi-Elfe n'avait aucune envie d'éprouver le cuir de son fondement si elle n'y était autrement contrainte.

« Sommes-nous bientôt à destination ? » demanda Saoirse sans se retourner vers l'ouverture.
« Encore une heure ou deux, Dame Cardinale », répondit le cocher.

Saoirse acquiesça d'un hochement de tête et, d'un mouvement de la main, lui demanda de refermer la trappe.
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« Je ne vais pas plus loin », annonça le cocher en fixant le sentier serpentant entre les collines, point d'entrée vers les Terres d'Exécution.
« Je ne vous l'ai nullement demandé », répondit Saoirse. « Contentez-vous d'attendre mon retour ici, bien sagement. »

Le cocher leva le doigt, comme pour protester.

« Je vous paierai le tarif du retour quand je reviendrai, pas d'avance sur salaire », anticipa Saoirse cependant que les lèvres grasses du cocher s'animaient.
« D'accord, Dame Cardinale », répondit-il en se fendant d'une ridicule révérence.

Un soupir pour toute motivation, Saoirse s'engagea sur le sentier menant jusqu'au charnier, entonnant un requiem perfectionné lors de ses années de formation. Les non-morts s'apaiseraient au son de sa voix, juste assez pour pouvoir progresser au travers du charnier et retrouver les voleurs sans qu'ils manifestassent d'agressivité à son égard.

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Bientôt, serpentant entre les goules et autres pauvres hères à jamais arrachés à la grâce de la Mère, Saoirse repéra deux corps encore intacts : deux de ses voleurs. Elle s'approcha et, constatant leur trépas, recommanda leurs âmes aux Dieux au prix d'une brève prière. Elle ne cherchait désormais plus qu'un voleur et, à considérer les corps, un meurtrier.

Saoirse balaya les environs du regard, reprenant l'air de son requiem à mesure qu'elle détaillait le charnier. Puis, soudain, ses prunelles se figèrent d'incrédulité. La jeune Cardinale cilla à plusieurs reprises, peinant à se convaincre de la réalité de la situation : le dernier voleur attendait, patiemment adossé à la guillotine siégeant au centre du terrain.

Saoirse se ressaisit et s'approcha lentement du voleur, scrutant le moindre de ses mouvements. Quand plus que quelques mètres ne la séparaient de lui, elle avisa le livre, serré contre sa poitrine, maculé d'un sang poisseux, mêlé tant de celui du meurtrier que de ses victimes. En s'approchant encore, Saoirse remarqua la plaie béante dans le flanc de l'homme.

Considérant tant les préceptes de la Mère que l'intérêt de le maintenir en vie et de le livrer à l'Académie, Saoirse s'agenouilla près du voleur, semblablement épuisé par la fuite et la perte de sang, et entama une incantation. Sa dernière parole prononcée, une douce lumière nimba le corps du voleur. Mais, l'incantation n'eut aucun effet, pas même sur ses chairs qui restèrent béantes.

Un réflexe sauva Saoirse, résultat d'une parfaite assimilation des enseignements des Visionnaires. Sa magie, même si elle ne pouvait sauver cet homme, aurait dû fonctionner. Mais, quelle que fût sa ferveur en la Mère, une engeance ne pourrait jamais être affectée par ses soins.

La Demi-Elfe bondit en arrière cependant que l'homme se ramassait sur lui-même et se jetait sur elle, une lame ensanglantée, émoussée contre les os de ses précédentes victimes, à la main. Soudain, la lame se heurta à une barrière, fruit d'une incantation précipitée de la jeune femme. Le répit serait de courte durée et seule la plus pure lumière de la Mère permettrait à Saoirse de lutter, mais au prix de sa propre sécurité.

Entamant une litanie d'où transparaissait la pureté de sa foi, Saoirse accueillit la lumière d'Einhasad en son être pour porter l'inquisition sur les terres d'Elmore et d'Aden. Purificatrice, vindicative, brûlante, la lumière de la Mère se manifesta au travers de la Cardinale et, alors que la barrière s'affaissait et que la lame s'approchait de son abdomen, Saoirse frappa le Démon.


Blessé, affaibli par sa fuite, la lumière d'Einhasad eût tôt fait d'achever son enveloppe corporelle. Alors, lentement, œuvrant par à-coups permis par sa volonté, Saoirse se dégagea de la quintessence divine à laquelle elle avait dû recourir.
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Saoirse reparut devant son cocher quelques heures après son départ, sa tunique souillée de boue et un grimoire entre les mains. Sans un mot, elle extirpa une bourse d'un pan de son vêtement et la lança au conducteur.

« Allez, en route », souffla Saoirse.
« Euh, Dame Cardinale... » se risqua le cocher.

Saoirse l'interrompit d'un geste de la main et, sans plus de cérémonie, s'installa dans l'hippomobile. Elle contempla l'ouvrage un instant avant de l'emballer dans un linge. Bien idiot celui qui tenterait de l'ouvrir et la Demi-Elfe ne comptait pas ce défaut parmi ses traits. Elle déposa le livre à ses pieds puis, éreintée, s'allongea sur la banquette en se laissant glisser contre le dossier. Un article inconfortable la contraignit à se redresser.

Là, sur la banquette où elle souhaitait retrouver l'indolence, un cylindre d'ivoire avait été déposé. Saoirse s'en saisit d'un soupir, bientôt accompagné de plusieurs autres à mesure qu'elle en découvrait le contenu. À peine achevait-elle sa mission qu'une nouvelle lui parvenait : elle devait désormais se joindre à l'effort de guerre.