Sheitana

[Faye]

Chapitre 1 - Apprendre

La nuit... L'été... La chaleur... La sueur...

Sheitana travaillait sans relâche, s'entraînant aussi dur qu'elle le pouvait pour réussir à maîtriser sa magie... La magie de son père... Ce père qu'elle avait chéri sans jamais l'avoir vu, sans l'avoir connu, sans même savoir si il connaissait son existence. Peut-être n'était-elle pour lui qu'un fantôme, une ombre sans forme distincte... Ou peut-être n'était-elle rien. Mais au fond de la jeune fille, en son coeur, peu importait. Elle vivait en imaginant ce grand guerrier mage qu'était son père. Depuis sa plus tendre enfance, elle rêvait de ce père revenant dans son village, et venant la serrer fort contre lui dans ses bras, comme si il savait tout d'elle, comme s'il regrettait d'avoir disparu tout ce temps. Et elle savait qu'elle lui pardonnerait sa si longue absence. Tout comme elle savait qu'en son coeur elle aurait toujours cette image de ce père idéal, même si cet inconnu était totalement différent de celui qu'elle voyait dans ses fantaisies quotidiennes.

Chaque jour, quand la nuit se levait, elle allait chercher à l'entrepôt son bâton de magie qu'elle avait acheté avec les économies que sa défunte mère lui avait léguées à son retour d'Aden, quelques mois avant de tomber malade, ce qui la mena ensuite à la mort... Après avoir pris son bâton dans son coffre, elle se rendait dans les marécages afin de chasser les chauves souris aux yeux rouges, qui étaient sensibles à sa magie de vent. Cette magie dans laquelle elle mettait toute sa volonté de réussir , dans le but de rendre fière cette ombre, ce père, cet inconnu.

Cette nuit là était chaude et, dans les marais, l'atmosphère était oppressante, étouffante. L'humidité et la transpiration de la jeune fille collaient ses vêtements à son corps et ses cheveux noirs à son visage. Sheitana pataugeait dans l'eau saumâtre et stagnante des marécages. Les moustiques bourdonnaient rageusement aux oreilles de la magicienne, agacée par ce bruit incessant. Entre deux sorts, Sheitana agitait une main nerveuse auprès de ses longues oreilles pour vainement tenter de chasser les insectes volatiles. Les chauves souris tombaient les unes après les autres sous la puissance de la magie du vent que la demoiselle apprenait jour après jour à maîtriser. Peu à peu, un sourire de satisfaction vint se peindre sur les lèvres de la magicienne tandis qu'elle s'enfonçait entre les arbres aux feuilles pourrissantes et aux racines tordues et torturées sortant ça et là, dépassant du sol et apparaissant au dessus des la surface des eaux verdâtres. Enfin, quand elle eût erradiqué la majorité des créatures volantes, Sheitana fit volte face et rentra au village en trainant des pieds, erreintée, mais le corps encore soumis au flux d'adrénaline courant dans ses veines.

Arrivée au village, la demoiselle rentra chez elle et se changea. elle ôta sa robe de combat toute humide de sueur, se sécha avec attention, puis enfila une tunique et une jupe de cuir souple. Elle s'assit sur sa couche et regarda ses mains encore tremblantes, tout en songeant à son entraînement et à ce modèle inexistant qu'elle se plaisait à suivre avec force volonté et rage de vaincre. Puis d'un coup, elle songea à sa mère... Sa mère avait, durant toute sa vie, maîtrisé à la perfection l'art des dagues. Elle avait également longuement voyagé, laissant sa fille au village sou la protection des maîtres de magie et des tetrarchs. Elle avait vu la terre des humains et avait servi pour des mercenaires en ville de Giran. Elle avait connu nombre de combats et souffert de nombreuses blessures. Mais un jour, elle revint de Giran, épuisée et mal en point... Elle était malade, et la magie des prêtres du village ne trouvaient pas de remède à son mal. Si bien qu'un jour hivernal, Shilen l'a rappela à elle, sans que quiconque ne sut quelle malice avait pénétré son coeur et son corps.

Epuisée, Shilena s'étendit sur sa couche, regardant le plafond grisâtre de sa chambre silencieuse d'un air absent, sentant le sommeil l'étreindre dans ses bras chaleureusement tendres. Fermant les yeux, elle murmura pour elle même "Apprendre..."


(Ecriture du second chapître en cours)